on la verfe peu-à-peu dans un autre vaiffeau fans
verler la l i e 8 c on la met pendant quelques jours à
l’écart. La lie plus fine d’un rougefoncé 8c fort brillante
fie fépare peu-à-peu delà liqueur, 8c va au fond
du vaiffeau : on verfie la liqueur dans d’autres vail-
fieaux ; & lorfique la lie qui refie dans ces vaiffeaux,
après en avoir verfé l?eau, eft parfaitement feche, on
la frotte avec une dent d’or. De cette maniéré on la
rend plus compare', afin que le vent ne la diflipe
point lorfqu’elle eft en fine poumere. Le gros rouge
fie fait de cinabre minéral bien broyé avec l’eau-de-
vie ÔC l’urine, 8c enfuite féché.
- Il n’y a pas long-rems que le beau fiexe de ce pays
a mis en vogue l’art barbare de fie peindre les joues
de ce roüge éclatant. Une nation voifine chez qui les
réglés de cet art ne font pas de fon inftitution > ne fie
fort encore de rouge que pour tromper agréablement,
8c polir'pouvoir le flatter de n’en être pas foupçôn-
nc ; mais qui peut répondre que le beau fiexe de ce
peuple né mette du rouge dans la fuite par mode 8c
par ufage jufqu’à réjouir ou à effrayer, quoiqu’ac-
tuellement le peu de rouge dont quelques-unes'des
dames-dü pays fie parent en fiecret, ne foit parvenu
au degré de pôuvoir fupprimer l’apparence de ce
rouge charmant qui decele les premières1 foibleffes du
coeur?
Eft-ce pour réparer les injures du tems , rétablir
fur le vifage une beauté chancelante, 8c fe flatter de
redefcendre jufqu’à la jeuneffe, que nos damés mettent
du rouge flamboyant ? Eft-ce dans l’efpoir de
mieux féduire qu’elles emploient cet artifice que la
nature defavoue ? Il me femble que ce n’eft pas un
moyen propre à flatter les yeux que d’arborer un
vermillon terrible, parce qu’on ne flatte point un organe
en le déchirant. Mais, qu’il eft difficile de s’affranchir
de la tyrannie de la mode ! La préfence du
gros rouge jaunit tout cequi l’environne. On fie réfout
donc à être jaune, 8c aflûrément ce n’eft pas la couleur
d’une belle peau. Mais d’un autre cô té, fi l’on
renonce à ce rouge éclatant, il faudra donc paroître
pâle. C ’eft une cruelle alternative , car on veut mettre
abfolument du rouge de quelque efpece qu’il foit,
pâle ou flamboyant. On ne fe contente pas d’en ufer
lorfque les rofes du vifage font flétries, on le prend
même au fiortir de l’enfance. Cependant, malgré
l’empire de la coutume, je penfe comme Plaute, 8c
je répondrois comme lui à une jeune 8c jolie femme
qui voudroit mettre du rouge : « Je ne vous en donne-
» rai point, vous êtes à merveille, 8c vous iriez bar-
» bouiller d’une peinture groffiere l’ouvrage le plus
» beau 8c le plus délicat du monde : ne faites point
» cette folie , vous ne pouvez employer aucun fard
» qui ne gâte 8c n’altere promptement la beauté de
» votre teint ». Non dabo purpuriffum, fcita tu qui-
dcm es ; vis nova piclurâ interpolare opus lepidifjîmum.
Ntillum pigrnentum débet attingere faciem , ne detur-
petur.
Après tou t, je-ne ferois pas fâché que quelqu’un
plus éclairé que je ne le fuis, nous fît une hiftoire du
rouge , nous apprît comment il s’introduifit chez les
Grecs 8c les Romains , par quelle raifon il fut l’indice
d’une mauvaife conduite, par quelle tranfition
il vint à paffer au théâtre , & à dominer tellement
que chacun jufqu’à Polyphème en mit pour s’embellir
; enfin comment il eft depuis affez long-tems parmi
nous une des marques du rang ou de la fortune. WmÊM ■ , . ROUGE de carmin ou Carmin , ( Chimie & Peint)
c’ eft ainfi que l’on nomme une couleur ou fécule
d’un beau rouge très-vif tirant fur le cramoifi. On a déjà
parlé de cette couleur à l’<zrr. Carmin ; mais comme
elle n’y a été décrite que très-imparfaitement, on a
cru devoir y fiippléer ici.
