r e , fur la Swale, capitale du territoire qu*on appelle
Richmond - S/lire, où il y a des mines de plomb ,
'de cuivre 6c de charbon de terre, j^lain le Noir,
comte de Bretagne, fit bâtir le bourg de Richmond,
du tems de Guillaume le Conquérant, qui l’érigea
en comté en fa faveur. Henri VIII. l’ayant érige en
duché en 153 5 , le donna à un de fes fils naturels,
■ qu’il avoit eu d’Elifabeth Blunt. Il eft aujourd’hui
poffédé par les defcendans de Charles de Lén ox, fils
naturel du roi Charles II. à qui ce prince l’avoit donné.
Ce duché eft très-confidérable ; le bourg a droit
d ’envoyer deuxdéputés au parlement. Long. t5. 40.
la t. 64. z S , ( D . J. J
Richemond , ( Gèog, mod.) grand bourg d’Angleterre
dans le Surrey, à 7 milles de Londres. Le
roi y jouit d’une petite & charmante maifon de plai-
fance, décorée d'un parc qui eft enclos de murs , 6c
de jardins en boulingrins de la plus grande beaute.
Qu ’il eft agréable, quand le cancer commence à rougir
des rayons du foleil, de quitter la ville de Londres
enfevelie dans la fumée , 6c de venir refpirer
l ’aimable fraîcheur à Richemond, monter fur une de
fes hauteurs, parcourir d’un coup d’oeil fes plaines
émaillées de mille couleurs tranchantes, 6c paffant
de plaifirs en plaifirs , fe peindre les tréfors de l’automne
à-travers les riches voiles qui femblent vouloir
borner nos regards curieux ! (D . J .)
RICHESSE, f.f. (Philofoph.. morale.) ce mot s’emploie
plus généralement au pluriel ; mais les idées
qu’il préfente à l’efprit varient relativement à l ’application
qu’on en fait. Lorfqu’on s’en fert pour dé-
figner les biens des citoyens , foit acquis, foit patrimoniaux
, il fignifie opulence, terme qui exprime non
la jouiflance, mais la polTefîion d’une infinité de cho-
fes fuperflues, fur un petit nombre de nécefl'aires. On
dit aulîi tous les jours les richejfes d’un royaume , d’une
république , 6*c. 6c alors , l’idée de luxe 6c de fu-
perfluités que nous offroit le mot de richejfes, appliqué
aux biens des citoyens , difparoit : 6c ce terme
ne repréfente plus que le produit de l’induftrie , du
commerce, tant intérieur qu’extérieur, des différens
corps politiques , de l’adminiftration interne 6c externe
des principaux membres qui le conftituent ; &
enfin de Faction limaitanée de plufieurs caufes phyfi-
ques 6c morales qu’il ferait trop long d’indiquer ic i,
mais dont on peut dire que l'effet, quoique lent 6c
infenfible , n’eft pas moins réel.
Il paraît par ce que je viens de dire , qu’on peut
envifager les richejfes fous une infinité de points de
vue différens, de l’obfervation defquels il réfultera
néceffairement des vérités différentes, mais toujours
analogues aux rapports dans lefquels on confidérera
les richejfes.
Cette derniere réflexion conduit à une autre , c’eft
que l’examen, la difcuflion, 6c la lolution des différentes
queftions de politique 6c de morale, tant incidentes
que fondamentales, qüe l’on peut propofer
fur cette matière aufli importante que compliquée 6c
mal éclaircie , doivent faire un des principaux objets
des méditations de l’homme d’état 6c du philo-
fophe. Mais cela feul feroit la matière d’un livre
très-étendu ; 6c dans un ouvrage de la nature de
l’Encyclopédie, on ne doit trouver fur ce fujet que
les principes qui ferviroient de bafe à l’édifice.
Laiffant donc au politique le foin d’expofer ici des
vues neuves, utiles 6c profondes , 6c d’en déduire
quelques conféquences applicables à des cas donnés,
je me bornerai à envifager ici les richejfes en mora-
lifte. Pour cet effet, j’examinerai dans cet article une
queftion à laquelle il ne paraît pas que les Philofo-
phes aient fait jufqu’ici beaucoup d’attention, quoiqu’elle
les intérefle plus directement que les autres
hommes. En effet, il s’agit de favoir i° . fi un des effets
néceflaires des richejjesn'eü. pas de détourner ceux
qui les poffedent de la recherche de la vérité.
i ° . Si elles n’entraînent pas infailliblement après'
elles la corruption des moeurs, en inlpirant du dégoût
ou de l’indifférence pour tout ce qiu n’a point pour
objet la jouiflance des plaifirs des fens, 6c la fatisfac-
tion de mille petites pallions qui aviliffent l’ame , 6c
la privent de toute fon énergie.
