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^48 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
Bafile : Votre fils Léon veut vous ôter la vie : fi vous
88*' en doutez, faites-lui quitter fes brodequins. Comme
ils furent forcis enfemble à l’ordinaire, l’empereur
feignit d’avoir befoin d’un couteau, &: le demanda
avec grand emprelfement. Léon , qui ne fe doutoit
de rie n , tira le fien ; & Bafile le tenant pour convaincu
, le fit mettre en prifon , lui ôta les brodequins
rouges, qui étoient la marque de la dignité
impériale -, Sc Santaba’ren l’e'xcitoit à lui faire crever
l e s yeux. Photius & le fenat l ’en empêchèrent : mais
Léon demeura en prifon, nonobftant les fréquentes
follicitations du fenat.
U n jour que l’empereür donnoit à quelques-uns
d’entr’eux un feftin folemnel, un perroquet qui étoit
en cage dans la fale, répéta plufieurs fo is, à fon ordinaire
: Aïe aïe, -feigneur Léon. Les affiftans en fu rent
fi touchez, qu’ils ne pouvoient m anger;
l’empereur leur en aïant demandé la caufo, ils repondirent
: Cet animal fans raifo n , nous reproche
notre peu d’affeétion pour le prince. S’il eft coup
ab le, nous ferons les premiers à le punir:-s’il eft
in n o cen t, jufques a quand laifferez-vous prévaloir
la calomnie ? L’empereur attendri par ce difcours ,
dit qu’il y penferoit ; & peu de temps après, écoutan
t les fentimens de la n atu re, il tira fon fils de
prifon , le fie venir devant lu i, & le rétablit dans fa
dignité." L’empereur Bafile ne fürvëcut pas longtem
ps, & m ourut le premier jour de Mars 88 6. aïant
i.u régné un an avec Michel fon predeceffeur, & feul
dix-huit-ans & dem i. Il eut grand foin de l’ornement
,77. des églifes ; & on en compte jufques à quarante-deux
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qu’il fit bâtir ou reparer à C . P. ôc aux environs ; en- ■
tre lefquclles eft celle qu’il fit de neuf, en l’honneur
de J. C. de l’ange Gabriel, & du prophète Elie, de
la Vierge, & de faint Nicolas. Le toit étoit de cinq
dômes couverts de cuivre , les murailles en dedans
revêtues de marbre : les tables d’au tel, & les baluf-
tres d’argent do ré, le pavé de marbre de pièces de
rapport. Dans la cour devant la principale porte au
couchant, étoient deux fontaines de pierres exqui-
fes &c magnifiquement ornées : à la porte du fepten-
trion étoit une galerie couverte, dont le plafond
étoit orné de peintdres de martyrs : au m id i, entre
l’églife & le palais, étoit une grande place , ou l’em pereur
joüoit à la paulme à cheval : derrière l’églife
étoit un jardin. Ainfi on gardoit encore l’ancien ufa-
ge de mettre de grands efpaees entre les églifes & les
bâtimens profanes. O n peut prendre une idée des
peintures de ce tem ps-là, par un manuferit de faint
Grégoire de N azianze, que l’on garde à la bibliothèque
du roi.
Je ne fçai fi on ne regardoit po in t, comme des
effets du zele de Bafile pour la religion , les cruau-
tez contre les infidèles : car l’empereur C onftantin
fon petit fils, qui a écrit fa vie, ou plutôt fon éloge,
remarque qu’aïant pris plufieurs Mufulmans de Pille
de C rete, il leur fit fouffrir divers fupplices. Il y en
eut qu’il fit écorcher entièrement , principalement
'des renegats : difant , qu’il ne leur ôtoit que le batê-
m e, auquel ils avoient renoncé. .A d'autres-il -faifoit
feulement enlever des lanieres de la peau , depuis la
tête jufques aux talons. Il en faifoit élever d’autres
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