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 au-delà de ce point avait repris une teinte moins sévère.  
 Les  alentours  du  cap  Gable  sont  particulièrement  
 agréables,  et  il  y  a  des  sites  dont  une  culture bien  
 entendue ferait  sans  doute  de  fertiles campagnes.  Là  
 les fumées se montrèrent encore en plus grand nombre  
 que partout ailleurs,  preuve  infaillible  d’une  population  
 plus nombreuse. 
 Près  du  cap,  nous  prîmes  un  dauphin  à  ventre  
 blanc,  très-curieux  par  son museau  étroit et pointu,  
 comme  celui  du gavial. 
 Vers six  heures  du  soir,  nous  approchions  de  la  
 baie Tolaga de Cook,  et je  comptais  la  doubler  avant  
 la nuit, quand la brise,  qui avait déjà beaucoup molli,  
 tomba  entièrement,  et  la  corvette  resta  immobile  à  
 trois ou quatre milles de la côte. A sept heures du soir,  
 nous crûmes voir un petit schooner, qui iilait d’abord  
 le  long  de  te rre ,  reprendre  tout-à-coup  le  large  et  
 disparaître,  manoeuvre  dont  je  ne  pus  me  rendre  
 compte qu’en supposant que ce navire avait des motifs  
 qui lui rendaient notre visite peu agréable. 
 A  huit h eu re s,  deux  pirogues  que  nous  voyions  
 depuis  quelque  temps  pagayer  vers  nous,  accostèrent  
 le  long  du  bord  sans  aucune défiance et comme  
 des gens  accoutumés à  voir  des Européens.  Ils  nous  
 vendirent des cochons ,  des pommes de terre et quelques  
 objets  de  curiosité  pour  des  haches,  des  couteaux  
 et  autres  bagatelles.  Quarante-cinq  jours  s’étaient  
 écoulés  depuis  notre  départ  de  la  Nouvelle-  
 Hollande ,  et nos  provisions fraîches  étaient  épuisées  
 depuis  long-temps.  On  peut  juger  avec  quel  plaisir 
 celles-ci furent accueillies,  surtout quand on nous eut  
 appris que les  cochons étaient abondans  à Tolaga,  et  
 qu’on  nous  les  céderait  an  plus  bas  prix.  Terangui  
 Waï-Hetouma,  chef des  Zélandais  qui  étaient venus  
 nous visiter et qui s’annonça pour être l’un des principaux  
 rangatiras  du  canton,  voulait  renvoyer  ses  
 pirogues  à  terre  pour  chercher  des  cochons  et  des  
 pommes  de terre,  et passer  la nuit  avec  nous.  Je   ne  
 pouvais  être que très-satisfait de cette preuve de confiance  
 , mais redoutant pour ce naturel le sort de ceux  
 de Tera-Witi, je m’y refusai, et le contraignis, quoique  
 à son grand reg re t,  à  se rembarquer dans sa pirogue.  
 Je  lui  promis  du reste qu’il nous  retrouverait le  lendemain  
 matin au même  endroit. 
 Tebi-Nouï et Koki-Hore paraissaient désormais résignés  
 de bon coe u r, car une ration copieuse de chair de  
 dauphin dont on les avait gratifiés,  les avait mis  dans  
 l’enchantement  par  la  perspective  du  régal  qu’ils  se  
 proposaient pour le  lendemain;  et  le  soir,  un  requin  
 qui  fut  aussi  capturé  leur  valut  un  supplément  qui  
 combla leur ivresse.  Séduits par cette abondance,  ils  
 semblèrent  peu  disposés  à  acquiescer  au  désir  que  
 j’avais de  les  voir rester  ici ;  Koki-Hore  particulièrement  
 ne goûtait pas du tout cette proposition. 
 Toute la nuit, il ne régna qu’une faible brise d’ouest  
 avec  un  temps  superbe. A dix heures  du  soir,  nous  
 restâmes en panne  par  cinquante-trois  brasses,  sable  
 vasard. 
 Dans la matinée,  la  brise ayant passé au N. N. O.,  
 et ne nous permettant plus de prolonger la côte, je me 
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