
jo8 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
au roi : Si vous ne confentez pas à l’ordination d’O-
^ I* dacre, je tiendrai pour certain, que vous ne voulez
« s- pas me rendre le refped qui m’eft dû, ni conferver
mes droits ; mais refifter en tout à ma volonté. Contre
mon éga l, j’emploïeroistout mon pouvoir , pour
maintenir ma dignité : mais je dois méprifer un fujet
qui veut la déprimer. Il n’en fera point autrement
de cette affaire, jufques à ce que j’en aïe informé le
roi mon frere & les rois mes couiîns, pour aifem-
bler tous les évêques de nos roïaumes , qui prononceront
conformément à notre dignité. Enfin, s’il eft
neceifaire, nous ferons encore d’ailleurs ce qui fera
raiionnable.
La réponfe d’Hincmar fut à proportion plus vi-
goureufe. Sur le manque de refpeét & la défobéïf-
fance, il donne un démenti au fecretaire qui a écrit
la lettre ; fur le mépris quelle témoigne de lu i , il
releve la puiflance fpirituelle, & dit : Ce n’eft pas
vous qui m’avez choifi pour gouverner l'églife ;
mais c’eft moi qui avec mes collègues & les autres
fideles vous ai élû , pour gouverner le roïaume, à
condition dobferver les loix. Nous ne craignons
point de rendre raifon de notre conduite devant les
évêques, parce que nous n’avons rien fait, que fui-
vant les canons. Afais fi vous ne changez ce que
vous avez mal fait, Dieu le redreffera quand il lui
plaira. L’empereur Louis n’a pas tant vécu que fon
pere Charles : votre aïeul Charles n’a pas'tant vécu
que fon pere , ni votre pere autant que le fien. Et
quand vous êtes à Compiegne à leur place baiifez
les yeux, voiez où eft votre pere & demandez où
L i v r e c i n q i i a n t e - t r o i s i e ’ m e . s ° 9 _
eft enterré votre aïeul S & ne vous élevez pas devant
celui qui eft mort pour vous & reiTufcite, & ne meurt
plus. Vous paierez promptement, mais leghle avec
fes pafteurs fous 1 1 leur chef> fubfiftera éternellement
fuivant fa promeife. Cette menace d Huicmar
pouvoit paroître une prophétie , quand on vit c.e
jeune roi Louis mourir 1 annee fuivante.
Il continue : Quant à ce qui fu it, que; s’il çft ne-
ceifaire vous ferez d’ailleursce qui fera raifonnahle,
je vois bien que c’eft pour m’intimider. Mais vous
n’avez de puiffance, que celle qui vous eft donnée
d’en haut ;& Dieu veuille, foit par vous , foit par j„.
qui il lui plaira, me tirer de cette pnfon, je veux dire,
de ce corps vieux & infirme, pourm’appeller a lu i, que
. je defire voir de tout mon coeur : non poür mesuroe«-
lite s , je n’ai mérité que xlu mal : mais par fa miferi-
corde & fa grâce gratuite. Que fi j’ai peche en consentant
à votre éledion, contre la volonté & k s menaces
de plüfieurs : je prie Dieu que vous .m en pu-
niffiez en cette vie, afin de ne l’être pas dans l’autre.
Et puifque vous avez tant à coeur l’éleéhon
d’Odacre, mandez moi le temps auquel les évêques
de la province de Rheims, avec ceux qui vous ont
été députez par le concile dç Eifmes , fe pourront
affembler. Je m’y ferai, porter , fi je fuis encore: en
vie. Faites-y venir Odacre, avec ceux qui lont élu ,
foit du palais, foit de l’églife de Beauvais ; venez-y_,
fi vous l’avez agréable, ou y cnvoïcz des epmmif-
faires j & l’on verra fi Odacre ;,eft entré dansJai beE-
geric par la porte. Mais qu’ i f Crache, que s’il ne vient,
nous l'irons chercher , quelque part qu’il foit dans la
S f f iij