fàifoient en ce genre quantité de moines, & les faux
miracles qu’ils débitoient. Le concile de Carthage
dont nous venons de parler, craignoit les tumultes ,
parce que cette fuperftition s’étoit emparée de 1 el-
prit du peuple. Les évêques ufoient de connivence ;
&c l’auteur de la cité de Dieu déclare naïvement qu’il
n’ofe parler librement fur plufieurs feinblables abus,
pour ne pas donner occafion de fcandale à des per-
l'onnes pieufes, ou à des brouillons. L’amour des
reliques étoit venu au point qu’on ne vouloit point
d’éaüfes ni d’autels fans reliques : il falloit donc bien
en trouver à quelque prix que ce fut, de forte qu’au
defaut des véritables, on en forgea de fauffes.
Voilà quelle fut l’occafion de tant de fortes d’im-
poftures, dit M. l’abbé Fleuri, 3 .dijeours ; car pour
s’affurer des vraies reliques, il eût fallu les fuivre
exactement depuis leur origine, 6c connoître toutes
les mains par lefquelles elles avoient paffé ; or après
plufieurs fiecles il fut bien aifé d’enimpofer non-feulement
au peuple, mais aux évêques devenus moins
éclairés & moins attentifs ; 6c depuis qu’on eut établi
la regle de ne point confacrer d’églifes ni d’autels
fans reliques , la néceffité d’en avoir fut une grande
tentation de ne les pas examiner de fi près. L’intérêt
d’attirer des offrandes fut encore une nouvelle tentation
plus difficile à vaincre. ^ .
Après ce la , il ne faut pas s’étonner du mente
qu’acquirent les reliques dans l’efprit des peuples &
des rois. Nous Iifons que les fermens les plus ordinaires
desanciens françois fe fàifoient fur les reliques
des faints. C’ eft ainfi que les rois^ontran, Sigebert
& Chilpéric partagèrent les états de Clotaire , &
convinrent de jouir de Paris en commun. Ils en firent
le ferment fur les reliques de S. PolieuCte , de S. Hilaire
& de S. Martin. Cependant Chilpéric fe jetta
dans la place, 6c prit feulement la précaution d’avoir
la châffe de quantité de reliques , qu’il fît porter comme
une fauve garde à la tête de fes troupes , dans
l’efpérance que la protection de ces nouveaux patrons
le mettroit à l’abri des peines dues à fon parjure
; fur quoi il eft bon d’obferver que nos rois de la
première 6c de la fécondé race gardoient dans leur
palais un grand nombre de reliques, furtout lachappe
& le manteau de S. Martin, 6c qu’ils les fàifoient porter
à leur fuite , 6c jufque dans les armées. On en-
voyoit les reliques du palais dans les provinces, lorf-
qu’i l étoit queftion de prêter ferment de fidélité au
roi, ou de conclure quelque traité..
Je ne me propofe pas de donner au leCteur un recueil
des excès où la fuperftition & l’impofture ont
été portées dans lès fiecles fuivans en matière de reliques^,
mais je ne crois pas devoir lui laiffer ignorer
ce que raconte Grégoire de Tours, hiß. /. IX . c. vj.
que dans la châffe d’un faint, on trouva des racines ,
des dents de taupe, des os de rats, & des ongles de
renard. . .
A propos de Tours, Hofpimen remarque que dans
cette ville on adoroit avec beaucoup de fuperftition
une croix d’argent ornée de quantité de pierres pré-
cieufes, entre lefquelles il y avoitune agathe gravee
qui étant portée à Orléans , & examinée par les curieux,
fe trouva repréfenter Vénus pleurant Adonis
mourant.,
Cette anecdote me fait fouvemr d une agathe dont
parle le p. Montfaucon { antiq. expliquée, jupplément.
tom. I. Uv. 2 , C. iij. ) , & qui eft préfentement dans
le cabinet du roi. On y voit aux deux côtés d’un arbre
, Jupiter & Minerve ; ce qui paffoitpour l’image
du paradis terreftre & du péché d’Adam, dans une
des plus anciennes églifes de France, d’où elle a été
ôtéedepuis près de cent ans, aprèsyavoir été gardée
pendant plufieurs fiecles. Dans Ces tems de fimplici-
t é , ajoute le doCte bénédictin , on n’y regardoit pas
deVi près. La grande agathe. de la Ste. Chapelle, qui
repréfente l’apothéofe d’Augufte , a paffé pendant
plufieurs fiecles, pour l’hiftoire de Jofeph, fils de Jacob.