y o jc i le procédé fuivant lequel on peut faire le
carmin avec fuccès. On prend 5 gros de cochenille
un demi gros, de graine de chpuan , 18 grains
d’écorce d’autour, 18 grains d’alun, 8c 5 livres d’eau
de pluie/; on commencera par faire bouillir l’eau,
alors on y jettera la graine de chouan, on lui laiffera
faire cinq ou fix bouillons, après quoi on filtrera la
liqueur. On la remettra fur le feu ; lorfqu’ellé aura
bouilli de nouveau, on y mettra la cochenille ; après
qu’elle aura fait environ quatre ou cinq bouillons
on. y joindra l’écorce d’autour 8c l’alun. On filtrera
de nouveau.la liqueur ; au bout de quelque tems, le
carmin fous la forme d’une fécule rougeiè précipitera
au fond du vaiffeau où l’on aura mis la liqueur filtrée
; les dofes indiquées en donneront environ deux
fcrupules. On décantera la liqueur qui furnagera, 8c
on fera fécher la couleur rouge au foleil.,
Lorfqu’on voudra faire le rouge que les femmes
emploient pour fe.farder ,.on pulvérifera l’ efpece de
talc, connu en France fous le nom dé craie de Briançon.,,
Lorfqu’elle aufa été réduite en une poudre très-
fine , ori y joindra du rouge de carmin à proportion
de la. vivacité que l’on voudra donner à la couleur
du rouge, 8c l’on triturera foigneufement ce mélange
qui peut être appliqué fur la peau fans aucun danger.
La cherté du carmin fait que fouvént on lui fiibfti-
tue du cinabre que l’on mêle avec le talc.
Rouge de Corroyeur, ( Teint. ) il fe fait avec dit
bois de Bréfil, dont il faut deux livres fur deux ficeaux
d’eau, à quoi l’on ajoute de la chaux, quand il eft
raifionnablementéboulli. (D .J .')
Rouge ou Ro se t t e , encre d’imprimerie , pour
imprimer en rouge. Voye^ Encre.
ROUGE, (Maréchal.) un cheval rouge, èft un cheval1
bai très-vif. Ce terme n’ eft plus en ufage. Gris-
rouge. Voyei Gris.
R.OUGE, (Peinture!) très-beau pour le lavis. Rédui-
fez en poudre fubtile ce que vous voudrez de cochenille
, verfez-la dans un vaiffeau où vous ayez mis de
l’eau-r.ofe affez pour furpaffer de deux doigts cette
poudre ; jettez enfuite de l’alun brûlé, 8c pulvérifé
encore tout chaud dans de l’eau de plantin , dans laquelle
vous mêlerez la liqueur qui aura fervi à dif-
loudre la cochenille, 8c vous aurez un très-beau
rouge, qui vaut mieux que le vermillon pour le lavis
; parce que le vermillon a trop de corps, 8c qu’il
fe ternit à caufie du mercure dont il eft.compofé.
R ouge d’In d e , (Teint) ou terre de Per fe, qu’on
appelle auffi , quoique très -improprement, rouge
d\Angleterre. C’ eft une ochre rouge , allez friable 8c
très-haute en couleur , q u i, bien broyée 8c réduite
en poudre impalpable, fait un affez beau rouge. On
tire cette ochre de fille d’Ormus, dans le golfe perfi-
que. Le rouge d’inde ne s’emploie guere que par les
Cordonniers , qui s’en fervent pour rougir les talons
des fouliers qu’ils fon t, en le détrempant avec du
blanc-d’oeuf. ( D . J.')
R ouge , ( Teint ) c’eft une des cinq couleurs Amples
8c matrices des Teinturiers.
Il y a deux efpeces de rouge ; l’une dont le jaune
eft le premier degre, 8c qui par le rapprochement
de fies parties augmentant peu-à-peu de teinte, 8c
paffant par l’orangé devient couleur de feu , qui eft
l’extrême de la concentration du jaune. Le minium,
le précipité rouge, le cinabre en font des exemples
que la Chimie nous fournit. L’autre rouge part de
l’incarnat ou couleur de chair, 8c paffe au cramoifi
qui eft le premier terme de fa concentration ; car en
rapprochant davantage fes particules colorantes, on
le conduit par degrés jufqu’au pourpre. L’encre fym-
phatique bien çjépurée prend fur le feu toutes ces
nuances. Le rouge qui a une origine jaune ne prendra
jamais Je cramoifi, fi l’on n’a pas ôté ce jaune qui le
fait de la claffe des couleurs de feu ; de même le
rouge dont la première teinte eft incarnate , ne de-
Viendra jamais Couleur de feu , fi on n’y ajoute pas le
jaune.
