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L e t t r e de F r i d e -
r i e à S,. L o u i s .
P. Vin. i . ep. y
Match. Parijl
p. 614.
v . Ratn. 1246.
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5 3 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q j j e .
gueriffoiene des malades, reffufeitoient des morts, 6c
ioûmettoient les rois & les princes, non par les armes,
mais par leur vertu. Ceux-ci livrez au fîecle, enyvrez
des delices, méprifent Dieu ; &c l’excès de leurs richef-
fes étouffe en eux toute religion. C ’eft donc une oeuvre
de charité de leur, ôter ces richefTes pernicieufes qui
les accablent ; & c’eûà quoi vous devez travailler tous
avec moi.
L’autre lettre de l’empereur Frideric eft adreffé aii
roiS. Loüis, & tend principalement à montrer les
'nullitez de la fentence du pape. La première eft l’in-
competence du juge. Car, dit-il, encore que fuivant
la foi catholique nous reconnoiflîonsque Dieu a donné
au pape la plénitude de puiffance en matière fpiri-
ruelle, on ne trouve toutefois écrit nulle part,qu’aucune
ioi divine , ou humaine lui ait accordé le pouvoir
de transférer l ’empire à ion g ré , ou de juger les
rois & les princes pour le temporel, & les punir par
la privation de leurs états. Il eft vrai que par le droit
& la coutume il lui appartient de nous facrer ; mais
il ne lui appartient pas-plus pour cela de nous dépo-
fer,qu’aux prélats des autres roïaumes qui facrent leurs
rois.
Il vient enfuite aux vices de la procédure. Il n’a
procédé contre nous, dit-il, ni par accufation, ni par
dénonciation, ni par inquifition ; mais fur une prétendue
notoriété, que nous nions, & qui ferviroit à tout
juge de prétexte pour condamner qui il voudroit,
fans ordre judiciaire. On dit que quelques témoins
en très-petit nombre fe font élevez contre nous dans
le concile , dont l ’un favoir l ’évêque de C a lv i , étoit
irrité parce que nous avions fait pendre juftement
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fon frere & fon neveu convaincus de trahifon. D ’a u - -----
très, comme l’archevêque de Tarragone & celui de ^ N*
Compoftelle venus de l’extrémité de l’Efpagne, &
nullement inftruits des affaires d'Italie, ont été faciles
à fubojmer. Mais quand il y auroit eu un accufa-
teur & des témoins, il falloit encore que l’accufé fût
prefent ou contumace danslesformes. Nous n’avions
point été cité valablement & nous avons envoie des
procureurs propofer les caufes de notre abfencc, qu’on
n’a pas voulu écouter. Or il eft clair, que nous n’étions
pourfuivique civilement & non criminellement, puisque
la citation même portoit, que nous comparoî-
trions en perfonne ou par procureur. Suppofé même
la contumace , elle ne doit pas être punie par un jugement
définitif, qui condamne fans connoiffance de
eaufe. La forme de la prononciàtion montre encore
la nullitédela fentence, puifque ce n’eftpasnotre procureur
prefent qui eft condamné , mais nous abfent.
Nous montrons au fonds l’injuftice de la fentence
pardesmonumens publics, comme le porteur des pre-
fentes l’expliquera en détail. On voit la précipitation
de la fentence, en ce que le pape n’a pas voulu attendre
feulement trois jours l’évêque de Frifingue , le
maître de l’ordre Teutonique & Pierre des Vignes,
que nous avions envoïez au concile en dernier lieu ,
pour conclure le traité de paix. Enfin la qualité de la
peine fait voir l’animofité&la vanité du juge. Il condamne
pour crime de leze-majefté l ’empereur R omain
, il foûmet à la loi celui qui par fa dignité eft
affranchi des lo ix , que Dieu feul peut punir de peines
temporelles, puifqu’il n’a aucun homme au-deffus
de lui. Quant aux peines fpirituclles, c’eft-à-dire des
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