Une onyce qui repréfente les têtes de Garmanicus
& d’Agrippine----- a été honorée pendant 600
ans, comme la bague que S. Jofeph donna à la Ste.
Vierge, quand ils Te marièrent. On la baifoit en cette
qualité tous les ans , dans certains jours de l’année ;
cela dura jufqu’à ce qu’on s’apperçutfiir la fin du dernier
fiecle, qu’une infeription greque, en caraCteres
fort menus, appelloit Germanicus Alphée, & Agrippine
Aréthufe.
Ceux qui voudront des exemples en plus grand
nombre furies erreurs en matière de reliques, peuvent
confulter Chemnitius , examen concil. trident.
Hofpinien, de origine templorum , & en particulier un
mémoire inféré dans la Biblioth. Hiflor. philolog. théo-
log. de M. de Hare, claff. vij.fajcic. vj. art. 4 , fous
ce titre : Jo. Jacob. Rambachii bbfcrvatio, de ignoran-
tiei exegetied multarum reliquiarum facranlm , rnatre &
obßetrice.
Strabon obferve qu’il étoit hors de vraiffemblance
qu’il y eût plufieurs vrais fimulacres apportés de
Troie ; on fe vante , dit-il, à Rome, à Lavinium , à
Lucérie, à Séris, d’avoir la Minerve des Troyens. '
Strabon *penfe folidement ; car dès qu’on voit plufieurs
villes fe glorifier de la poffeffion d’une meme
relique, ou de la, même image miraculeufe, c’eft une
très-forte préfomptionque toutes s’en Vantent a faux,
& que le même artifice, le même intérêt, les porte
toutes à débiter leurs traditions. r
M. de Ma rôles , abbé de Villeloin , a renouvelle
cette remarque dans fes mémoires, pag. 132 . arm.
1C41. . *- -
« Comme , dit-il, on montroit à Amiens, a la
» princeffe Marie de Gonzague , la tête de S. Jean-
» Baptifte , que le peuple y révéré pour Funè des
» plus confidérables reliques du monde, fon alteffe,
» après l’avoir baifée, me dit que j’approchaffe, &
» que j’en fiffe autant; je confidérai le reliquaire SC
» ce qu’il renfermoit; énfuite me comportant comme
» tous les autres, je me contentai de dire avec toute
» la douceur dont j’étois capable, que c’ étoit la cinq
» ou fixieme tête de S. Jean-Baptifte que j ’avois eu
» l’honneur de baifer ; ce difeours fur prit un peu fon
» alteffe, 6c fit naître un petit fouris fur fon vifage;
» ' mais il n’y parut pas. Le facriftain ou le tréforier ,
» ayant aufii entendu mon propos , répliqua qu’il ne
» pouvoit nier qu’on ne fît mention de beaucoup
» d’autres têtes de S. Jean-Baptifte ( car il avoir
» peut-être oui dire qu’il y en avoit à S. Jean de
». Lyon, à S. Jean de Maurienne, à S. Jean d’Ange-
» ly en Saintonge , à Rome , en Efpagne, en Alle-
» magne, & en plufieurs uutres lieux ) ; mais il
» ajouta que celle-là étoit la bonne ; & pour preuve
» de ce qu’il affuroit, il demanda qu’on prît garde
» au trou qui paroiffoit au crâne de la relique au-
» deffus de l’oeil droit ; 6c que c’étoit celui-là même
» que fit Hérodias avec fon couteau, quand la tête
» lui fut préfentée dans un plat. 11 me femble, lui ré-
» pondis-je, que l’évangile n’a rien obferve d’une
» particularité de cette nature ; mais comme je le vis
» ému pour foutenir le contraire , je lui cédai avec
» toute forte de refpect. Et fans examiner la chofe
» plus avant, ni lui rapporter une autorité de S. Gré-
» goire de Naziance, qui dit que tous les offemens
» de S. Jean-Baptifte furent brûlés de fon tems par
» les Donatiftes dans la ville de Sébafte, & cju’il
» n’ en refta qu’une partie du chef qui fut portée à
» Alexandrie ; je me contentai de lui dire que latra-
» dition d’une églife auffi vénérable que celle d’A-
» miens, fuffifoit pour àutorifer une creance de cette
» efpece , bien qu’elle n’eût que quatre cens ans, &
„ que ce ne fûtpas un article de foi. Cependant nous
» nous munîmes de force reprefentations de ce faint
» reliquaire ; 6c le bon eccléfiaftiqtie refta très-ia-
.» tisfait. '•
L’auteur des nouvelles de la république des lettres
parlant d’un livre qui traitôit du S. Suaire , rapporte
ces paroles de Charles Patin : « je fuis fâché de voir
'» trop foüvent le portrait de la Vierge peint par S.
