Madrid, à 330 an fuel eft de Paris , à 340 d’Amfter-
dam, à 3 10 nord-oueft de Conftantinople, & à 190
fud-oueft de Vienne. Long, iuivant Caffini & Bian-
chini, jo. 1 0 '. jofe' L a t i t . 4 1 . S 4 . félon Gréave,
4 1 . 4 6 '. La différence dé. méridiens entre Paris &
Rome, eft de 10. 19. 30. dont Rome eft plus orientale
que Paris.
Rome eft non-feulement aujourd’hui la capitale de
l’Italie dans l’état de l’Eglife . mais elle eft encore à
plus d’un égard , la capitale de tous les royaumes
.catholiques, puifque chacun d’eux a le droit d’y nommer
un miniftre, 6c que leurs caufes eccléfiaftiques ,
même leurs caufes temporelles , y font jugées par
le tribunal de la Rote , compofé de juges de chaque
nation. Dans cette ville j
Près de cecapitole, où. regnoient tant d'allarmes ,
Sur les pompeux débris de Bellone & de Mars ,
Un Pontife eft a [fis au trône des Céfars.
Des prêtres fortunés foulent d'un pié tranquille
L es tombeaux des Calons, & la cendre d? Emile ;
Le trône eft fur Pauttl, & Vabfolu pouvoir
Met dans les mêmes mains lejeeptre & l'encenfoir.
Voltaire.
La différence eft néanmoins bien grande entre Rome
ancienne, & Rome moderne ; je ne dirai pas avec
Vopifcus , qui vivoit fous l’empire de Dioclétien ,
que les murailles de l’ancienne Rome avoient un circuit
de cinquante milles, parce que je erpis que c’eft
une faute des copiftes ; je ne fuis pas moins éloigné
d’adopter les extravagantes exagérations de Vofiius,
qui donne à l’ancienne Rome plufieurs millions d’ha-
bitans ; mais en fuppofant qu’elle fût à-peu-près aufîi
peuplée que peut l’être Paris, il eft certain que Rome
moderne n’a pas cent quarante mille âmes.
On ne comptoit à la fin du dix-feptieme fiecle ,
par un dénombrement qui fut imprimé , que cent
trente-cinq mille habitans dans cette ville, en y comprenant
les Juifs, & c e calcul fe trouvoit encore vérifié
par les regiftres des naifîances. Il y naiffoit, année
commune, trois mille fix cens enfans ; ce nombre
de naifîances multiplie par 3 4 , donne toujours
à peu près le total des habitans, favoir environ cent
vingt-cinq mille, outre les dix mille Juifs.
Il refaite de cette obfervation que Rome eft fix fois
moins peuplée que Paris , & fept fois moins que Londres
; elle n’a pas la moitié d’babitans que contient
Amfterdam , & en eft encore plus éloignée proportionnellement
du côté de l’opulence, 6c la connoif-
fance des arts qui la produifent ; elle n’a ni vaiffeaux,
ni manufactures , ni trafic. 11 eft vrai que depuis le
pontificat de Jules II. & de Léon X. Rome a été le
centre des beaux arts, jufqu’au milieu du dernier
fiecle ; mais bientôt, dans quelques-uns, elle ,fiit égalée
, 6c dans d’autres furpaffee par notre capitale.
Londres a aufii fur elle autant de fupériorité parles
fciences que par les richeflés 6c la liberté; les palais
fi vantés de Rome font inégalement beaux , 6c généralement
mal entretènus ; la plupart des maifons des
particuliers font miférables ; fon pavé eft très-mauvais
, les pierres petites 6c fans afïiete ; fes rues vilaines
, fales 6c étroites , ne font balayées que par
la pluie qui y tombe rarement.
Cette v ille, qui fourmille d’églifes 6c de couvens,
eft prefque délerte à l’orient 6c au midi. Qu’on iui
donne tant qu’on voudra:clouze milles de tour., c’eft
jan circuit rempli de terres incultes, de champs 6c de
jardins, qu’on appelle vignes. Ceux du Vatican & du
derrière de S. Pierre, occupent plus d’un tiers de la
partie nommée le bourg,6c tout ce qui eft à l’occident
de la Longara jufqu’au Tibre, ne préfente encore.que
des jardins , des lieux vuides d’habitans. Ainfi,
l’on a eu railon de dire, que les fept collines qui faifoieut
autrefois fa décoration, ne.lui fervent plus qüe
de tombeaux.
ffoec, dum viva ,Jîbi feptem circumdedit arces
Mortua nunc feptem contegitur tumulis. '
Cependant cette Rome dépeuplée , foible par elle-
même , fans fortifications, fans troupes & fans généraux
, eft toujours la ville du monde la plus dione de
curiofité, par une infinité de précieux relies d’antiquités,
& des chef-d’oeuvres des modernes , en architecture
, en peinture 6c en fculpture.
