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 30 VOYAGE 
 1827. 
 Janvier. 
 dans les  cases voisines.  Il me fut très-agi'éable  de  les  
 voir se fixer près de nous ; rien ne pouvait mieux nous  
 PI.  X X X V I II .  démontrer leur confiance et la sincérité de leurs intentions. 
  En o u tre , ainsi placés sous la volée même de nos  
 canons ,  le moindre attentat de leur part eût été  suivi  
 d’un châtiment prompt et sévère. 
 Après m'étre  assuré des dispositions  pacifiques des  
 naturels  et  avoir  d’ailleurs  tout préparé,  s’ils  en  témoignaient  
 d’autres, pour les réprimer promptement,  
 je descendis à neuf heures et demie,  suivi de M.  Les-  
 son  et  du matelot  Simonet,  à  la  plage  qui  porte  le  
 Pl.  X X X IX .  nom d’Aiguade  sur notre  carte.  En effet, la première  
 chose que j ’y remarquai avec joie,  fut un joli ruisseau  
 de l’eau la  plus limpide qui venait  en serpentant dans  
 le  sable  se  décharger  à  la mer,  et  où  notre  chaloupe  
 pouvait,  à  marée  haute,  faire  toute  notre  eau  avec  
 la plus grande  facilité. 
 Le  terrain  environnant  est  très-inégal,  montueux  
 et difficile à pratiquer. Au premier abord, je fus frappé  
 du  rôle  que jouaient,  dans  la  végétation d’un climat  
 déjà si éloigné de la ligne, des fougères de toute espèce  
 identiques avec celles des tropiques, ou du moins parfaitement  
 analogues.  Les  espèces  ligneuses  et même  
 arborescentes  habitent  en  foule  les  ravins humides,  
 tandis  que  des  coteaux tout entiers sont occupés  par  
 celle  dont la racine  fournit une substance alimentaire  
 aux habitans de ces régions. Les phanérogames y sont  
 très-peu  variées  par rapport  aux  fougères ;  la  saison  
 étant  trop  avancée,  peu  d’entre  elles  offraient  des  
 fleurs ou des fruits. C’est ce qui avait lieu surtout pour 
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 les arbres,  dont plusieurs se  faisaient remarquer  par  
 l’élégance  de  leurs  formes comme  par la beauté et  la  
 solidité  de  leur bois.  Parmi les  plantes parasites, j ’ai  
 observé de beaux Epidendrum ou Dendrobium ;  aucune  
 lige de Phormium ne s’es t présentée à mes regards.  
 Aucune  espèce  d’insectes  coléoptères,  autre  qu’une  
 cicindèle sabulicole,  aucun papillon  diurne,  ne vient  
 animer  la  scène.  Il  y  a  cependant  bon nombre  d’oiseaux  
 :  j’en  tirai  de  sept  à  huit  espèces,  el  j’en  vis  
 plusieurs  autres  que  je  ne  pus  atteindre.  Il  est  digne  
 de  remarque  qu’ils  sont  tous  farouches,  à  l’exception  
 d’un  moucherolle  qui  est  d’une  familiarité  
 excessive. 
 Dès  qu’on  s’arrête  dans  quelque partie d’un  bois,  
 on  est  sûr  de  voir  paraître  au  moins  un  ou  deux  
 de  ces  oiseaux  autour  de  soi.  Ils  vous  considèrent  
 en  silence  et  comme  avec  curiosité;  si  vous  restez  
 vous-même immobile, ils poussent la confiancejusqu’à  
 venir  se percher  sur  votre  canne ou sur  le  canon  de  
 votre  fusil.  Le  beau merle à  cravate ( Certhia circin-  
 nata de Forster)  est  commun  dans  ces  bois.  Un  rat  
 fut  l’unique  quadrupède q u e j’aperçus. 
 Le  cîel  s’est  couvert  sur  les  quatre  heures  après-  
 midi ;  bientôt  la  pluie  est  tombée  et a été continuelle  
 jusqu’à minuit.  Le temps est resté chargé, et la pluie a  
 recommencé au jour pour durer jusqu’à midi. 
 Une  nouvelle  pirogue  est arrivée,  et  ceux  qui  la  
 montaient  se  sont réunis  aux autres.  Ils  viennent  de  
 temps en temps à bord pour continuer leurs marchés  
 aussi paisiblement qu’à l’ordinaire,  et s’en retournent 
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 Janvier.,