» Luc ; car il n’eft pas vraiflèrriblable que S. Luc ait
-»>-tant de fois-peint la niere de notre Sauveur. »
C’en eft affez fur la folle crédulité des hommes ’ &
-fur les-erreùrS'qùi'n’ôntfait que fe multiplier dans la
vénération desr reliques. Je ne'fuis point curieux
d ’examiner la queftion, fi leur-origine eftpayenne,
-ce dont S. C y r ille ,//£. X .p . 3$ f , eft convenu'dans
fa réponfè'à’l’empereur Julien, qui le premier a reproché
aux Chrétiens le culte des morts & 'de leurs
reliques. Je reconnois avec plus de plaifir que les lumières
dudernièr fiecle orit mis riin grand frein à la
fuperftition qvii s’étoit fi fort étendue fur les fraudes
pieufes àcet égard ; mais1 en même tems il fauta vouer
■ qu’il n’é.n relie encore qu'e-'tfdp de traces dans plusieurs
lieux de là chrétienté ; c’eft'lans doute Ce qui
a engagé d’habiles gens de la communion rotnaine à
s ’élever côufageufem'ent contre les fauftès reliques.
-M. Thiers,- que je ne dois pas oublier de nommer ,
a difeuté dans fes écrits , l’état dés-lieux qîfpeuvent
■ être les côfpsdés martyrs-; il a publié èn particùlier
des differtatiqns contre la Ste. Larmê dé Vendôme,
& 1 es reliques dé.S. Firmin. Le p. Mabilforf'â cru 'devo
ir auffi donner des confeils fur le difcernementdes'’
reliques y il me femble qu’on, auroit dû les écouter ;
mais le chancelier de France ne fut pas’de cet avis ;
il fit fupprîmer par arrêt du confeil, l’ouvrage de M.
T hiers fur S. Firmin ;& l’ordre de S. Benoît eondam-
na le pv Mabillon. Qn fait le bpn mot qu’un fou's-
prieur de S. Antoine dit alors fur Ces deux condamnations.
Moribusantiquis , &c.
Cependant je ne crois poiiif aujourd’hui d’être blâmé
, pour-avoir confidéré avec M. l’abbé , Fleury ,
fims fatyre & ' fans irréligion , « les abus que l’ignor
» rance & les paffions humaines ont produit dans la
» vénération desrc//^Ke.t;-non-fe.ulem'ent en fe trom-
» pant dans le fait, & honorant comme reliques ce
» qui ne l’étoit pas, mais en s’appuyant tropfiir les
» vraies reliques, & les regardant comme des moyens
» infaillibles d’attirer fiir lès particuliers & fur les
» villes, toutes fortes de bénédictions temporelles
>> & fpirituelles. Quand nous aurions , continue cet
» illuftre hiftorien, les faints mêmd vivans & con-
» verfans avec nous, leur préfence ne notls feroit
»> .pas plus avantageufe que celle de Jefus-Chrift ,
» comme il le déclare expreffcment dans l’évangile,
>> Luc xiij: 26. Vous direz ail pere de famille ,
» nous avons bu & mangé aVeC vous, & vous avez
» enfeigné dans nos places ; & il vous répondra , je
» ne fais qui vous “êtes. T6w. i.difc. .ecclèjiafl. ( Le'
chevalier DE J AU COU RT. )
R E L IQ U IÆ , (Antiq. rom.) ’ ce mot qu’on trouve
dans S u étonedans Pline le jeune, &: autres anciens
auteurs latins , défigne les os , les cendres des
morts, leurs reliques, ce qui irons refte d’eux après
avoir été brûlés ; les anciens confervoient religieu-
fernent ces reftes dans des urnes , qu’ils enfermoient
enfuite dans des tombeaux. (Z>. 7. )
REJTRE, v. a£t. ( Gram.) lire pour une fécondé
fois. Relife^ fouvent vos ouvrages. Il faut relire fou-
vent les anciens.
t RELOCATION, f. f. ( Jurifprud. j fignifiè en
general l’aéte par lequel on reloue une chofe à
quelqu’un.
Ce terme de retocation peut s’appliquer en plufieurs
cas; fa voir,
i° . Lorfque le propriétaire d’une chofe la loue de
nouveau à celui auquel il l’avoit déjà louée.
