I 2 M É M O I R E S U R L E S P L A N T E S
beaucoup de soins. On moi s sonne le blé en awi l et au c omme n c eme n t de mai :
ia terre reste s ouv ent ensui te dépoui l l é e , et el le est ge r c é e par le solei l .
L a plupar t des cul tures d'hiver sont suivies de la cul tur e des plantes d ' é t é ,
qui ne mi jrissent qu'à l'aide d'ar rosemens art i f iciels ; cel les-ci s o n t , le blé de
T u r q u i e ou maïs , le s o r gh o ou grand mi l l e t , le bamyd,, d o n t le fruit ver t se
mange b o u i l l i , et le sésame , d o n t la graine sert à faire de l 'hui le. Le riz , la
canne à suc r e , la c o l o c a s e , le c o t o n et l ' indigo, ont be soin d'ar rosemens pendant
tout le cour s de l'été. Le N i l . c omme n ç a n t à croî t re à la fm de juin , obl ige
les cul t ivateur s à r é c o l t e r sur les terres basses les plantes qui y ont été semées
le plus r é c emment . En e f f e t , ces terres , plantées ordina i r ement de b e a u c o u p de
melons et de pa s t è que s , sont les dernières que le Ni l a a b a n d o n n é e s , et elles
se t r ouv ent les premières submergées au r e tour de l ' inondat ion.
Les t ravaux de l 'agr icul ture ne sont pas suivis dans un ordr e uni forme par
toute l 'Egypt e : out r e la di f f e r enc e de t empé r a tur e de la haute et de la basse
E g y p t e , qui r end la première plus h â t i v e , les cul tures var ient suivant les pr o -
vinces. Le r i z appar t ient pr e sque e x c lus i v ement au De l t a ; le sucre n'est ext rai t
de la canne que dans la haute Ég y p t e ; le dourah ou s o r gh o r empl a c e le blé audessus
de T h è b e s ; et le t r è f l e , si a b o n d amme n t cul t ivé dans t out le n o r d de
l ' E g y p t e , cesse de l'être dans le S a ' y d , au midi de F a r c h y o u t ; les v i g n e s , les
o l i v e s , les ros e s , c ont r ibuent à la r ichesse du F a y o um : d'autres provinc e s t i rent
leur pr inc ipal r e v enu de la r é c o l t e des d a t t e s , des herbes p o t a g è r e s , des plantes
légumineuses , du henné ou de l ' indigo.
I . "
Dis Céréales graminées.
O n dest ine à être semées en blé les terres qui vi ennent d'être i n o n d é e s , ou
celles qui , n'ayant po int été i n o n d é e s , se t r ouv ent c ependant pénét rées par
l'humidité de la saison et par les filtrations du Ni l . Un c h amp r e çoi t ordinai -
rement deux l abour s ; le p r emi e r , p o u r préparer la t e r r e , et le s e c o n d , p o u r
enfouir la s emenc e . La char rue Ég ) p t i e n n e est t r è s - s impl e, et n'a po int de
roues ( i ) ; el le t race des si l lons peu profonds . Un t r onc de p a lmi e r , lié en travers
et traîné par boeu f s , supplée au roul e au ou à la herse. Lor squ' i l arrive que le
N i l , après de grandes inond a t i ons , tarde t r op à se ret i rer , on sème les terres sans
les labour e r . Le s anciens Ég ypt i ens j e toi cnt le grain à la sur face du l imo n , et le
faisoient enf onc e r sous les pieds des pour c e aux (z). La c o u t ume de semer sans
labour est néces s i tée par la durée de l ' inondat ion. Da n s une saison a v a n c é e ,
le blé ne prof i t e roi t p o i n t ; il pous seroi t tout en herbe. Le grain, semé d' abor d
sans l a b o u r , est r e c ouv e r t ensui te en l a b o u r a n t , si la terre est assez sèche , ou
C U L T I V E E S EN E G Y P T E .
en traînant un fagot de branche s d'arbres ou de buissons à travers la plaine ^
si la terre est mo l l e et res semble à de la boue . C e t t e dernière mé t h o d e est plus
ordinaire, lor squ'on sème de l 'orge ou du t rèf le, que lor squ'on sème du blé.
