propriétés communes à ces trois daffes j on trouvé
que les fels font des corps folubles dans l’eau, incom-
buftibles par eux-mêmes, 6c favoureux ; il faut bien
fe défendre d’appeller f i l tout ce qui fe cryftallife,
fans quoi nous confondrions plulieurs corps tres-dif-
férens entre eux.
Les fils font répandus dans les trois régnés de la
nature , l’opinion commune des chimiftes eft même
que l’air porte avec lui l’acide vitriolique ; il eft au-
moins bien fur qu’il peut fe charger d’un très-grand
nombre de fels ; ceux qu’il peut diffoudre font ap-
pelles volatils, ceux au-contraire qu’il ne peut enlever
, font nommés fixes ; tous les acides , les alkalis
volatils, 6c quelques fils neutres, fpécialement ceux
qui font formés par l’union du f i l ammoniac avec
les différens métaux, font volatils ; mais le plus grand
nombre eft fixe. .
Indépendamment des fils que la nature fournit, il
en eft une foule que l’art feul peut produire , &: il
imite la nature dans la formation de prefque tous les
fils neutres. ; .
Les fils font, comme nous, l’avons vu , acides ,
alkalins , ou neutres ; leur nature 6c leurs propriétés
different par-là eflèntiellement ; chaque efpece
fournira une claffe particulière. Après avoir examiné
les propriétés communes à tous les fels, nous parcourrons
fucceflivement celles qui le font aux claf-
fes , aux ordres , 6c aux genres.
Claffe I. Les acides. Les acides étant vraisemblablement
la bafe de tous les autres fils , meritoient
d’être traités les premiers ; l’opinion la plus reçue eft
ue les alkalis ne font que des acides combinés avec
’autres principes ; ce fentiment a pour lui la raifon
6c l’experience. La raifon dit que la nature choifit
toujours les voies les plus fimples , 6c que l’ affinité
des acides & des alkalis, l’avidite avec laquelle ils
s’uniffent, eft l’effet de l’analogie ; l’expérience fait
voir dans le régné végétal, quand il pafle par tous
les degrés de la maturité 6c de la fermentation, les
acides fe perdre , fe changer en alkalis, 6c redevenir
enfuite acides.
Leurs propriétés communes font d’être les menf-
trues d’un grand nombres de corps, 6c en s’unifiant
avec la plupart, de former des fils neutres ; leur faveur
eft fi forte , que pour peu qu’ils foient concentrés
, ils font corrofifs ; ils font tous folubles dans
Pair, c’eft-à-dire volatils, plus ou moins fuivant la
'quantité de phlogiftique qui entre dans leur combi-
naifon ; ainfi l’acide vitriolique que nous foupçon-
rions en contenir le moins , eft le plus difficile à s’élever
dans la diftillation ; il faut que le feu foit pouffe
au dernier degré , pour que l’huile glaciale s’élève ;
ils font folubles dans l’eau,plus ou moins dans la proportion
oppofée à la précédente : ainfi l’acide vitriolique
que nous avons dit contenir le moins de phlogiftique
, s’unit avec Une facilité étonnante à l’eau ;
6c tandis que les autres , expofés à l’air, perdent une
partie de leur poids , il augmente le fien aux dépens
de fa force, en fe mêlant avec l’ eau ; la rapidité avec
laquelle il s’unit, s’il eft concentré, caule un fiffle-
ment, un bouillonnement, excite la chaleur , en un
mot produit une efpece d’effervefcence ; les acides
.s’uniffent avec les huiles graffes 6c effentielles , ils
forment avec elles des favons peu connus. S’ils font
concentrés en les mêlant, par une certaine manipulation
avec ces huiles , fur-tout fi elles.font effentielles
pefantes,Peffervefcence eft fi vive que la flamme
naît du milieu. Unis aux efprits vineux, ils forment
des nouveaux mixtes, connus depuis peu, qui n’exif-
tent nulle part dans la nature, qui ont des prpprietés
fingulieres qu’on nomme czthers ; ils produifent une
effervefcence , étant mêlés avec les alkalis , ils dif-
folvent tous les métaux : mais quoiqu’il n’y ait aucun
métal qui ne puiffe être diffous par un acide, au-
Cun d’eux n’a la propriété de les diffoudre tous. Ils
diffolvent aufli les terres , les calculs des animaux ;
avec les alkalis, les métaux 6c les terres, ils forment
des fils neutres. On oBfervera à ce fujet, que différens
degrés de concentration font neceffaires pour
les différentes diffolutioris ; il en eft des acides, con-
fiderés comme menftrues , de même que de l’efprit
de v in , qui diffout, étant foible, quelques gommes-
réfines, qu’il n’ eût point pu diffoudre s’il eût été rectifié.
