m
1827.
Janvier.
observé sur les collines voisines, à peine distantes de
deux a trois milles. La nature de ces lieux, l’aspect
des torrens et des forêts me rappelait parfaitement divers
sites de la Nouvelle-Guinée près de Dorei, et la
ressemblance surprenante des fougères me frappait de
plus en plus. L’absence presque complète des insectes
me ramenait seule sur les plages de Tavai-Pounamou :
en effet dans toute ma course, je n’en remarquai qu’un
seul de couleur rouge que je ne pus saisir et que je pris
pour un hyménoptère. .le ne compte pas quelques
petites espèces insignifiantes de locustes, criquets et
cicadaires, habitantes des herbes de la plage. Nous
limes, Simonet et moi, une chasse copieuse d’oiseaux,
dont nous rapportâmes plus de quarante individus
de diverses sortes, entre autres une grosse colombe
aux brillans reflets, deux glaucopes à pendeloques
et plusieurs beaux pbilédons à cravate.
.l’avais renvoyé le canot, comptant me rendre facilement
par terre devant la corvette, en suivant la côte.
Mais quand il s’agit du retour, nous n’éprouvâmes
que trop combien les naturels fréquentent peu ces
après rivages. La mer en montant avait recouvert
presque entièrement la bande étroite et rocailleuse que
j avais vue à sec le matin ; il nous fallut cheminer péniblement
au ti'avers des ravins et des monticules escarpés
et hérissés de broussailles qui se succédaient
alternativement. A mi-chemin, nous traversâmes une
pointe avancée en passant sous une voûte naturelle
de plus de cent pas de long qui règne dans toute son
épaisseur : mais le morne suivant nous offrit des dillicultés
inouïes, il fallut le gravir presque à pic , nous
accrochant de notre mieux à de faibles arbrisseaux
ou à de fragiles tiges de fougère, et courant à chaque
instant le risque d’étre précipités sur les pointes tranchantes
des rochers, si ces frêles appuis nous eussent
manqué. Enfin, après des fatigues excessives et de
véritables dangers, nous arrivâmes à la plage de l’observatoire
où nous trouvâmes un canot qui nous porta
à bord de la corvette.
Peu après minuit, la pluie commença à tomber par
torrens et fut ensuite continuelle jusqu’à deux heures
du matin. Au mouillage, nous n’eûmes que de faibles
brises du S. E ., et le plus souvent calme ; mais la mer
s’était soulevée, et même dans notre anse si bien abritée
nous eûmes un peu de houle et un ressac assez considérable
sur tous les points de la côte. J ’en conclus
qu’un coup de vent de sud régnait sans doute en ce
moment hors du détroit, et je m’estimai heureux d’avoir
au moins échappé à celui-ci. Cela me détermina
aussi à remettre notre appareillage au lendemain,
d’aulant plus que M. Jacquinot avait encore une
observation à faire pour conclure la marche des
montres.
Sans doute notre relâche sera trouvée bien courte ;
elle me le paraissait à moi-même. Si je n’eusse consulté
que les voeux des naturalistes dont les collections
s’enrichissaient chaque jour des matériaux les
plus intéressans, si je n’eusse écouté que mon propre
désir, j ’aurais du moins parcouru les plaines du fond
de la haie oïi mes regards se reportaient involon-
.827.
Janvier.