Cependant les Teinturiers diftinguent fept fortes
de rouge dans le grand teint ; favoir , j p. l’écarlate
des Gobelins ; z°. le rouge cramoifi ; 3 °. le rouge de
garance4 40. le rouge de demi-graine ; 50. le rouge
demi-cramoifi ; 6°. le nacarat de bourre ; 70. l’écarlate
façon de Hollande. Le vermillon, la cochenille
& la garance font les drogues principales qui pro-
duifent ces diverfes efpeces de rouge.
L’écarlate des Gobelins fe fait.avec de l’agaric,
des eaux fiîres, du paftel 8c de la graine d’écarlate
ou de vermillon. Quelques Teinturiers y ajoutent
de la cochenille. Le rouge cramoifi fe fait avec les
eaux fûres, le tartre 8c la fine cochenille. Le rouge
de garance le fait avec la garance de Flandre. Le
rouge de mi-graine fe fait avec les eaux fûres, l’agaric,
moitié graine d’écarlate 8c moitié garance. Le demi-
cramoifi fe fait avec moitié garance 8c moitié cochenille.
Le nacarat de bourre • exige que l’étoffe foit
auparavant mile en; jaune ; enfuite le nacarat fie fait
avec le bain de la bourre qui a été ébrouée fur un.
bouillon avec des cendres gravelées. L’écarlate façon
d’Hollande fe fait avec la cochenille, le tartre
8c l’amidon , après avoir bouilli avec de l’alun, du
tartre, du fiel gemme 8c de l’eau-forte où l’étain a été
diffous ; mais cette couleur, quoique des plus éclatantes
, fe rofe 8c fe tache aifément.
Entre ces fortes de rouges, il n’y en a que trois qui
ayent des nuances ; favoir le rouge cramoifi, le nacarat
de bourre , & l’écarlate, de Hollande.
Les nuances du rouge de garance font couleur de
chair, peau d’oignon, fiamette, ginjolin. Celles du
cramoifi font fleur de pommier , couleur de chair ,
fleur de pêcher, couleur de rofe incarnadin , incar-
nat-rofe, incarnat 8c rouge cramoifi. Les nuances de
la bourre font les mêmes que celles du rouge cramoifi.
L’écarlate, outre celles du cramoifi 8c de la
bourre, a encore pour nuances particulières la couleur
de cerife, le nacarat, le ponceau, & la couleur
de feu.
Quant au rouge de Bréfil, c’eft une fauffe teinture
que n’employent point les Teinturiers du bon teint.
Savary. Hellot. ( D . J )
. Rouge d’Angleterre, chéries Vergettiers, eft
une efpece de peau de couleur rouge qu’ôn tire
d’Angleterre, & dont ils fe fervent pour couvrir le
dos ou la poignée des broffes. On n’en emploie
prefque plus, parce qu’on en fait à Paris de meilleur.
R o u g e , (Art de la Verrerie) Néri a décrit la maniéré
de donner au verre un rouge tranfpàrent ; &
comme fon procédé réuffit , je vais le tranferire.
Prenez, dit-il, de la magnéfie de Piémont réduite en
une poudre impalpable ; mêlez-la à quantité égale
de nitre purifié ; mettez ce mélange à calciner au
feu de reverbere pendant vingt-quatre heures ; ôtez-
le enfuite.; édulcorez-le dans de l’eau chaude, &
faites-le fecher, après en avoir fiéparé le fiel par
les lotions : cette matière fera d’une couleur rouge ;■
ajoutez-y une quantité égale de fiel ammoniac ; hu-
meftez le tout avec du vinaigre diftillé ; broyez-le
fur le porphyre, &: le faites fécher. Mettez-enfuite
ce mélangé dans une cornue qui ait un gros ventre
& un long col, &; donnez pendant douze heures
un feu de fable & de fublimation ; rompez alors
la cornue; mêlez ce qui fera fublimé, & ce qui
fera refté au fond de la cornue; pefez la matière
oc ajoutez - y , de fel ammoniac, le poids qui en eft
parti par la fiublknation ; broyez le tout comme auparavant
: après, l’avoir imbibé de vinaigre diftillé ,
remettez-le à fubli mer dans une cornue de la même
efpece ; réitérez la même chofe. jufqu’à ce que la
magnéfie demeure fondue au fond de la cornue.
Tome X IV%
Cette eompofition donne an cryftal & aux pâtes un
rouge tranfparent femblable à celui du rubis ; on en
met vingt onces fur une de cryftal ou de verre; on
peut cependant augmenter ou diminuer la dofè félon
que la couleur femblera l’exiger.