30. Enfin, fi un homme riche qui veut vivre bon
6c vertueux, 6c s’élever en même tems à la contemplation
des chofes intellectuelles , 6c à l’inveftigation
des caufes des phénomènes 6c de leurs effets, peut
prendre un parti plus fage 6c plus fur , que d’imiter
l’exemple de Cratès , de Diogene, de Démocrite
6c d’Anaxagore.
Ceux qui auront bien médité l’objet de ces différens
problèmes moraux, s’appercevront fans peine
qu’ils ne font pas aufli faciles à réfoudre qu’ils le pa-
roiffent au premier afpeCt. Plus on les approfondit,
plus on les trouve complexes , 6c plus on lent que
l’on erre dans un labyrinthe inextricable où l’on n’eft
pas toujours fur de trouver le fil d’Ariane, 6c dans
lequel il eft par conféquent facile de s’égarer.
Nec preme, nec fummum molire per ouhera currum,
Aldus egrejfus, cale (lia tecta, cremabis ;
Inferiiis , terras : medio tutijjimus ibis.
Neu te dexterior prejfam rota ducat ad aram :
Inter utrumque tene.
Ovide , métamorph. lib. II. 85. v. 134. &fiqq.
Ainfi pour traiter ces queftions avec cette fage impartialité
, qui doit être la caraCtériftique de ceux qui
cherchent fincérement la vérité, je ne ferai dans cet
article que préfenter Amplement à mes lecteurs tout
ce crue la fageffe humaine la plus fublime 6c la plus
réfléchie a penfé dans tous les tems fur cette matière
: me réfiervant la liberté d’y joindre quelquefois
mes propres réflexions dans l’ordre où elles fe pré-
fenteront à mon efprit.
Je commence par une remarque qui me paraît efl-
fentielle : c’eft que les anciens philofophes ne
croyoient point que les richejfes confédérées en elles-
mêmes , 6c abftraction faite de l’abus 6c du mauvais
ufage qu’on en pouvoit faire , fuffent néceffairement
incompatibles avec la vertu 6c la fageffe : ils étoient
trop éclairés pour ne pas voir qu’envifagées ainfi mé-
taphyfiquement, elles font une chofe abfolument indifférente
; mais ils favoient aufli que, comme on
s’écarte infailliblement de la vérité, dans les recherches
morales, lorfqu’on ne veut voir que l’homme
abftrait, on court également rifque de s’égarer, lorfqu’on
fait les mêmes fuppofitions à l’égard des êtres
phyfiques 6c moraux qui l’environnent, & qui ont
avec lui des rapports conftans, déterminés 6c établis
par la nature des chofes. Aufli enfeignent-ils conf-
tamment que les richejfes pouvant être 6c étant en
effet dans une infinité de circonftances, 6c pour la
plupart des hommes, un obftacle puiffant à la pratique
des vertus morales, à leur progrès dans la recherche
de la vérité, 6c un poids qui les empêche de
s’élever au plus haut degré de connoiffance 6c de perfection
où l’homme puiffe arriver, le plus fur eft de
renoncer à ces poffefiions dangereufes, q u i, multipliant
fans ceffe les occafions de chute , par la facilité
qu’elles donnent de fatisfaire une multitude de
pallions déréglées, détournent enfin ceux qui y font
attachés de la route du bien 6c du defir de connoître
la vérité.
C’eft ce que Séneque fait entendre affez clairement,
lorfqu’il dit que les richejfes ont été pour une infinité
de perfonnes un grand obftacle à la philofophie, 6c
que pour jouir de la liberté d’efprit néceffaire à l’étude
, il faut être pauvre, ou v ivre comme les pauvres.