' 20. Lorfqu’iin principal locataire reloue à d’au-
Tome X IF t
très, cfoft-à-dire fous-loue ce qu’il tient lui-même à
loyer.
3°* L e fons le plus ordinaire dans lequel oii prend
le terme de relocaiion, c’eft en matière de contrats
pignoratifs mêles de vente, dont la relocati'on ou re-
condu&ion eft le principal caraftere. Le débiteur
vend à fon créancier un héritage pour l’argent qu’il
lui doit, avec faculté perpétuelle de rachat ; & cependant,
pour ne point dépoffedèr le vendeur, l’acheteur
lui fait une rdoedtion de ce même héritage
moyennant tant de loyer par an, lequel lbÿèr tient
lieu au créancier dés intérêts de fon principal, c’eft
ce que l’on appelle relocation où reconduction.
■ Lorfque- la faculté de rachat, ftipulée par un tel
contrat ,'èft fixée à un certain tems, à l’expiration
du terme on ne manque pas de la proroger, ainfi
que la relocaiion. Voye?^ Brocleau fur M. Louet, lei. P.
n. ïoi &.11. & les mots; An t ich rese, Contr at
p ig n o r a t if , Engagem ent, L o c a t io n , L o uage
^Recon du ct io n . (A)
RELOGER, v. n. ( Gramm.) c’eft retourner ail
même \ogis.Voyei les'articles Lo g e r , L ogis.
R E LO U A G E , fi m, ( Pêche de hareng. ) c’eft le
tems:qïié çe poiffon fniyé, ce qui arrive vers Noël.
Le hareng dans cette faifon eft de très-mauvaife qualité
;-&'c’èft pour cela que les Anglois en défendent
là pêche; outre qu’elle dépeuple la mer de ces poif-
fons, qui rie peuvent multiplier étant pris dans le
tems que la nature a marqué pour leur génération.
Les François n’ont pas cette précaution, 6c font pref
qûe toute cette pêche, qui eft ft abondante à la hauteur
du Havre-de-Grace, qu’il y a des années que
dans les ports de cette côte., on en donne jufqu’à
trente-deux pour dix-huit deniers. Il n’y a guere
pourtant que les pauvres qui en mangent dans ce
tems-lâ. Diction, de com. ' ( 2>.-7>) '
RELOUER, v , a£L ( Grakim. ) c’eft louer une fécondé
fois. On reloue fa maifon. On reloue un livrei
Voye{ les articles LOUER & LOUAGE, & tes articles
Louer . & Louange.
RELUIRE, v. n. ( Giam. ) c’èft avoir de l’éclat
briller, réfléchir la lumière. Tous les corps polis re-
luifent plus ou moins. Il fe dit au fimple & au figuré.
Tout ce qui reluit n’eft pas or. Sa modeftie ne peut
dérober aux yeux l’éclat de fes vertus, elles relui-
féru malgré lui.
RELUSTRER, v. a£h ( Gramm.') c’eft rendre le
luftre. Voyelles articles Lustre 6- Lustrer.
REMACHER, v. aâ. (Gramm.) c’ eft mâcher derechef.
Foyei les articles MACHER & MACHOIRE.
REMAÇONNER, v. a£L ( Gramm. ) c’eft réparer
par le moyen d’un maçon.
REMANCIP A T I O , ( Jurifprud. rom.) c’eft ainfi
qu’on nommoit chez lès Romains la formule de divorce
obfervée dans les mariages qui avoient été
contrariés par coemption, 'coemptione. Cette formule
de divorce fe faifoit en remettant la femme entre les
mains du mari qui devoit l’époufer, ou entré les
mains de toute autre perfonne, ainfi qu’ils, en étoient
convenus entre eux. ( D . J. )
REMANDER, v. aft. ( Gramm. ) c’eft mander de
nouveau. Voye£ Mandement & Mander. ■
REMANDURES, f. f. (S a l.) fontaines falantes.
Maniéré de compter le travail des poêles. Il fe fait
par remandiires. La remandure eft compofée de feize
cuites, Sc la cuite dure douze heures. Foye^ l'article
Saline.
REMANGER , v. a ô. ( Gramm. ) c’eft reprendre
des alimens. Foye{ L'article Manger.
REMANIEMENT, f. m. (Gramm.) c’ eft l’aûion
de manier une fécondé fois. Foye^ R emanier." u
R emaniement à b o u t terme de Couvreur, ce
mot s'entend de.l’ouvrage qu’on fait fur une couverture
, lorfqu’on la découvre entièrement, qu’on la
M ij