
PPI
AU4-
£ 4 .6 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
la défenfe avons transféré les bornes que nos peres
nous avoient preferites pour vivre regulierement :
fi quelqu’un en doute, qu'il life & relifelesftatuts
de D om Guigues, & il verra combien notre prefen-
te maniéré de vie eft différente de celle de nos peres.
La caufe de ce mal femble être en quelques
prieurs, qui négligent de corriger ceux qui leur
font foûmis, ou qui par trop d’indulgence à fe donnera
eux & aux leurs les commoditez corporelles,
tombent dans le relâchement. Quelques-uns encore
trouvent pénible de demeurer avec leurs fre-
res & fe plaifent A fortir & à fe promener : ils fe
chargent des affaires d’autrui & abandonnent leur
troupeau. Ils de vroient confidererque le prieur de
Chartreufc ne fort jamais des bornes de fondefert,
que fes promenades au dehors font très-odieufes
aux vrais hermites, & que c e ft principalement ce
qui nous rend méprifabîes aux gens du monde.
Le chapitre'general a fouvent fait des réprimandés
&: des reglemens touchant la curiofîté & la dé-
penfe dans les habits & les montures ; mais il n’y a
point eu , ou très-peu d’amandement ; au contraire
plufieurs fe roidiffent contre la défenfe & mépri-
fent l ’efprit de notre inftitut, qui nous oblige plus
que tous les autres moines à l’humilité, l ’abjeéhion,
la pauvreté, la grofliereté dans nos habits, & tout
ce qui eft à notre ufage. Ils ont oublié la fainte
rufticité de notre ordre, & fe favent bon gré d’introduire
ces délicateffes contraires à la fobneté & à
la frugalité, qui énervent la rigueur de la vie ére-
mitique. Ces fuperfluitez font caufe que l’étenduë
de nos deferts ne pouvant plus fuffire a la dépenfe,
L l V R E Q y A T R E - V I N G T - Q U A T R I E ’ME. 6 4 7
plufieurs fe portent à des démarches illicites : à ^ ~
courir par le monde pour acquérir des biens, étendre
leurs bornes, & avoir des revenus au delà par
toutes fortes de difpenfes. Le chapitre ordonne de sup. uv.
dénoncer ceux qui feront coupables de ces défor- ”'il'
dres. L ’intervalle entre les ftatuts de Dom Guignes
& ceux de Dom Riffer eft environ de cent
trente ans.
La Lombardie fut enfin délivrée cette année Mo**-
du tyran Ecelin. Aïant voulu furprendre Milan & Eceim.
l’aïant manqué, il fut attaqué par les Gremonois & '
les Mantoüans > conduits par le marquis Hubert Pa-
lavicin. Ecelin fut bleffé à un pied dans le combat
& pris le famedivingt-feptiéme de Septembre jour
de faint Cofme l’an 1159- Les Cremonois le menèrent
à Succino, où il mourut peu de jours après
âgé d’environ foixante & dix ans. Comme il avoir
vécu fans penfer à Dieuilrefufales facremensavec
horreur ; auffi avoit-il été fans re lig ion , dépoüil-
lant les églifes, faifant mourir cruellement les ec-
elefiaftiques & les religieux , & diftribuant les bénéfices
à qui il lui plaifoit, comme s’il eur été pape.
G’étoit l’ennemi du genre humain, & il fit périr
en diverfes maniérés plus de cinquante mille
hommes. Il croïoitauxaftrologues&enavoitplufieurs
à fa fu ite , entr’autres un chanoine de Pa-
douë & un certain Paul Sarrafin venu de Bagdad,
portant une grande barbe : les Italiens croioient
voir en lui un autre Balaam.
Philippe Fontaine archevêque de Ravenne & lé- p. 4».
gat du S.fiege, étoit toûjours prifonnieràBreife où
Ecelin l’a voit mis. Le pape Alexandre aïant appris