« Tout homme , ajoute-t-il, qui voudra mener
» une vie douce, tranquille 6c affurée, doit fuir le
» plus
#> plus qu’il luifera pofîiblèces biensfauxSi trompeurs,
» à l’appas defquels nous nous laiflbns prendre com-
» me a .un trébuchet, fans pouvoir enfuite nous en
» détacher-, en cela d’autant plus malheureux, que
» nous, croyons, les pofféder, 6c qu’au contraire ;ce
» font eux qui nous poffedent; 6c qui nous tiranni-
» fent ». Multi ad phUofophanduin objiflere divitia :
patipertas expedita eftfecura e j l . , . .. Ji vis vacare aniu
rno aüt paît per fis oportet.., aut p'auperi fimilis. Non
poiéjlJiüdium falutdrefitri fine fugalitatis cura : frugalitas
autem_, paupérias volftntaria e jl............. Munera
ijla fortunçe. putatis ? Injidïae f uni, Quifquis^nojirum
tutam agere vitam volet, quaràum plurirnum potejl, iJla
yijcata bénéficia devint : inquibus hoc quoque rnijcri-
mi fallimur, habere nos putamus, habetnur. Séneq. epifl,
ty. & epif. 8 ^ ' \
On ne peut gùere douter de la,certitude de ces
maximes, lorfqu’on voit des philofophes tels que Démocrite
6c Anaxagore abandonner leurs biens., &
réfigner.topt, leur patrimoine à leurs parens , pour
s’appliquer tout entiers à la recherche de la. vérité
6c à la pratique de la vertu.
S prévit A naX agoras , f prévit DemocfitiiS, ûtque
Coniplures alii ( Quorum fipUütia toti efl
Nota orbi ) ârgftlum atqut aurttm , CAU S AS QU È
M A LO R VM
D i v i T tA S . Quare ? Niji quod non vira putatunt
Eff e boita htêc , animum qute curis impediunt, &
In mala pràtcipitant quam plurirna. Ça)
Il eft affez ..difficile , ce me femble , de ne pas fe
laiffer entraîner par de fi grands exemples, 6c de
nier que les rickeffes ne foient infiniment plus nuifi-
bles qu’utiles , quand d’un autre côté on voit Séneque
peindre avec des traits, de feu les maux affreux
qu’elles caufent néceffairement à .la fociété , 6c les
crimes que la foif de l’or fait commettre. Circàpecuniam
, dit-il , plurirnum vocifirationis efl ; hoec, fora
defatigat , patres, liberofque committit, venena mifcet,
gladios tam percuf 'oribus quam hgionibus tradit. Hac
efl fanguine noflro dehbuta. Propter ha ne uxorum ma-
ritoriimque nocles Jirepunt l i t ib u s & tribunalia magif
tratuüm premit turba : reges J.eviuni 5 rapiuntque , &
civil aies longofceculorum labore conflrüclds tveitunt, ut
aurum argenturnque in cinere urbium ferutentur. Sériée.
de ira, lib. III. cap. xxxij. circa fin.
■ « Depuis que les rickeffeSydit-ilailleurs, ont com-
» mence à être en honneur parmi les hommes , 6c à
.» devenir en quelque forte la mefiire de la confide-*
» ration publique ,le goût des chofes Vraiment bel-
. » les 6c honnêtes s’eft entièrement perdu. Nous lom-
» mes tous devenus marchands , 6c tellement cor-
» rompus par l’argent, que nous demandons , non
» point ce qu’ eft une chofe en elle-même , mais dé
» quel rapport elle eft. Se préfente-t-il une occafion
» d’amafler des ricin f e s , nous fommes tour-à-tour
» gens de bien ou fripons, félon que notre intérêt
» 6c les circonftances l’exigent. Nous faifons le bien,
» & nous pratiquons la juftice tant que nous efpé-
» rons trouver quelque profit detns Cette conduite,
>• tout prêts à prendre le parti contraire fi nous
» croyons gagner davantage à commettre, un crime.
» Enfin les moeurs-fe font détériorées au point que
» l’on maudit la pauvreté , qu’on la regarde comme
» un deshonneur 6c une infamie , en un mot qu’elle
» eft l’objet du mépris des riches 6c de la haine des
» pauvres ». Çb)
(■ ) Palingen."Zodiac, vira , lib. II. vf. 442 ; 6* ftqq, édit.
Rotterd. ann. 1711. Voyez aufli Platon ,'îj hipp. major, pag.
i8j. A.B. tom. IJl. édit. Hent.Steph. ann. 1578 ; & Plutarque,
vie de Periclès , pàg. 16*. B. C. tom. J. édit. Paris, ann. 16*4.
