
4 o 8 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .’
•-------------- troupes que fi vous y alliez en perfonne. Dieu ne chi*
A n . 1 14 7 . cane pas avec nous : l’état où vous avoit réduit la maladie
, fans liberté d’efprit & prefque fans connoif-
fance, vous excufe fuffifamment.
Le roi parut touché de ces difcours & dit : Vous
prétendez que c’eft l’aliénation d’efprit qui m’a fait
prendre la croix ? Hé bien je la quitte comme vous dé»
iirez , &c portant la main fur fon épaule il en arracha
la c ro ix , & dit à l’évêque : T e n e z , je vous la remets
librement. Tous les aiïïftans furent tranfportez de
joie -, mais le roi prenant un vifage plus ferieux, leur
dit : Aifurément je ne fuis point à preient privé de
raifon ni de fentiment, je ne fuis point malade : or
je redemande ma c roix , & Dieu m’eft témoin que je
ne prendrai aucune nourriture qu’on ne me l’ait ren?
due. Ils reconnurent tous que Dieu agiiToit en cette
occafion -. & perfonne n’ofa plus s’oppofer à la réfa-?
lution du faint roi.
r.af.6tz. L e pape fondoit fur lui de grandes efperances \
Ap. „ • • -1 , . , 0 . 1 r r J lus.u.z%. Sc voici comme u en écrivit le vingt-troiiieme de
Février 1148. dans une lettre adrelfée à la nobleffe
& au peuple pour les exciter à la croifade :Nôtre-
Seigneur Jefus-Chrift femble avoir choifi entre les
autres princes du monde pour la délivrance de fa
terre , notre cher fils le roi de France, qui outre
la pureté de corps & de coeur & la multitude des vertus
, abonde encore en guerriers & en richefles.
Il a pris la croix &: fait des préparatifs dignes d’un
fi grand prince & d’une fi grande entreprife. En-
forte qu’il y a. lieu d’efperer qu’il la conduira à une
b. i?. heureufe fin, Le pape ajoûtç qu’il a donné de fa
main
Ï . I V R E Q U A T R E - V I N G T - T R O I S I ê ’mE . 4 0 <>
main la croix au cardinal Eude évêque de Tufculum , s
Sc l’a créé légat pour cette armée. Le pape écrivit de A n . 1148.
même au patriarche de Jerufalem, & aux prélats de
Chipre & d’Armenie. Il manda au légat avant qu’il
partît de France, de n’abfoudre perfonne de fbn voeu :
Il manda aux évêques d’Evreux & de Senlis, d’ordonner
à tous les croifez qu’ils fe tinifent prêts à paf-
fer avec le roi au mois de Mars prochain ; &C il donna
le même ordre aux croifez de Frife, de Hollande
& de Zelande.
Mais peu de tems après le pape fit prêcher en Cro;ra AlIe
Allemagne contre Frideric une autre croifade, qui magne contre Fri-
ne pouvoit manquer de nuire à celle de la terre fainte.
Ce prince avoit fait publier une ordonnance , portant
que tout ecclefiaftique ou religieux, qui fur le
mandement du pape ou de fon lé g a t , auroit manqué t'tr.vin.ui.r.
de celebrer la meife ou les autres offices divins, ou ‘f ’ *'
d ’adminiftrer les facremens, feroit chaifé de la ville ,
ou du lieu de fa demeure, & dépoüillé de fes biens
patrimoniaux & ecclefiaftiques, qui feraient ajugez ;
fçavoir, les biens ecclefiaftiques aux clercs qui obéiraient
à cette ordonnance, & les biens patrimoniaux
aux parens, qui fuccederoient ab inteftat. L ’ordonnance
ajourait, défenfe à aucun religieux de paifer
d’une ville à l’autre, fans lettres teftimoniales du
magiftrat du lieu d’où ils partiraient ; & à la charge
qu’ils feraient de bonnes moeurs, & connus des fer-
vjteurs de l’empereur,
Cette ordonnance étant venue à la connoiflance
du pape , il fulmina de nouveau contre Frideric >
& le jeudi-faint feiziéme jourxd’Av r il 11.48. il réï-
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