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qui ont conquis ce païs, & le gardent depuis tant
d’années, fe font fournis volontairement à la pro-
tedbion & au gouvernement du faint fiége. Enfin le
pape Nicolas y a envoie quelques-uns de nous , qui
fournies ic i, & les évêques Paul, Dominique, Léopard,
Formofe Se Grimoalde , qui y eft encore avec
plufieurs de nos prêtres , comme les Bulgares viennent
d’avoüer devant’ nous. Nous y avons confa-
cré des églifes, ordonné des prêtres, inftruit plu-
iîeurs fideles avec de grands travaux : ainfî l’églife
Romaine en étant en poifellion depuis plus de trois
ans, elle n’en doit pas être dépoüillée à l’infçû du
pape.
Les légats d’Orient dirent : Duquel de ces droits
voulez-vous maintenant ufer ? Les légats du pape
répondirent : Le faint iiége ne vous a point choifis
pour juges de fa caufe, vous qui êtes fes inférieurs :
lui feul a droit de juger toute î ’églife ; c’eft pourquoi
nous refervons à fon jugement cette affaire, dont il
ne nous a point chargé. Quant à votre avis, il le
méprife auiïî facilement, que vous le donnez lege-
rement. Les légats .d’Orient dire : Il n’eft pas convenable
que vous, qui avez quitté l’empire des Grecs,
pour faire alliance avec les Francs, conferviez quelque
jurifdiétion dans l’empire de notre prince. C ’eft
pourquoi nous jugeons que le païs des Bulgares, qui
a été autrefois fous la puiffance des Grecs & a eu des
prêtres Grecs, doit revenir maintenant par le chri-
ftianiime à l’églife de C. P. dont il s’étoit fouftrait
par le paganifme.
Les légats du pape fe recrierent & dirent : Nous
caftons
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caftons abfolument & déclarons n u lle , jufques au —“ ----------
jugement du faint iîége, cette fentence que vous 87 ° '
avez prononcée avec précipitation, fans être choifis
ni reconnus pour juges, par préfomption, par faveur,
ou par quelque autre motif que ce foit. Et nous
vous conjurons vous, Ignace, conformément à cette
lettre du pape Adrien, que nous vous prefentons,
de ne vous point mêler de la conduite des Bulgares,
&c de n’y envoïer perfonne des vôtres : afin que vous
ne faffiez pas perdre les droits au faint fiége qui vous
a rendu les vôtres : & que fi vous croïez avoir quelque
jufte fujet de plainte, vous le reprefentiez dans
- les formes à l’églife Romaine votre proteétrice. Le
patriarche Ignace reçut la lettre du pape, mais il remit
à la lire une autrefois, malgré les inftances des
légats du pape ; & répondit : Dieu me garde de m’engager
dans ces prétentions, contre l’honneur du faint
fiége : je ne fuis ni allez jeune pour me laifter fur-
prendre, ni aftez vieux pour radoter, & faire ce que
je dois reprendre dans les autres. Ainfi finit cette con- ¿»«ji. tnf.
ference. »**./.? 71. d .
L ’empereur Bafile y affifta, & on n’y laiffa entrer
que ceux que lui & le patriarche Ignace voulurent.
Les légats d’O rient, ni les ambaftadeurs Bulgares
n’entendoient point ce que difoient les Romains,
& les Romains ni les Bulgares n’entendoient point
ce que difoient les Orientaux. Il n’y avoit qu’un feul
interprète de l’empereur, qui n’ofoit rapporter les
difcours des Orientaux ou des Romains, autrement
que fon maître lui commandoit, pour perfuadcr ce
qu’il vouloitaux Bulgares ; Sconleur donna un écrit
Tome X I . Q_q