1827.
Février.
des divers chefs de la baie des Ile s , et il me parut fort
au courant des guerres qui divisent les peuples du
nord. Après le repas, il me p ria, me conjura d’aller
mouiller au moins vingt-quatre heures chez lui. Pour
m’y déterminer, il alla jusqu’à m’offrir gratuitement
deux beaux cochons. Je le remerciai poliment, et les
lui fis payer pour le compte de l’équipage. Sa pirogue
contenait plus de vingt de ces animaux : mais comme
nous venions d’en acheter aux naturels de Houa-Houa
tout autant que nous avions pu en loger, personne
ne se présentait pour ceux-ci. Cependant, les compagnons
d’Oroua avaient tant d’envie de s’en défaire,
pour n’être pas obligés de les remporter, qu’ils finirent
par les céder pour des couteaux.
A cette occasion je pus juger combien le caractère du
marin peut devenir exigeant et déraisonnable. Depuis
un moment j’examinais un des maîtres suspendu le
long du navire, et engagé dans une discussion très-
animée avec un naturel, au sujet d’un marché de cochon.
Le maître tenait à la main deux petits couteaux
dont l’un neuf avait bien valu six liard s, et l’autre
n’était qu’une vieille lame ajustée à un morceau de
bois, tout au plus propre à décrotter des souliers. Ln
retour de ces deux objets, le sauvage lui présentait un
cochon de soixante à soixante-dix livres, mais le
maître s’emportait contre lui en invectives dans son
patois provençal qu’heureusement l’autre n’entendait
pas. Surpris de la colère du maître, je lui demandai
s’il n’était pas content de son marché. N o n , commandant,
reprit-il en me montrant un cochon de quatrem
vingt-dix à cent livres, ¿est ce cochon-là que j e demande,
et le coquin ne veut me doniier que l’autre
qui est trop p e tit. P u is , voyant que le naturel ne
voulait point lui livrer le gros cochon, il se retira en
grommelant, et garda ses deux couteaux dont il n’eut
peut-être pas un oeuf par la suite.
Les sauvages se montrèrent plus difficiles au sujet
de leurs nattes, car ils ne voulurent recevoir en
échange que des étoffes ou des couvertures, et ils
avaient bien raison.
A sept heures, Oroua, voyant queje ne voulais point
me rendre à ses supplications, suivit mon conseil et
se mit en route pour rejoindre ses foyers, après
avoir demandé et obtenu quelques feuilles de papier
et des balles, car il ajouta que les habitans de cette
côte étaient exposés à des combats fréquens et meurtriers.
Il m’avait témoigné le désir de passer la nuit
à bord, mais instruit par ce qui m’était arrivé à
l’égard de nos voyageurs de Tera-Witi, et peu jaloux
de m’exposer à emmener et à nourrir une vingtaine de
ces naturels, je m’y refusai positivement et le renvoyai
chez lui. Pour nous, après avoir encore couru
cinq à six milles au N. L. ‘b nous restâmes en
panne, par cinquante et soixante brasses, fond de
vase.
Dès que le jour vint nous montrer la côte, nous
reconnûmes que nous étions à huit à neuf milles au
large de la baie de Toko-Malou, et nous profitâmes
d’une petite brise d’O. N. O. et d’O. S. O. poumons
avancer vers le cap Est on Waï-Apou.
TOME I I . 8
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Février.
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