t H
PAGE 2 2 6 .
Nous étions de retour à bord aussi satisfaits que
liarassés de notre longue exeursion.
Le i5 ma rs, après avoir visité rétablis.sement des missionnaires,
MM. d’Urville, L ottin et moi, accompagnés d eM . W illiams
je u n e , frère du cbef des missionnaires de la N ouvelle-
Zélande, nous remontâmes en canot la rivière de Kawa-Kawa.
Nous vîmes des cultures en très-bon é ta t, des champs de pom mes
de te r re , éizâoueA ou sacrés ( e ’cst-à -d irc q u ’il était sévèrement
défendu de traverser), ce q u i, en nous obligeant à faire
de nombreux dé to u rs, prolongea de beaucoup notre promenade.
Nous eûmes souvent à nous louer de l’obligeance des n a turels
: si nous rencontrions un bras de rivière, ils s’emparaient
aussitôt de n o u s; ils nous p o rta ien t sur le d o s, ou nous p la çaient
a cheval sur leurs épaules, et nos vêtemens restaient emp
reints de la couleur jau n â tre do n t ces Nouveaux-Zélandais sc
peignent le c o rp s. Souvent, à notre ap p ro ch e , on voyait sc
former des groupes de jeunes filles q u i, à demi nues et se te -
n a n t p a r la main , faisaient entendre des chants d’amour et sc
livra ient avec une gaieté charmante à des danses pleines de
grâces et de volupté. Nous parcourûmes avec délices ces
belles forêts qui fu ren t si utiles à Marion. L à , nous apprîmes
quelques détails sur le meurtre de notre malheureux compatrio
te . Il para ît q u ’il a été assassiné p a r les habitans de la baie
d’Oudoudou qui avaient eu tân t à se plaindre de S u rv ille , et
qui vinrent à la baie des Iles p o u r se livre r à cet acte de vengeance.
Les Zélandais qui hab iten t les bords de la rivière
Kawa-Kawa nous appelaient nous-mêmes des Ma rions, ce qui
montre qu’ils n ’ont p o in t oublié le passage et la fin si funeste
de cet habile navigateur. Nous recueillîmes sur les bords marécageux
de 1a rivière plusieurs centaines de jolies coquilles,
toutes de la même espèce, et que les naturalistes connaissent
sous le nom d’Ampullaire aveline.
En visitant avec M. d’Urville le village de P om a re , nous
vîmes que les diverses sculptures qui o rnent les maisons
des naturels ne le cèdent pas en élégance et en perfection à
celles que l’on remarque sur le devant de leurs pirogues.
Nous nous abstiendrons de les décrire, persuadés que, p o u r en
avoir une bonne id é e , il vaut mieux jeter u n co u p -d ’oeil sur
les dessins qui en ont été faits avec soin que d’en lire la d e scription
la plus minutieuse.
( E x tra it du Jo u rn a l de M . Gaimard. )
PAGE 236.
'Tant s’effacent rapidement les traces des peuples
demeurés étrangers aux arts de la civilisation.
Le 1 7 ma rs, nous gravîmes le p â de la trib u de T o u ï. Cette
forteresse, qui venait d’être abandonnée, est placée sur le sommet
d’un rocher très-élevé. Inaccessible du côté de la mer, on
ne peut y arriver du côté de la terre que p a r u n sentier trè s -
é tro it et découvert. Un fossé p ro fo n d , un double ran g de palissades
h a u te s , fortes et serrées, en défendent l’approche et devaient
ren d re ce fort vraiment inexpugnable avant l’in tro d u c tion
des armesà feu. Les maisons qu’on y a construites sont très-
basses et très-nombreuses ; elles co ntenaient, en temps de guerre ,
des armes et des provisions en ab o n d an c e , de manière à p o u voir
soutenir ces longs et mémorables sièges qui ont eu lieu
d’après le récitdesZélandais , et qui devinrent l’occasion de tan t
de faits glorieux que l’on conçoit facilement quan d on connaît
la force physique et la rare intrép id ité de ces braves insulaires.
M a is, p o u r q u ’un peuple obtienne la célébrité q u ’il m é rite , de
belles actions ne suffisent pa s, il lui faut encore un historien
p o u r en consacrer le souvenir.
ri?-’ri
I? A:' -"'‘I'
71
f !
,1 I
il ! I,
I i;
! il r i . k '
ü
i l
i:u