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cochons sauvages ; ils en aperçurent trois, mais ils
n’en atteignirent aucun. Pour réussir dans cette
chasse, il faudrait avoir des chiens ou se tenir à l’affût
dès la pointe du jour. Ces animaux sont très-défians
et fort agiles. Je pense d’ailleurs que depuis l’expulsion
des habitans de Kahou-Wera, les naturels des
tribus voisines ont dû leur donner fréquemment la
chasse et en réduire beaucoup le nombre. En effet,
Motou-Doua semble être devenu le rendez-vous des
guerriers qui vont à la baie Shouraki, leur dernier
point de départ.
Vers onze heures du matin, l’Anglais qui m’avait
vendu du bois l’a apporté ; notre maître charpentier
l’a trouvé d’une excellente qualité. Pour trois cents
soixante pieds de koudi, cet homme a reçu trente-
six livres de poudre, qu’il débitera aux naturels à
haut prix. Il m’a indiqué les qualités des bois de la
Nouvelle-Zélande dans l’ordre suivant: 1° Koudi,
supérieur à tous sous tous les rapports, et propre
à faire d’excellentes mâtures ; 2° Tanakea, a le défaut
d’être plus pesant ; 3° Totara, a l’inconvénient
opposé; 4° Poudi-kovea, encore plus lourd que le
tanakea; 6° enfin, le Dimou, qui ressemble pour le
port au mélèze, est le bois le plus pesant de la Nouvelle
Zélande. 11 m’a encore cité plusieurs autres
espèces dont j ’ai oublié les noms. Cet homme m’avait
apporté une tête tatouée après la m o rt, dans l’espoir
de me la vendre ; mais elle était si mal conservée que
je n’en ai pas voulu, et je crois qu’un matelot en a fait
l’acquisilion pour quelques nippes.
D’après une note que j ’avais demandée à M. Williams
et que je reçois à l’instant, il paraîtrait que le
moyen employé par les naturels poui- parvenir à une
conservation aussi étonnante , consiste seulement à
exposer d’abord ces têtes à la chaleur de leurs fours
de terre , après en avoir enlevé la cervelle et avoir mis
en place des pierres chaudes. Quand ils ont fait évaporer
tous les corps gazeux, de manière à ne point entamer
la chair, ils exposent encore les têtes à la chaleur
dusoleil jusqu’à parfaite dessiccation. Convenablement
préparées , elles peuvent ensuite se conserver v ingt,
trente et cinquante années dans le même état, en
ayant soin de ne point les exposer à rhumidité.
M. Williams assure qu’aucune substance étrangère
n’est employée dans ce procédé qui serait ainsi de la
plus grande simplicité.
Les douze à quinze femmes, qui s’étaient établies
à bord presqu’à poste) fixe depuis notre arrivée, s’y
trouvaient encore ce soir, et je pressentis un surcroît
d’embari'as quand il s’agirait de nous en défaire le lendemain
matin au moment d’appareiller. Je crus qu’il
valait mieux en être débarrassé d’avance, et je leur
fis signifier d’embarquer toutes dans une grande pirogue
qui était restée près du navire. Comme on pouvait
s’y attendre, il y eut des larmes répandues, car ces
pauvres créatures s’attachent réellement aux Européens
malgré le peu de jours qu’elles ont à passer avec
eux. Enfin, à six heures du soir, M. Jacquinot
m’annonça que tous les naturels, hommes et femmes
, avaient évacué la corvette, et qu’il n’y restait
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