Non-seulement les terres que l 'on cul t ive en blé n'ont pas toujour s été inondé e s ,
mais il y a îles champs que l 'on est obl ige d'arroser quand le grain est levé. J'ai
vu cul t iver du blé par irrigat ion dans l'île de Ro u d a i i , dans les plaines de Bi r k e t -
el-Hâggy, et dans plusieurs endroi t s de la haute Ég ypt e .
L e blé barbu , à épis lisses, est c o n n u des Égypt i ens sous le n om de y W i
sofeyry, n om qui me paroî t signifier blé j aune , pa r c e que l'épi se do r e lorsqu'il per d
en mûrissant la poussière glauque qui a d'abord c o u v e r t ses balles. Le s épis s ont , ou
linéaires et a l ong e s , ou lus i formes et mé d i o c r eme nt longs. Le bl é qui a les épis
les plus longs , est désigné par les n oms de y W i sofeyry wueyly: et celui qui a ses épis
plus cour t s , est s impl ement n ommé qamh cha'yry, mo t qui signifie blé à épis d'orge .
C e blé a été indiqué par For skal (t) c omme variété de l 'épcaut re o u Trhicum Spelia
LINN. O n v o i t fréquemment du blé dont les épis sont rougeât res ou enf umé s , et
que les gens de la c ampa gne n omme n t qumh ahnar, blé r oug e .
¡1 y a en Ég ) p t e b e a u c o u p de blé à épis v e lus ; mais on n'observe pas que ce
caractère soi t cons tant dans les même s espèces : plusieurs variétés sont intermédiaires.
Le blé que les Ég ypt i ens n omme n t qamh meg/tuyi, a les épis c our t s , velus
et d'une f o rme py ramidal e. Ses épillets sont presque ho r i z ont a l ement c ouché s
en dehor s du rachis. Ils se dépoui l l ent que lque foi s plus ou moins de leur d u v e t ,
en sorte que le blé a p p e l é ^ W i imygeli ne diff'ère du ¡¡amh megimyi que pa r c e
qu'il n'a po int les épis velus. De u x variétés de blé à épis velus sont di s t ingué e s ,
l'une par la f o rme a long é e des é p i s , et l'autre par la gros seur qu'acquièrent les
épis plus cour t s : la première de ces variétés est appelée qaml, slbaqih , et la s e c onde
Ijamh a'raby. T o u t e s deux se r appor t ent au Trhicum lurgidum de Li n né .
Il n'y a en Ég y p t e que du blé barbu. S o n c h a ume s'élève un peu moins que
celui du même blé cul t ivé en Franc e . Le s variétés n ommé e s qamh mcghayi, rjamh
7iaygih, Trincum saùvittnpyramydak (2) , et qamh a'riiby, Triiiciim stitirum itirgïdum
( 3 ) , sont inconnue s en Fr anc e . -
L e b l é , lorsqu'il n'est p o int enc o r e r é c o l t é , est di s t ingué dans les campagne s
par les noms arabes que j'ai cités ; mais lor sque le grain est appor t é dans les ma r c h é s ,
on le désigne par sa qual i té , ou par le n om de la p r o v i n c e d'oi i il vient . Il y a,
dans les ma r ché s , du blé appelé qamh ahnar, blé r o u g e , pa r c e que son grai n
est c o r n é , un peu r o u g e , et t ransparent à l ' intérieur. Le bl é du Sa'yd a le grain
plus alongé que celui qu'on r é col t e dans les prov inc e s de C h a r q y e h et de Ba h j reh.
Quoique ces grains di f fèrent j i e u , les liabitans assurent que celui du Sa'yd qui
seroit semé dans la basse Ég y p t e , n'y réussiroi t point .
O n peut at t endr e sans r i sques , pour moi s sonne r le b l é , que le c h a ume et l'épi
soient secs. On ne r e d o u t e ni les vent s ni les pluies q u i , dans d'autres p a y s .
(0 VD^'cz la charrue représentée JJ/J/JCAM Viii et i
ArtsetMéner.,£./ï/,
{2) Hérodote, /¿i-. //, chap. ti. (j) FIcrj ^g^piiacô-Arahicj, pag. i^fi.
(a) Voyii H. N. Botaiiiijue,/)/. 14,
(î) Ko/f^ H. N. Botanique, pl. fig. ;