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n. 19.
4 .1/bâ. ap. Sur. Çit.Nov.
Martyr. R. x.
¿sov.
11V.
Défôlation du
jmonaftere de
Croyland.
in gulf. p ’.%66.
318 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
dont lés plus fameux étoient Unguar & Hubba. Le
bruit de leur cruauté s’étant répandu par tout, Ebba
abbeife de Collingham aifembla fes religieufes en
chapitre, & leur dit : Si vous voulez me croire, je
fçai un moien pour nous mettre a couver de l’info-
lence de ces barbares. Elles promirent de lui obéir ;
ôc 1 abbeffe prenant un rafoir, fe coupa le nez & la
levre d enhauc jufqu aux dents. Toutes les religieufes
en firent autant'. & les Normands, qui vinrent le
lendema.11>., votant ces filles il hideufes, en eurent horreur
, ôc fe; retirèrent promptement : mais ils brûlèrent
le monailerc & les religieufes dedans.
En cette, meme irruption , les Normans détruifi-
rent les aunes monafterçs fameux decette côte. Celui
de Liqdisfarne , ou etoit un fiége épifcopal, comme
il a été dit : celui de Thynemouth, ceux de Jarou ôc
de Viremouth , que Bede a rendus fi célébrés : celui
de Streticshal de filles ; ôc celui d’E li, dont ils tue-
lent toutes les religieuies. Epfin Edmon roi d’Eftan-
gle aiant ete pris par lçs barbares, fut attaché à un
arbre, perce de fleçhes ôc décapité le vingtième de
Novembre, jour auquel l’eglife l’honore comme
martyr,
L ’abbé Théodore gouvernoit depuis foixante ôc
deux ans le monailerc de Croyland dar^s le roïaume
des Merçiens. Aiant appris la défaite des troupes qui
s ecoient aifemblees, pour défendre le pais contre les
Normands : il retint avec lui les moines les plus vieux
ôc les enfans , qu’on élevoit dans le monailere, eroïant
que les barbares en auroient pitié ; & ordonna aux
plus vigoureux, d’emporter avec eux.les reliques,
L i v r e c i n q u a n t e -v n 1 e’ m e . 319
fçavoir le corps de faint Guthlac : fa difeipline & fon f*
pfautier : avec les principaux joïaux & les titres du N'
monailere ; & fe cacher dans les maràis voifins, attendant
l’évenement de la guerre. Ils furent trente ,
dont dix étoient prêtres, qui fe retirèrent ainfi, aïant
chargé fur un bateau ce qui vient d’être die. Quant
aux vafes facrez , ils les jetterent dans la fontaine du
monailere : avec la table du grand autel, revêtue de
lames d’o r, que le roi Vitlaf leur avoit donnée. Les
trente étant partis, fe retirèrent dans un bois voifin,
où ils demeurèrent quatre jours.
Cependant l’abbé Théodore & ceux qui étoient
demeurez avec lui fe revêtirent des habits facrez ,
vinrent au choeur, chantèrent les heures, puis tout
le pfeautier. L ’abbé célébra la grande meife ; ôc lorf-
que lui ôc ceux qui le fervoient à l’autel eurent communié,
les barbares fe jetterent dans l’églife. Un de
leurs rois nommé Osketul, tua de fa main l’abbé
fur l’autel, d'autres coupèrent la tête à fes mimf-
tres : les enfans & les vieillards qui fuïoient hors
du choeur , furent pris & tourmentez cruellement
pour leur faire découvrir les trefors de l’églife. Tugar
âgé de dix ans, voïant tuer le foupneur devant
fes yeux dans le refeêtoire, prioit inftamment qu’on
le fiifc mourir avec lui. Mais un comte Normand
nommé Sidroc eut pitié de cet enfant, qui étoit
très-bien fait, & lui aïant ôté fâ cuculle , lui donna
un manteau Danois, ôc lui dit de le fuivte fans le
quitter ; ainfi il fut feul confervé de ce mafTacrc.
Les Normands aïant tué tous les moines, fans trouver
les trefors qu’ils eherchoient, briferent tous les