Le même Neri indique les procédés pour donner
au verre la couleur d’un ratq'ï-fanguin. ôc celle de
rubis-balais; mais il feroit trojf long.d’entrer dans
ces détails. (D . J )
RoÛge, (GloJJ. franç) L’ufagé de l’écarlate af-
fefté aux plus eminens perfonnages, tant dans la
guerre que dans les lettrés; le privilege de porter la
couleur rouge, refervé aux chevaliers & aux docteurs,
introduifit probablement dans notre langue ,
le mot rouge, pour fier, hautain, arrogant ; furtout
lorfqu’on vit Artérella, chef des Gaulois révoltés Sc
vi&orieux, fç revêtir de fanguines-robes & dû écarlate.
Dans l’ouvrage en vers.intitulé, l’Amant rendu
cordeüer, on li t , les plus rouges y font pris, pour dire
les plus glorieux ; Brantôme s’eft encore fervi de ce
mot dans le même fens, en parlant de l’affaire «des
Suiffes à Novarre contre M. de la Freinville ^ qui
fut un grand exploit 8c un grand heur- d e guerre,
dont ils vinrent fi rouges 8c fi infolens, qu’ils mépri- ■
foient toutes nations , 8c penfoient battre tout le
monde. Cette acception du mot rouge en a formé une
autre par une legere tranfpofition de lettres ; rogne
au-lièu de rouge, eft mis pour arrogance, vanité, info-
lence. Sainte-.Palaye. (D . J )
R ouge m e r , grand golfe de l’Océan qui fépare
l’Egypte 8c une partie de l’Afrique de l’Arabie.
« A l’extrémité de la mer Rouge, cette fameufe
» langue de terre qu’on appelle Yijlhme de S u e qui
» fait une barrière aux eaux de la mer R-'uge,^ em-
» pêche la communication de la Méditerranée avec
» l’Océan. On peut croire que la mer Rouge eft plus
» élevée que la Méditerranée; 8c que fi on coupoit
» l’ifthme de Suez, il pourroit s’en luivre une inon-
» dation 8c une augmentation de la Méditerranée.
» Quand même on ne voudroit pas convenir que la
» mer Rouge fût plus élevée que la Méditerranée,'on.
» ne pourra pas nier qu’il n’y ait aucun flux 8c re-
» flux dans cette partie de la Méditerranée voifine
» des bouches du Nil ; 8c qu’au contrairé il y a dans
» la mer Rouge un flux 8c reflux très-confidérable, ôc
» qui éleve les eaux d.e plufieurs piés, ce qui feul
» fuffiroit pour faire paffer une grande quantité
» d’eau dans la Méditerranée, fi l’ifthme étoit rom-
» pu. D’ailleurs, nous avons un exemple cité à ce
» lujet par Varenius, qui .prouve que les mers ne
» font pas également élevées dans toutes leurs par-
» ties. Voici ce qu’il en dit, 100 de fa géographie.-
» O ce anus germant eus, qui ejl Atlantici pars, inter Fri-
» Jiam & Hollandiam fe effundens , efjicit Jinum qui ,
» etfi refpeclu celebrium finuum maris , tamen & ipfe
» dïcitur mare , alluitque HoUandict emporium■ cele-
» berrimum, Amflelodamum. Non procàl ind'e abejl la-
» eus harlemenfis, qui etiam mare harlemenfe dicitur.
» Hujus altitudo non ejl minor altitudine Jînûs illius
» belgici, quern diximus, & mittit ramum ad urbem Lei-
» dam, ubi in varias foffas divaricatur. Quoniam ita-
» que nec lacus hic, neque finus ille hollandici maris
» inundant adjacentes agros (de naturali confiitutione
» loquor , non ubi tempejlatibus urgentur, prop ter quas
» aggeresfacïi funt') patet ind'e quàd non fint altiores
» quàm agri Hollandice. At verb Occanum germanicum
» effe altiorem quàm terras hafee txperti funt Leiden)es,
» cùm fufeepiflent fofjam feu alveum ex urbe fiia ad
» Oceani germanici littora prope Cattorum vicum per-,
» ducere ( dtjlanùa efl duorum milliarium ) ut, reçepto
» per alveum hune mari , pojfent navigationem infli-
\ » tuere in Oceanum germanicum, & hinc in varias ter-
» rte regiones. Virum enim verb càm magnam jam alvei
»pattern perfeciffent, dejîflere coach fuu t, quoniam
E e e ij