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1827.
Mars.
236 VOYAGE
pas un être animé ; six mois avaient suffi pour convertir
en ruines des cases fragiles dont les matériaux n ’étaient
que des branches, des feuilles, et quelques
planches; partout Fherbe remplissait leurs intervalles.
Avant qu’il se soit écoulé deux ou trois années, les
voyageurs pourront à peine distinguer si ce coteau fut
habité ; tant s’effacent rapidement les traces des peuples
demeurés étrangers aux arts de la civilisation •*'!
Je fis prendre par mon secrétaire trois ou quatre
vues différentes de ce village abandonné ; je méditai
quelque temps sur ses ruines, et, ramenant mes yeux
sur la corvette mouillée paisiblement sous mes regards,
je me rappelai les épreuves qu’elle venait déjà de subir.
Une année seulement s’était écoulée depuis notre dé-
pai t de France, c’était a peine le tiers de la carrière
qu’elle avait à fournir. En outre, les parages que nous
allions parcourir étaient bien plus dangereux que ceux
que nous avions traversés, la Nouvelle-Zélande exceptée.
II y avait lieu sans doute à de graves réflexions...
Mais je me relevai brusquement sans vouloir
m’y livrer ; je repris le chemin de la plage, et je
m embarquai à l’endroit même où Touaï m’avait montré
avec orgueil ses immenses filets, quatre ou cinq
fois plus grands que notre seine. Il ne restait plus
que les poteaux du hangar où on les ramassait.
Je fis diner avec moi l’infortuné Rangui, honneur
que je n ’avais accordé à aucun des autres chefs de la
baie des Ile s , et le questionnai de nouveau sur ce que
la tradition lui avait appris touchant le meurtre de
Marion. Ainsi que me l’avait déjà raconté son frère
Touaï, Rangui déclara que Tekouri, qui s’en était rendu
coupable, n’appartenait point à la baie des Iles, mais
à Wangaroa, ainsi que ses guerriers. Toupahia ou
Malou était chef de Ra^iti où Marion se trouvait
mouillé, et Kotahi commandait dans Fîle Motou-Doua
où les malades avaient été déposés. Celui-ci, grand-
père de Koro-Koro, fut la première victime des Français.
Rangui assure positivement que c’est à Marion
que ses compatriotes doivent les cochons, les oignons,
les raves , les choux et les navets qu’ils possèdent aujourd’hui.
Malgré les injustes réclamations des Anglais
, la chose paraîtra plus que probable quand on
voudra bien réfléchir que Marion séjourna plus de
deux mois sur ce point, qu’il y fit défricher un jardin
et planter toutes sortes de graines. Cook au contraire,
qui n’y parut que dans son premier voyage, n’y passa
que cinq ou six jours, et il ne dit nulle part qu’il ait
laissé aux naturels aucune de ces productions, ce
qu’il n’eût pas manqué de mentionner, dans le cas contraire.
— Manawa-Oura est un terrain situé au fond
de la baie de Manawa et à deux milles seulement des
bois où croît le koudi ; c’est là que M. Marsden comptait
former un établissement du temps de Koro-Koro.
— Rangui m’a appris que Fîle Motou-Doua est un
apanage particulier de sa famille, dontKahou, fils de
Koro-Koro, plus connu sous le nom de Williams, est
aujourd’hui le légitime héritier. Il m’assura qu’elle
nourrissait beaucoup de cochons sauvages, et m’invita
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