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ii.
Utilité des uni'
vcrfitez.
verfitez d’études, pour montrer qu’ellesles renfermoient toutes, & qu’en
une même ville on enfeignoit tous les arts libéraux & toutes les fciences,
qu’il falloit auparavant aller apprendre en divers lieux.
Cette inftitution fut très-utile à l'églife. Lesdoâeurs aflurez de trouver
dans une certaine ville de l’occupation avec la récompenfe de leurs
travaux, venoient volontiers s’y établir ; & les étudians aflûrer auffi d’y
trouver de bons maîtres avec toutes les commodittz de la v ie, s’y ren-
doient en foule de toutes parts, même dés païs éloignez : ainfi on ve-
noit à Paris d’Angleterre , d'Allemagne & de tout le Nort , d’Italie!,'
d’Efpagne. L ’émulation faifoit étudier à l’envi les maîtres & les dif-
ciples, & le plus grand bien, c’eft que la doéirine fe confervoit mieux
dans fa pureté: puifqu’entreplufieurs doâeurs enfeignant à la vûë les
uns des autres la moindre nouveauté étoit bien-tôt relevée. On confervoit
aufïi plus facilement l’uniformité, foit pour le fonds de la doctrine
, foit pour la maniéré d’enleigner. Tant d’écoliers de divers païs y
répandoient ce qu’ils avoient puifé dans les mêmes fources; & devenus
martres à leur tour enfeignoient chacun chez eux ce qu’ils avoient appris
à Paris .
La police des univerfitez étoit un bon moïcn pour affermir la tradition
de la faine doârine. Il ne dépendoit plus comme auparavant de
chaque particulier d’enfeigner quand il s’en croïoit capable : il falloit
être reçu maître èsarts ou doâeur dans les facultez luperieures; &
ces titres ne s’accordoient que par dégrez après des examens rigoureux
& de langues épreuves ; pour répondre au public de la capacité des
maîtres. ToutJe corps en étoit garand, &a vo it droit de corriger celui
I.txxvrr. d’entr’eux qui s’écartoit de fon devoir. Suivant le règlement donné en
12 15 . parle cardinal légat Robert deCourçon, pour enfeigner les arts
à Paris il falloit être âgé de vingt-un an.&les avoir étudiée au moins fix
ans: pour enfeigner la théologie il falloit la vo ir étudiée huit ans& en
avoir trente-cinq.
Les freres Prêcheurs aïant été agregez à l’univerfité de Paris dès lé
commencement de leur inflitut , obfervoient l’ordre fuivant pour la
promotion de leurs doâeurs en théologie. Celui qui étoit nommé
bachelier par le général de l’ordre ou par le chapitre commençoit par
expliquer la matière des fentences dans l’école de quelque d o â eu r , ce
qu’il faifoit pendant une année: à la fin de laquelle le prieur duconvent
avec les doâeurs qui profeifoient aétuellement, prefentoit ce bachelier
au chancelier de l’églife de Paris; & ils affûroient avec ferment qu’ils
le jugeoient digne d’obtenir la licence, c’eft-à-dire, la permiffion d’enfeigner
comme docteur. Après quelques examens publics & quelques autres
formalitez le bachelier étoit reçû doâeur & continuoit la fécondé
année d’expliquer le livre des fentences dans fon école : car chaque docteur
avoit la fienne. Latroifiéme année le nouveau doâeur tenoit encore
fon école , mais il avoit fous lui un bachelier qui expliquoit les
fentences, & qu’il prefentoit à la fin de l’année pour la licence , comme
on l’avoit préfenté lui-même. Tout le cours du doâorat s’ache-
voit en ces trois années, fans préjudice des aâes qu’il falloit foûtenirde
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Xchard. Jum. S,
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'tëms èn tems: mais ce qu’il y avoit de bon eft que pèr-fonnê n’étoit reçu
doéteur qu’après avoir enfeigné publiquement. Au refte les leçons ncfe
faifoient pas en diéfcant des écrits, mais le profefïeur après s’être préparé,
les prononçoit de fuite comme des fermons ;& les écoliers en écrivoient
ce qu’ils pouvoient. Or il eft à croire que les freres Prêcheurs fuivirent
l ’ordre qu’ils avoient trouvé établi dans l ’univerfité.
