408 VOYAGE
dais. Tenana, à son retour de P o rt-Ja ekson, faisait
oljserver à ses compatriotes qu’en ce pays on pouvait
mourir de faim à la vue de vivres de toute espèce, sans
que personne vînt vous l ien offrir Taï-Wanga prenant
à discrétion des patates cuites dans la pirogue de
Shongui, me les offrit ainsi qu’aux canotiers, et pour
mieux nous déterminer à les accepter, il ajoutait qu’à
la Nouvelle-Zélande ce n’était pas comme à Port-Jack-
so n , et qu’il n’était pas nécessaire de donner de l’argent
pour avoir de quoi manger.
Quand ces naturels ont prononcé à des étrangers
les mots ; Aire mai, aire maï'^, on peut compter sur
un bon accueil de leur p a rt, car chez eux cette invitation
est sacrée et inviolable. Tant que ces mots ne sont
point sortis de leur bouche, leurs intentions sont suspectes
3. Du moins, les voyageurs peuvent agir en conséquence,
et c’est à eux de se retirer s’ils n’ont pas
obtenu le salut favorable.
Les fréquens rapports des Nouveaux-Zélandais avec
les Européens, el l’introduction des armes à feu , ont
modifié leur caractère d’une manière peu avantageuse.
Ils sont devenus dissimulés, avares, défians,
exigeans et arrogans 4. De tous les peuples de la Nouvelle
Zélande que j ’ai eu l’occasion de fréquenter, aujourd’hui
les plus vicieux et les moins sociables m’ont
paru être ceux de la baie des Iles, et parmi ceux-ci
les plus insupportables appartiennent aux tribus de
J Nicholas, I , p. 35o. — 2 Nicholas, I , p. 127. — 3 Cruise, d’Urv.,
I I I , p. 6 5 6 . — 4 D’Uiville, I I I , p. 673.
DE L ’ASTROLABE. 409
Rangui-Hou et de Kidi-Kidi, tout-à-fait corrompues
par le commerce continuel des Européens, et par les
munitions de guerre dont ils sont devenus possesseurs
'. On sent que je ne veux point parler du commerce
des missionnaires, mais bien de celui des baleiniers
anglais et américains, gens en général grossiers,
brutaux, sans moeurs et souvent sans bonne foi.
III.
CONSTITUTION POLITIQUE.
Rien ne rappelle mieux les anciens clans d’Ecosse Uangs.
ou les septes de l’Irlande, que les peuplades de la Nouvelle
Zélande 2. Chaque tribu n’est en quelque sorte
qu’une grande famille qui reconnaît un chef 3, auquel
tous les autres membres prêtent plutôt déférence et
respect qu’une véritable obéissance. Les rangatiras
ou nobles ont d’autant plus d’influence ou de crédit
qu’ils tiennent de plus près au chef, et qu’ils ont plus
de domaines et d’esclaves. Ily a des rangatiras de tous
les ordres , depuis celui qui possède de grandes propriétés
et beaucoup d’esclaves, jusqu’à celui qui ne
possède que son titre de simple guerrier. J ’ai cru remarquer
que quiconque était par sa naissance indépendant
, pouvait prendre le titre de rangatira, sans
cependant rien affirmer de positif à cet égard. Le peuple
se compose des esclaves4, des enfans d’esclaves.
. Cruise, p. 58. D’Urville, I I , p. 2 3 3 , 238. — a Savage, p. 26. —
3 Cook, deux. V o y ., I II, p. 3 7 1 . — 4 Revue Britannique, d’ü r v ., III,
p. 722.