Entre les relies de l’ancienne Rome, la grandeur de
la république éclate principalement dans les ouvrages
néceffaires, comme les grands chemins, les aqueducs
6c les ponts de la ville. Au contraire la magnificence
de Rome fous les empereurs, fe manifefte dans
les ouvrages qui concernoient plutôt l’oftentation ou
le luxe, que l’utilité publique ; tels font les bains,
les amphithéâtres, les cirques, les obéiifques, les co-
lomnes, les maufolées, les arcs de triomphe, &c. car
ce qu’ils joignoient aux aqueducs , étoit plutôt pour
fournir leurs bains & leur naumachie, 6c pour embellir
la ville par des fontaines, que pour quelque ber
foin efleClif. Ces divers reftes ont été fi amplement
décrits par quantité de voyageurs Sc d’autres écrivains
, dont les meilleurs ouvrages ont été recueillis
dans la vafte collection de Gronovius, qu’il eft difficile
de rien dire de neuf fur un fujet fi rebattu. Cependant’,
il y a tant de chofes remarquables dans un
champ fi fpacieux, qu’il eft difficile de les confidérer.
fans faire différentes réflexions, ou félon fon génie,
ou félon les études que l ’on a cultivées.
En général parmi les antiquités de Rome, les an- *
ciennes ftatues font l’objet qui a le plus de partifans,,
à caufe de l’excellence de l’ouvrage. On eft enchanté
de voir les vifages de gens illuftres qu’on connoîr
tant dans l’hiftoire. On aime à confiderer la reflém-
bîance qui fe trouve entre les figures des divinités,
du paganifme, 6c les deferiptipns que les poètes nous
en ont données , foit que les poètes aient été les copiftes
de la fculpture grecque , foit que la fculpture
ait pris fes fujets dans les poètes. Rome, maîtreffe de.
l ’univers, raffembla dans fon fein les plus beaux morceaux
de la Grece.
Quoique les ftatues qui ont été trouvées parmi les-
débris de l’ancienne Rome , furprennent par leur
nombre prodigieux, il ne faut point douter qu’il n’y
ait encore fous terre de grands tréfors en ce <*enre.
Il y a plufieurs endroits qui n’ont jamais été vifités.
On n’a point touché à une grande partie du mont Palatin
; ce comme c’étoit autrefois le fiége du palais de
l’empereur, on peut préfumer qu’il n’eft pas ftérile
en richeffes de ce genre.
J1 y a des entrepreneurs à Rome qui achètent volontiers
le droit de fouiller des champs, des jardins,
ou des vignobles. Us payent l’étendue de la furface
qu’ils ont à creufer ; 6c après l’effa icomme on fait
en Angleterre pour les mines de charbon , ils remuent,
les endroits qui promettent davantage , 6c fouvenfc
avec fuccès. S’ils font trompés dans leur attente, ils
gagnent ordinairement affez de briques Sc de dccom-.
bres pourfe rembourfer des frais de leurs recherches ;
parce que les Architeéles eftiment plus ces matériaux
anciens, que les nouveaux. Mais on.croit furtout
à Rome, que le lit du Tibre eft le grand magafin de
toutes ces fortes de tréfors ; cette opinion elffi générale
,,que les Juifs ont autrefois offert au pape de net-,
toyer cette riviere;, pourvu qu’ils enflent feulement
ce qu’ils y trouveroient. Ils propolerent de faire un
nouveau canal dans la vallée près de Ponte-Molle
pour.recevoir les eaux du Tibre.,: jufqu’à ce qu’ils
euffentvuidé & nettoyé l’ancien., Il falloit acceptér
unepropofition.fi favorable, le pape la refufa par
une-;/,aine .terreur ;,.U;>eft : certain qpe là > ville de Roio
me reÇevroit uil grand avantage d’une telle entreprise
, qui releveroit les bords du Tibre, & remédieroit
à fes fréquens débordemens.
