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 1827. 
 Janvier. 
 in. XL. 
 inellrc  toute  la  liane  au  vent,  el  carguer  toutes  les  
 voiles  de  l’ari’ière alin de  rallier la côte de  droite à  la  
 toucher pour  ainsi dire,  comme  cela était nécessaire.  
 La corvette n’obéit point,  et, maîtrisée par le courant,  
 elle  ne  put éviter d’être  emportée  sur  les  roches qui  
 terminaient les récifs et sur lesquelles je savais qu’il ne  
 se trouvait que dix à douze pieds d’eau.  Bientôt  l’A s trolabe  
 touche  deux  fois ;  le  premier  choc fut  léger,  
 mais la seconde fois un craquement lugubre et général  
 accompagné  d’une  secousse  prolongée,  d’une  pause  
 sensible dans la marche  de  la  corvette  et d’une forte  
 inclinaison  sur bâbord ,  pouvait justement  faire  redouter  
 qu’elle ne restât sur la roche et ne s’y défonçât.  
 L’équipage,  en ce moment,  poussa  involontairement  
 un cri d’épouvante.  Ce n’est rien, nous sommes parés,  
 m’écriai-je  à  haute  voix  pour  le  rassurer.  En  effet,  
 le courant, continuant d’entraîner le navire, l’empêcha  
 de rester sur  la roche fatale ;  en outre,  la  brise se rétablit, 
   nous  pûmes  gouverner,  et  bientôt  libres  de  
 toutes  craintes  nous  voguâmes  à  pleines  voiles dans  
 les eaux  paisibles de  la  baie  de  l’Amirauté.  Nous  en  
 fûmes  quittes pour quelques  fragmens  de  la  contre-  
 quille que le choc détacha,  et  qui vinrent flotter dans  
 le  remoux du navire. 
 Tout entier  à  la  manoeuvre  du moment,  il  ne me  
 fut pas possible de m’occuper de ce qui  se  passait autour  
 de moi.  Mais  ceux  de mes  compagnons  qui  pu-  
 rent y prêter plus d’attention m’ont assuré  que  ce  fut  
 alors un spectacle bien imposant  que de voir l’Astrolabe  
 , d’abord inclinée comme prête à  s’engloutir dans 
 les  tourbillons  qui  l’entouraient,  se  relever  ensuite  
 avec grâce  et  s’avancer noblement au milieu  des eaux  
 devenues plus paisibles. 
 Pour consacrer  le souvenir  du passage  de  t  Astrolabe, 
   je  laissai  à  ce  dangereux  détroit  le  nom  de  
 Passe des Français  : mais,  à moins d’un cas  urgent, je  
 ne  conseillerais  à  personne  de  le  tenter,  encore  faudrait 
 il  avoir  une  brise  bien  établie  et  presque  sous  
 vergue.  Du reste,  les cartes et les plans que M. Guilbert  
 a levés et dressés de toute cette  partie  du détroit  
 en  faciliteront  considérablement  la navigation  à ceux  
 qui nous suivront dans les mêmes lieux. 
 A  neuf heures,  nous  mîmes  en  panne  pour  faire  
 une station,  par  trente  et  une  brasses,  vase  molle;  
 nous  embarquâmes  et  saisîmes  à  poste  tous  nos  canots. 
   Alors  nous  contemplâmes  tout  à  notre  aise  le  
 beau bassin  oû nous nous trouvions.  Il mérite certainement  
 tous les  éloges  que Gook  en  a  faits,  et je  recommanderais  
 surtout un joli petit liâvre ,  à quelques  
 milles  au sud  de  l’endroit  oû  mouilla  ce  capitaine.  
 Protégé par une pointe avancée (Pointe Bonne) contre  
 les houles et les vents  du n o rd ,  il doit offrir un excellent  
 abri pour tous les vents.  Je regrettai sincèrement  
 que  le  temps  qui me  pressait  ne  me  permit  point  de  
 lui consacrer quelques jours,  d’autant plus qu’un  village  
 de  naturels  situé  précisément  en  face  me  promettait  
 une  nouvelle  scène  d’observations  intéressantes. 
   , 
 Notre  navigation par  la  passe  des  Français  venait  
 d’établir positivement  l’existence  comme  île  de toute 
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