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& à tous les Chrétiens, favoir de fe fôûmettre à lui j
car il ne craint aucun païs dans le monde que la Chrétienté.
Or leur intention eft de fe fôûmettre toute la
terre , fuivant l ’ordre que Ginguiz-can leur en a
donné.
4- »• Nous fûmes donc appeliez devant lui au lieu me--
me où il avoit été intronifé. Gingaï fon premier fe-
cretaire écrivit nos noms & de ceux qui nous avoient
en v o ïe z , & les recita à haute voix devant l’empereur.
C’ V - Nous fûmes du petit nombre de ceux qui furent admis
en fa prefence. Il nous renvoïa près de fa mere,
pendant qu’il fit la cérémonie de lever l’étendart contre
l’Occident, ne voulant pas que nous en euflîons
connoiifance, puis nous revînmes & fûmes bien un
mois auprès de l ui , fouffrant beaucoup de faim & de
fo if, car ce qu’on nous donnoit pour quatre jours fuf-
fifoit à peine pour un. Enfùite l’empereur nous envoïa
q u érir, & nous fit dire par Gingaï fon fecretaire d’écrire
nos prepofitionsôe les lui préfcnter. Puis on nous
demanda s’il y avoit auprès du pape des gens quifeuf-
fentlire le Ruflien, l’Arabe ouleTartare. Nous dîmes
que nous n’avions point d’ufage de ces écritures, mais
que des Arabes pourroient écrire en Tartare ce qu’on
leur diroit & nous l ’expliquer, que nous l ’écririons en
notre langue, & porterions au pape l’original & la
tradu&ion. On nous appella le jour de faint Martin,
Alors Cadac premier miniftre , Gingaï, Bala & plu-
fieurs écrivains vinrent à n o u s , nous expliquèrent
mot à mot la lettre de l’empereur que nous écrivîmes
en Latin, & nous en donnèrent la traduétion en
A r a b e , pour nous fervir quand nous trouverions
quelqu’un qui l’entendît.
L ’empereur
L i v r e q u a t r e - v i n g t - d e u x i e ’m e . s p î
L ’empereur fe propofoie d’envoïer avec nous d e s * i
gens de fa part, & un des Tartares qui nous accom- A n . 1247.’
pagnoieilt, nous exhorta a ie demander. Nous répon-Tts.B.c.
dîmes, que fi l’empereur les envoïoit de lui-même ,
nous les conduirions volontiers, Mais il ne nous pa-
roiifoit pas expédient que ces envoïez viniTent, pour
plufieurs.raifons. Nous craignions que voïant nos divisions
& nos guerres, ils ne fuifent plus encouragez
à marcher contre nous ; nous craignions que ces en-,
voïez ne fuifent des efpions, qu’ils ne fuiTent tuez
par nos gens, dont nous connoiffions l’infolence, ou
qu’on ne nous les ôtât de -force. Enfin nous ne
voïions aucune utilité à leur voïage , puifqu’ils n’au-
roient autre charge que de porter les lettres de leur
empereur au pape & aux princes, & nous avions ces
lettres. Nous fûmes congédiez le troifiéme jour après,
favoir le jour de S. Brice treizième de Novemb re, ô c
pendant notre retour nous pafsâmcs tout l’hiver dans
des deferts, où fouvent nous étions réduits à coucher
fu r la neige. Nous marchâmes ainfi jufqu’â l’Afcen- b . c. 14,
lio n , c’eft-à-dire, au neuvième de M a i.1247. Alors
nous arrivâmes près de Batou-can ; & le famedi d’après
la Pentecôte nous vînmes au quartier de M o f i i ,
où on avoit arrêté nos compagnons & c nos ferviteurs.
Nous nous les finies ramener ; puis nous arrivâmes à
C o ren z a , qui nous donna deux Comains pour nous
conduire en Ruffie.
Nous arrivâmes à K io v ie quinze jours avant la
S. Jean ; & i les habitans vinrent au-devant de nous
pleins de joïe , nous félicitant comme fi nous étions
reffufeitez : on nous en fit autant pat toute la Ruffie,
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