Rome offre un autre fpeftacle curieux, c’eft la grande
variété des colomnes de marbre dont elle eft remplie
, 6c qui ont été tirées d’Egypte ou de la Grece.
On conçoit la difficulté qu’on a dû éprouver pour
les tailler 6c leur donner la forme, la proportion 6c
& le poli. Je fai que quelques modernes condamnent
la proportion 6c la forme de ces colomnes ; mais les
anciens fachant que le but de l’architeélure eft principalement
de plaire à l’oe il, s’attachoient à remplir
ce but: c’étoit un effet de l’art, & de ce que les Italiens
appellent e>gufto grande ; ils confidéroient toujours
l’aifiette d’un bâtiment, s’il étoit haut ou bas ,
dans une place ouverte ou dans une rue étroite, 6c
ils s’écartoient plus ou moins des réglés de l’art ,pour
s’accommoder aux diverfes diftances 6c élévations ,
d’où leurs ouvrages dévoient être regardés.
Je mets au rang des colomnes de Rome, tous les
obéiifques qui font dans cette capitale, Sc qui-y ont
été apportés d’Egypte. Tel eft l’obélifque qui eft au
milieu de la place qui fait face à S. Pierre de Rome ,
6c celui qui eft vis-à-vis dé S. Jean de Latran. Sixte-
quint a la gloire de les avoir tous deux fait relever.
Foye^ OBELISQUE.
Le ponte Sant ’ Angdo, par 011 quelques voyageurs
ont commencé à décrire la ville de Rome, eft celui
qu’on appelloit anciennement Pons-Ælius, du nom
de l’empereur Æiius Adrianus, qui le fit bâtir ; & il
a pris celui de ponte Sant' Ange lo , qu’il porte aujour-
d’hu , à caufe que S. Grégoire leGrand, étantfur.ee
pont, vit, à ce qu’on dit, un ange fur le moles Adria-
ni, cui remettoit Ion épée dans le fourreau,après une
grande pelle qui avoir délolé toute la ville. En jet-
tant les yeux lur la riviere , on découvre à!.gauche
les ruines du pont triomphal, par-deffus lequel tous
les triomphes paflbientpour aller au capitole ; ce qui
fit que ce paffage en demeura plus libre, &c que par
un decret du lènat, il fut défendu aux payfans & au x
laboureurs.
Le château S. Ange eft au bout du ponte Sant-
Angelo, c’eft ce qu’on appelioit moles Adriani, parce
que l’empereur Adrien y avoit été enterré; c’eft dans
ce château qu’on met les prifonniers d’état; & que
Sixte V. dépofa cinq millions, avec une bulle qui dé^
fend de s’en lervir fans une preflante néceffite ; apparemment
que quelques-uns de fes fuccefi’eurs Te
font trouvés dans ce cas ; car les cinq millions de
Sixte V. n’exiftent plus. On arrive bientôt après à la
place de S. Pierre, & à i’eglile de même nom, qui
pâlie pour le plus vafte oc le plus iuperbe temple du
monde. Voÿe{ S. Pierre de Rome.
Le palais du Vatican eft tout joignant l’églife de
S. Pierre, êc c’ eft grand, dommage ; car fi l ’églife
étoit ifolée, & qu’on la pût voir de tous côtés en
champ libre, l’effet en leroit bien plus beau. Le Vatican
eft un édifice aulfi vafte qu’irrégulier, V a tic
an .
Ce palais â une bibliothèque magnifique , groffie
par ceile de Heidelberg., & par la bibliothèque du
duc d’Urbin. 11 y a dans cette bibliothèque un volume
de lettres de Henri VIIL à Anne de Boulen ; ilfe-
roit à fôuhaiterque celles de Anne de Boulen à Henri
VlII.yfuffent aufli; car. on eh connoitquelques-unes
qui font admirables.Parmi les manuferits des derniers
liecles , on y trouve quelques lettres que dés cardinaux
s’éçrivoient, & dans, lefquelles ils fe traitoient
de Meffer-Pietro, Meffer-Julio, fans autre cérémonie.
Leur llyle a bien changé depuis ; mais comme
l’article de ,1a bibliothèque du Vatican fe trouve .déjà
fait dans ce Dictionnaire , je fuis difpenfé de plus
grands détails à cet égard. P'oye^ le mot BiBLiOTHL-
QUE.
