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Gonverilon des
Normans.
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1 habit monaftique. Car c’étoit l’ufage, que quand on
prenoit un fècu ier pour abbé, il commençoit par
îè faire moine. Il fut élû par la communauté , &
beni folemnellement par le pape Jean X . Alors il
exhorta les freres à quitter la petite ville deTéano,
& palier à Capouë, qui étoit la capitale du pais, &;
la refidence des princes. Ils y vinrent en effet, &
l’abbé Jean par le fecours defes parens & de les amis,
y bâtit de fond en comble un monaflere en l’honneur
de faint Benoît, avec une grande & belle églife,
& tous les lieux réguliers, & y aiïèmbla plus de cinquante
moines.
Hervé archevêque de Reims confulta le pape Jean
fur divers cas de penitence, à l’occafion de la con-
verfion des Normans. Car après avoir ravagé la
France, environ foixante & dix ans, ils s’y établirent
enfin, & embrafferent le chriftianifme. Le roi Charles
le Ample voyant, que loin de les chafTer,il ne pou-
voit même leur refifter ; refolut par le confeil des
feigneurs , de traiter avec eux. Pour cet effet il envoya
quérir Francon archevêque de Roüen, car ils
étoient en pofTeifion de cette ville , & du pais d’alentour
; & le chargea de demander à Rollon leur
chef une trêve de trois mois , qu’il accorda. Mais
quand elle fut expirée, les François excitez par Richard
duc de Bourgogne , &; par Elbes comte de
Poitiers, recommencèrent la guerre. De quoi Rollon
irrité recommença auffi fes ravages, & courut juf-
ques en Bourgogne ; toutefois il rcfpeéla le monaf-
tere de fàint Benoît fur Loire. Au retour il affiegea
Chartres, dont l’évêque Antelme fecourti par les
François
LIVRE CtHQUANTE-QyATRIE’MÉ; ¿65
François & les Bourguignons, fortit au milieu des
efcadrons armez, revêtu comme pour dire la meffe,
& portant à fes mains la croix &i la tunique , ou
chemife de là fainte Vierge. Les Normans furent
repouffez , 8c on l’attribua à la vertu de cette relique.
Enfin les François ennuyez de voir leur pays ruine,
obligèrent le roi Charles d'envoyer encore à
Rollon l’archevêque Francon, qui lui dit : Grand
prince voulez-vous toute votre vie faire la guerre ?
ne fongez-vous point que vous êtes mortel, 6equ’il
y a un Dieu qui vous jugera après la mort î Si vous
voulez vous faire Chrétien, vous pouvez avoir la
paix, le roi Charles vous cedera toute cette côte de
m e r , que Hafling 5c vous avez defolée , & pour affermir
l’amitié,il vous donnerafafille Gifle en mariage.
Rollon confulta les premiers d’entre les Normans,
qui furent d’avis d’accepter les conditions, 8c
on convint d’une fécondé treve de trois mois, pendant
laquelle le roi 8c lui fe verroient pour conclure
le traité.
L’entrevûé fe fit à S. C la ir, fur la riviere d’Epte, 8c
Robert duc des François, qui s’étoitoffert pour être
parrain de Rollon,s’y trouva avec le roi. Le traité fut
conclu , le roi céda à Rollon tout le pais, nommé
depuis Normandie, en plein fief de la couronne,8C
la Bretagne en arriere-fief ; lui donna fa fille en
mariage -, 8c Rollon promit de fe faire Chrétien,
& de vivre en paix avec lesFrançois. En effet l’archevêque
Francon l’ayant inftruit, le baptifa l’an 9 1 1.
le duc Robert le leva des fonds, lui donna fon nom,
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