
1 6 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
A n . 1131. Aptes qu’il y eut demeuré long-rems, on l’envoïa
Bo#.c .i.p . 707. a v e c ¿ ’ a u j r e s a Forli dans la Romagne , pour recevoir
les ordres ; S£ il s’y trouva aufli des freres Prêcheurs.
Comme ils étoient tous afïemblez a 1 heure de
La Conference, leminiltre du lieu pria les freres Prêcheurs
de faire quelque exhortation: mais ils s en
excuferent tous, difant qu’ils n’y etoient point préparez.
Le miniflre fe tourna vers A n to in e , 8c fans con-
noître fa fcience l’exhorta a dire ce que leS-Eiprit lui
fuggereroic. Antoine répondit , qu il etoit plus exercé
à laver les écuellcsdans la cuifine qu a prêcher:
toutefois cédant à l’ordre du fuperieur, il commença
à parler, Sc le fit avec tant dedoétrine Sc d elegance,
que les auditeurs agréablement furpris ne fçavoient
qu’admirer le plus de fa fcience ou de fon humilité.
La chofe vint aux oreilles du general des freres M i neurs,
foit faint François ,'ioit frereElie, qui ordonna
à Antoine de s’appliquer à la prédication. ^
il parloit avec une liberté merveilleufe , difant également
la vérité aux grands Se aux petits; Sc comme
dès le commencement de fa converfion il avoit defi-
ré le martyre, nulle crainte , nul refpeêl humain ne
lere tenoit , Scils’oppofoitavecun courage intrépide
à la tyrannie des grands. Les plus fameux prédicateurs
en étoient épouvantez; Sc affiliant a les fermons
ils fe cachoient le vi fag e , de peur qu on ne vi t qu ils
rougifloient deleurfoibleife. Antoinealloit ainfi pre-
chanc par les villes Sc les bourgades: Sc accommodoit
fes dilcours à la portée de fes auditeurs, mêlant la
douceur àla feverité. Le pape lui-meme 1 ayant en tendu
Si admirant la profondeur de fa fcience dans
l explication de l’écriture, le nommoit l’Arche-d.alliance
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?üiatiëe. il ne s’apliquoic pas feulement à la morale,mais
encore à la controverle contre les hérétiques ; il en
convertitplufieurs à Rimini , Sc en convainquit plufieurs
en des difputesypubliques àMilan Sc àTouloufe.
II. parloit Italien fort p o l imen t , même quant à la
prononciation tout étranger qu’il étoit ; 8c quoique
la foule fût extraordinaire à fes fermons , c ’étoit une
modeftie Sc une attention finguliere. Son difcoürs
é toit ardent, touchant , pénétrant,, efficace : fes auditeurs
fondoient en larmes, fe frapoient la poitrine,
Sc fe difoient l’un à l’autre: Helasl je n’avois jamais
cru que telle aêtion fût un péché ; ils s’exhortoient à
fe confelfer, à-jeûner., à faire des pelerinages; Sc on
dit que les confrair-ies de flagellans,depuis fi fréquentes
en Italie Sc ailleurs, commencèrent par fes fermons.
Il enfeigna en plufieurs monafleres de fon or-
d r e , dans lequel il excita l’émulation de l’é tude: car
jufques-là les freres Mineurs étoient méprifez de plusieurs
comme des ignorans. Antoine eut aiiffi part au
gouvernement de l ’ordre. Il fut miniilre ,provincial
de la Romagne pendant plufieurs années , Sc fonda
plufieurs monafleres en diverfes provinces : il futgar-
dien au Pui en Vêlai 8c à Limoges.
Mais après avoir été déchargé de-tout gouvernement
par le ■chapitre général de 12.30. Sc par le pape,
a vec liberté de prêcher où il voudroitc il vint à Pa-
dou ëou i l pafla l’h y v e r , Sc y prêcha ie carême de l’an
1131 il prêchoit tous les jours Sc nelaifloit pas de
confelfer : le concours du peuple étoit tel à fes fe r mons
, que les églifesétant trop petites, il futobligé
de prêcher en pleine campagne. Toute la ville de
Padouë s’y trouvoit chaque jour avec le clergé , les
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A n. 113 r.
p. 70» .
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