Près de Péglife de S. Pierre.eft l’hôpital du S. ET
p r it ,l’un des plus beaux de l’Eurooe par fa grandeuf
& par fon revenu. Il y a , dit-on, jufqii’à mille lits
pour les malades , & un prélat qui gouverne toute ia
maifon. G’efl une efpece de mont de piété , oh l’on
porte fon argent en dépôt ; &: comme il y à toujours
quelques millions de fuperflu, l’hôpital en fait profiter
le relai à les rifqucs , & ce profit eft beaucoup
plus que fuffifant pour les déperifes dont l’hôpital eft
chargé;
De l’hôpital du S. Efprit* ùri paffe à l’églife de S.
Onuphre, pli l’on voit le tombeau duTaffe. Un peu
plus loin eft la villa Pamphilla , maifon de phifance
ornée de ftatues & de tableaux, entre lefquels oii
diftingueS. Pierre attaché en croix , & la converfioii
de S. Paul, par Michel-Ange.
En rentrant dans la ville par la porte de S. Pancrace
, on voitliir là route I’églifè des Cordeliers ap-
pelléc San Pietro-Monorio , dont le grand autel eft
embelli d’un tableau de la transfiguration de Notre
Seigneur, par Raphaèl. Du haut cle la montagne où
eft Séin-Pietro-Montorio, & qui fut anciennement le
janicule , on a la vue de toute la ville ; c’ell ici qu’é-
toit le tombeau de Niima Pompilius.
L’églife de Santa-Maria-Tranftevere n’eft pas loin,
& c’ell la première qui ait été bâtie à Rome, au rapport
de Baronius. Elle occupe la place des Tabemce-
Mentorice, où les anciens Romains donnoient tous
les jours la pitance aux foldats eftropiés.
Qn va enfilite Vers l’île de S. Barthélemy ; nommée
anciennement infula fïberina. Elle fe forma
dans :^ lie u - ià , lorfque Tarqtiin le fuperbe eut été-
chalfé de Rome. Comme on arracha les blés qu’il avoit
fait femer autour de Rome, on les jetta dans le Tibre
avec les racines, enloïte que la terre qui y étoit attachée,,
ayant arrêté l’eau clans l’endroit bù elle éfoit
bâtie, la bourbe s’y amaffa infenfiblemènt, 6c il s’en
fit peu-à-peu une île.
On fore de cette île par le pont dé quatre tentés $
nommé , anciennement pons Fabricins, qui la joint
avec la ville j & à main droite eft le pont appelle
pons Sublicius, à l’entrée duquel Horatius .Coclès
loutint lui feul les efforts de l ’ennemi, taridis qu’on
rompoit ce pont derrière lui ; après quoi il fe jetta
dans la riviere, & fe fauva à la nage. Ce pont étoit
alors de bois, & Æmilius le fit faire de pierrei C’eft
de ce pont que l’empereur Héiiogabale fut précipité
dans la riviere avec une pierre au col.1 '
Aufortir du pont, on voit la porte de defriére du
quartier des Juifs, qui demeurent dans un coin de la
v ille , où toutes les nuits on les enfermé à la clé. Ils
n’éprouvent point cette ignominie en Allemagne, en
Angleterre, ni en Hollande. A quelque diftancç de
leurs fynagogues, on voit- à main gauche le palais du
prince Savelli, bâti fur les ruines du théâtre de Mar-
cellus -, qu’Augufte fit élever en l’honneur de fon neveu.
plus loin eft le grand égoût cle Rome, qui fè dé-
chargeclans le Tibre, & qu’oh appelloit Cloaca magna.
f arquinius Prifcus le fit bâtir de pierre détaillé:
Une charrette y peut^aifément entrer, & il y a plufieurs
canaux voûtés par où s’écoulent les immondices.
Cét ouvragé eft un dé “Ceux qui marquent lé
plus, quelle a été la grandeur de la vieille Rome.
Du mont Aventin on-va à la porte de S. Paul, &
on voit en chemin la petite montagne ou colline
qu’on'appelle communément il Dohqlo,! où le monte
Teflaccio, la montagne des pots caffés, nom qui vient
peut.être de la quantité prodigieufe de vafes de terre
qu’on faifoit à Rome'po'ur lés gens de médiocre condition
pendant tout le teins que dura l’ufùgë de brûler
les morts, &c l’on jettoit dans cet endroit-là tous
les débris de ces Valë§'.rr3' ’
En approchant de là porte de S. Paul, on apper-
Çoit le maufolée dé Gaïti^ Cèllius ;'monument 4brt