(b) Qute (pecunià) ex quo in honore effe cépii, vents rerum -ho-
nor cecidit,: mercaioref<jit*& vénales invicem faüi, qutznmus, non
quai Jh quidque , fed quanti. Ad mercedem pii fumus , ad merce-
dtm impii Honefia , quamdiu aliqua illis fpes inefi, fequimur: in
Tonte X IF , ■
,Ce lie font point ici des idées vagttês 6c jettées dit
hafard , ni de vaines déclamations , où l’imagiriatiOrt
agit fans ceffe. aux dépens de la réalité, mais des faits
confirmés par une expérience continuelle , 6c qtiô
chacun peut, pour ainfi dire , toucher par tous feS
fens., Aufli' le même philofophe ne craint-i! pas d’ar*
vancer que les richejfes font la principale fource-deS
malheurs'du genre humain , & que tous les , maux
auxquels les hommes font fujets , comme, là mort *
les maladies, la douleur, &c. ne font rien en Corn*
payaifon de ceux que leur caufent les richèffes. Tran-
feamus adpatrunonia , maxiniam humanàrum arumna-
rum mate riant, Namfi.pmnia alla quibus angimur, com*
pares , mortes, oegrotationes, rnetus, dejideria, dotorum
laborumque patienùam , cum iis quee nobis mala pecu-
nia nojlra exhibet } heee pars ■ multum proegrayabit*
Senec. ^t: tranquill. animi, cap.viij. init. Il s’exprime
encore avec plus de force dans fa 115. lettre.
« De continuelles inquiétudes , dit-il , rongent 6t
» dévorent les riches à proportion des biens qu’ils
» poffedent. La peine qu’il y a à gagner du bien eft
» beaucoup moindre que celle qui vient de la pof*
» feflion même. Tout le monde regarde les riches
» comme des gens heureux ; tout le monde vou-*
» droit être à leur place , je l’avoue : mais quelle
» erreur! Eft-il de condition pire que d’être fans
» ceffe en butte à la mifere 6c à l’envie ? Plût aux -
» dieux que ceux qui recherchent les richejfes avec
» tant d’empreffement interrogeaffent les riches fur1
» leur fo r t , certainement ils cefferoient bientôt de
» defirer les richejjes » ! Adjice quotidianas follicitu*
dînes , que pro modo habendi quemque difcruciant. Ma*
jore tormento pecunia pojjidetur, quam quetritur , . . , »
At felicem ilium homines, 6* divitem vocant, & confe-
qui optant, quantum ille pofjidet. Fateor. Quid ergo A
Tu ullos effe cpndiàonis pejoris exijlimas, quam qui hachent
& miferiam & invidiam ? Utinam qui divitias ap-*■
petituri ejfent cum divitibus deliberarent Profeclo
vota mutajfent. (c)
Que l’on faffe réflexion que celui qui parle dans
ces paffages.eft un philofophe qui poffédoit des biens
immenfes, innurrerampecuniam t comme il le cl t lui-
même dans T ac ite, annal, lib. X IF . (ap. h 'j. 6c i’on
fentira alors de quel poids tin pareil aveu doit être
dans fa bouche.
Mais confultons , fi l’on veut, d’autres autorités î
voyons ce que les auteurs les plus graves 6c les plus
judicieux ont pente de l’influence des richejfes fur les
moeurs, 6c des avantages de la pauvreté. Ce n’ eft
» pas , difoit Diogene , pour avoir de quoi vivre
» Amplement, avec des herbages 6c des fruits, qu’on
» cherche à s’emparer du gouvernement d’un état,
» qu’on faccage des v illes, qu’on fait la guerre aux
» etrangers, ou même à fes concitoyens ; mais pouf
» manger des viandes exqiufes 6c pour couvrir fa
» table de mets délicieux ». Diogenes tyrannos, &
fubverfores urbium bellaque vel hojlilia, veïcivilia , iiori
profimpli ci viclu 0 I f uni pomorumque ,fed pro carnium
& epulafum délie iis , adferit excitari. Diogen. apud
Hieronym. adv. Jovinian. lib. II. pag. yy. A. tom. i l «
edit. B.ajèl. - {
Juftin faifant la defeription des moeurs des anciens
feythes , dit qu’ils méprifent l’or 6c l’argent , autant
que les autres hommes en font paflionnés , 6c que
c’eft au mépris qu’ils font de ces vils métaux, ainfi
qu’à leur ifianiere de vivre fimple 6c frugale, qu’il
faut attribuer l’innocence & la pureté de leurs
moeurs f parce que ne connoiffant point lès richejfes,
contrarium trdnfituri, fi plus feeltra prominent. . . . . denique eà
mores redaÛi Junt, ut paupertas màlediflo probroquefit, contempla
divitibus y invifa pàuperibus. Senec. èfift‘ 11S *
(c) Voye* encore fa xiv. lettre vers la fin, ou il rapporte
une fort bonne pen fée d’EpiCure ; & joignez y deux beau*
fragmens de Philemon, qui fe trouvent dans le recueil de le
Clerc, mm. }p & 38, pag. 352, édit. Amfiel. *709.
M m