L ’inftitution des collèges qui commencèrent vers le milieu du treizième
fi-cle fut un bon moien pour maintenir la police de i’univerlité &
contenir dans le devoir les écoliers qui y étoient renfermez. Les religieux
furent les premiers qui fondèrent de ces maifons pour loger en-
lemble leurs confrères étudians & les féparerdu commerce des féculiers.
Ainfi outre les freres Prêcheurs & les freres Mineurs dont les premières
Maifons à Paris font les collèges de tout l ’ordre , on y Fonda pour les
moines ceux des Bernardins, de Clugny & de Marmoutier. Celui de Sor-
bone fut un des premiers deftinéà des clercs féculiers; & enfuite la plû-
part des évêques en fondèrent pour les pauvres étudians de leurs diocè-
iês. Par-là ils s’acquictoient en quelque maniéré de l’obligation d’inftrui-
r e& de former leur clergé, qui eft un de leurs principaux devoirs: vû
qu’ils ne pou voient efperer de leur donner chez eux d'auffi bons maîtres
que dans les écoles publiques.
O r la difcipÜne des collèges tendoit non- feulement à l’inftruâion
des écoliers qu’on y entretenoit & que nous appelions Bourfiers, mais
à régler leurs moeurs & les former à la vie cléricale. Ils vivoient en
commun, célebroient l’office divin , avoient leurs heures réglées d’étude
& de divertiifement, & plufieurs pédagogues ou regens veilloient fur
eux pour les conduire & les contenir dans leur devoir : c’étoit comme de
petits feminaires. Enfin cette’inftitution & tout le refte delà police des
univerfitez fut fi generalement approuvée, que tous les pais du rit latin
fuivirent l’exemple de la France & de l’Italie, & depuis le treizième fiecle
ôn vit paroître de jour en jour de nouvelles univerfitez.
Voyons maintenant quelles étoient ces études que l’on embraifoit
avec tant d’ardeur, & fi on les avoit perfectionnées en augmentant le
nombre des étudians & des maîtres. C ’étoit fans doute l’intention,
mais le malheur du tems ne le permit pas. Le goût des bonnes études
étoit perdu , & on n’étoit pas encore revenu de l’erreur des fçavansdu
neuvième fiécle , qui voulant embrafler toutes les études n’étudioient
rien exa&ement. Onfuppofoit toujours que pour être admis aux leçons
de théologie, il falloit avoir appris les arts libéraux, c eft-à-dtre, au moins
la grammaire, la rethorique, la logique & les autres parties de la philofo-
phie ; &de-là nous eft venu ce cours réglé d’études qui fubfifte entore.
Le plan étoit beau fi l’éxecution eût été poffible : mais la vie de l’homme
eft trop courte pour approfondir chacun de ces arts comme on pré-
tendoit faire , & s’appliquer enfuite aux fciences fuperieures. Suppofé
même que quelque heureux genre pût y réüffir, ii ne faudvoit pas le pro-
pofer à tout le monde; & d’ailleurs la vraie fcience ecclefiaftique n’a pas
befoin de tous ces préleminaires. L ’antiquité ne le demandoit pas au^
évêques mêmes ; & S. Auguftin en nomme un de fon voifinage qui n’avoit
III.
Collèges,
Tafq, Recher«
Liv, ix,c. 15.
Hifl l, L X X X I I Ï i
». 47.
IV.
Cours d’étudesi
Hifi, liv, x l v . » ,
15.
3. Difc, ». z,
Hift. liv; xx. ».
MAug.
ep. 34.4/,
168.