
An. i z 43. rant plus de quatre cens ans ; que celui-ci qui n’a commencé
à s’établir en Angleterre que depuis vfingt-
quatreanstoutau plus. Leurs bâtimenss’élèvent déjà
comme des palais, & s’étendent de jour en jour-, ôc ils
y étalent destréfors fans prix, contre la pauvretéqui
eftla bafe deleurprofeffion. ils font foigneux d’afliltcr
à la mort des grands 8c des riches au préjudice des paf-
teurs ordinaires ; ils font avides de gain, 8c extorquent
desteftamensfecrets, ne recommandant que leur ordre,
8c le préférant à tous les autres ; enforte queper-
fonne ne croit plus fe pouvoir fauver, s’il n’eftfous la
conduite des Prêcheurs ou des Mineurs. Ils s’empref-
fent à acquérir des privilèges : ils entrent dans les con-
feils des rois Sc des grands,ils font leurs chambriers 8c
leurs tréforiers, ils font les entremetteurs des mariages
8c les exécuteurs desextorfions du pape: flatteurs
& mordans dans leurs fermons, & revelans les confef-
fionspar leurs corrections imprudentes. Ils méprifent
les ordres autorifez de S. Benoît 8c de S. Auguf t in,
préférant le leur à tous les autres •> ils traitent les moines
de Cîteaux de groiflers, ruftiques 8c demi-laïques,
& ceux deClugni de glorieux 8c d’Epicuriens. Il faut
fe fouvenirque Matthieu Paris qui parloir ainfi, étoit
moine Bénédiélin ancien.
Entre les lettres de Pierre des Vignes fecretairede
l ’empereur Frideric, nous en trouvons une écrite au
*• nom du clergé, 8c adreffée,ce femble, à'cet empereur,
contenant de grandes plaintes contre les freres Men-
dians. Depuis leur commencement, dit cette lettre, la
haine qu’ils ont conçue contrenous les a portez à décrier
notre vie & notre conduite dans leurs fermons;
fie ils ont tellement diminué nos droi ts, que nous
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fommes réduits à rien. Au lieu qu’autrefois par l’autorité
de nos charges, nous commandions aux princes,&
nous faifionscraindre des peuples, maintenant
nous en fommes l'opprobre 8c la rifée. Ces freres
mettant la main dans la moiifon d’autruf , nous ont
peu à peu dépouillez de tous nos avantages, s’a ttribuant
les pénitences, le baptême, l’onit ion des malades
& les cimetieres. Et maintenant pour diminuer
d’autant plus nos droits, 8c détourner de nous la dévotion
des particuliers, ils ont inftitué deux nouvelles
confrairies, où ils reçoivent fi généralement les hommes
8c,les femmes qu’à peine s’en trouve-t il quelqu’un
qui ne foit inferit dans l’une ôu dans l’autre. En*
forte que les confrères s’aifemblant dans leurs égli-
fes, nous ne pouyons avoir nos paroiffiens dans les
nôtres, principalement les jours folemnels ; 8c ce qui
efl: de pire, ils croient mal faire s’ils entendent lapa--
role de Dieu d’autres que de ces freres. D ’où il arrive
qu’étant fruftrez jles dîmes & des oblations, nous ne
pouvons vivre fi nous ne nous appliquons à quelque
t ra va i l , quelque art mécanique, ou quelque
gain illicite.
Nous ne différons plus déformais des laïques, 8c
notre conditioneft pire, en ce que nous ne pouvons
être ni laïques en confidence, ni clercs avec honneur.
Que refte-t’il aonc finon d’abattre de fond en comble
nos églifes, où il ne refte qu’une cloche 8c quelque
vieille image enfumée ? Helas! plufieurs lieux autrefois
célébrés par quantité de miracles fuivant la dévotion
des fidèles font remplis de meubles des particuliers.
Les autels autrefois bien ornez font à peinecou-
vertsd’une fimple nappe trouée: lep a v é qu’on lavoit
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