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Médecins.
Shongui fit un voyage à Moudi-Wenoua , et s’avança
jusqu’à la caverne des Esprits, près du rocher Reinga.
Après cette espèce de pèlerinage, sa réputation comme
prêtre et prophète acquit un nouveau lustre, et Touai
m’assura qu’il avait institué de nouvelles cérémonies
jusqu’alors Inconnues à ces peuples. Le fait est très-
croyable, et peut expliquer jusqu’à quel point les rites
et les opinions religieuses peuvent varier dans ces îles,
même chez des tribus voisines.
Les fonctions des prêtres sont héréditaires ' ; les
pères sont chargés d’enseigner à leurs enfans les cérémonies
et les fonctions de leur ministère. Touai me
disait un jour que Touao, son cousin, avait hérité de
son père le titre d’Ariki, mais qu’il était loin d’avoir
ses connaissances et son influence.
Par suite de la vénération qu’ils ont pour les divinités
de toutes les nations, aux yeux des Zélandais tout
bomme qui a des rapports avec Dieu devient pour
eux un être inviolable , quelle que soit d’ailleurs sa
religion. C’est à ce titre qu’ils ont toujours respecté la
personne des missionnaires, même dans les momens
où leur colèré et leur fureur, parvenues au plus haut
degré d’exaspération, semblaient disposer ces sauvages
aux derniers excès.
Comme dans presque toutes les peuplades encore
dans l’enfance de la civilisation, là les prêtres unissent
à leurs fonctions particulières celles de médecin.
Dès qu’une personne tombe dangereusement malade,
le prêtre médecin est appelé et ne quitte plus son malade
qu’il ne soit guéri ou enterré. Ses moyens curatifs
se bornent le plus souvent à des prières à l’Atoua,
à des jongleries de diverses natures , surtout à faire
observer rigoureusement les préceptes du tapou '.
Cependant ils prescrivent souvent une diète absolue
qui peut être quelquefois salutaire au patient,
mais qui en d’autres occasions suffit pour le tuer. Les
fièvres chroniques sont fréquentes dans ces pays ; les
naturels n’ont aucune idée ni de leurs causes ni de
leurs effets 2, et ils les attribuent simplement aux ravages
d’un feu intérieur. Pour l’éteindre, ils laissent
le patient exposé à toute la rigueur de la saison et lui
font prendre de l’eau froide 3, ce qui ne tarde pas à
aggraver son mal.
Les médecins sont responsables de ce qui peut arriver
au malade. Quand celui-ci appartient au premier
rang de la trib u , cette responsabilité devient très-sérieuse,
s’il vient à mourir. Alors un conseil est chargé
d’examiner la conduite du médecin; on passe en revue
les moindres circonstances de la maladie, e t , si l’on
venait à découvrir que le médecin, par ignorance ou
par malveillance, eût manqué à quelques-unes des
lois du tapou, il serait exposé à un châtiment sévère.
Dans ce dernier cas, il courrait fort le risque de payer
sa faute de sa tête, et pourrait bien être sacrifié à l’esprit
du défunt, pour apaiser son ressentiment 4.