Il feroit à fouhaiter que ce fait certain fut embelli
par un grand nombre d’expériences , qui pour-
roient donner lieu à une réglé générale ; ils rougif-
fent le firop violât 6c le papier bleu, il n’eft aucun
bleu végétal à l’abri de leur impreflion ; ils décom-
pofent le lait des animaux , & celui qu’on tire des
lemences huileufes végétales , 'pour en faire des
émulfions.
L’affinité des acides eft plus grande avec le phlogiftique
, qu’avec tout autre corps ; avec les alkalis
fixes , qu’avec les volatils ; avec ceux-ci, qu’avec
les terres abforbantes ; 6c enfin avec ces dernieres ,
plus qu’avec les fubftances métalliques. Ces affinités
établies par M. Geoffroi, font fujettes à quelques
exceptions à la réglé générale ; quelques terres abforbantes
, 6c des métaux mêmes , pouvant décom-
pofer le f i l ammoniac , & le fer-ayant la vertu de
décompofer l’alun.
Les trois acides minéraux font des foufres ; voye^
les art. part, l’acide microcofmique en fait un, lé
phofphore de Kunkel. Voye^ M i c r o c o s m iq u e ,
A c i d e 6* P h o s p h o r e .
Non-feulement les acides ne peuvent point fe cryf-
tallifer, mais encore on ne peut les réduire en une
maffe folide , comme on te fait des alkalis fixes ; le
feul acide vitriolique, moins volatil que les autres,
peut, 6c encore ce n’eft qu’avec beaucoup de travail
, prendre une forme épaiffe, ce qui eft l’effet de
leur grande affinité avec l’eau ; ils fe faififfent de toutes
les vapeurs aqueufes, 6c fe mêlant avec elles, ils
confervent leur fluidité ; nous défendons ce-fenti-
ment contre M. Marcgraf, qui prétend que l’acide
animal fe cryftallife, parce que nous ne regardons
point cet acide, comme un acide pur, mais comme
un f i l neutre microcofmique ; le tems 6c les expériences
dévoileront ce problème.
Ces acides qui s’uniffent avec tant d’ardeur & fi
étroitement à l’eau, qu’on ne peut jamais les en priver
qu’à un certain degré, perdent la plus grande partie
de cette affinité, lorfqu’ils font unis aux alkalis
fixes, quoique ceux-ci tombent en défaillance à l’air,
c’eft-à-dire fe chargent de fon humidité au point de
devenir fluides ; il arrive ainfi que ces deux corps
perdent l’un par l’autre une propriété qui leur étoit
commune.
On les retire de l’eau, de l’air, des trois régnés
de la nature , 6c des fils neutres fa&ices ; le régna
minéral, l’eau 6c l’air, fourniffent en grande quantité
l’acide vitriolique, le marin & le nitreux ; l’opinion
reçue eft que ce dernier vient des végétaux
qui reçoivent en croiffant l’acide vitriolique de la
terre , & le dénaturent pour former le nitreux, qu’ils
rendent à la terre en fe pourriffant ; le régné végétal
fournit les quatre genres d’acides ; le vitriolique fe
trouve dans les citrons , 6c femblables fruits ; le nitreux
dans un grand nombre de plantes , fur-tout
dans les chicoracées 6c les borraginées, ou afperifo-
lia de Raj. l’acide marin eft évident dans les plantes
maritimes ; 6c l’acide végétal dans toutes les parties
des plantes qui ont fubi une fermentation acide, peut-
être même dans un grand nombre avant leur maturité
; ce qui nous conduit à une reflexion importante :
ç’eft qu’on ne connoit point précifément la nature de
‘l’acide des raifins avant leur maturité, du verjus, on
ne fait point fi c’eft comme nous le foupçonnons un
acide vitriolique, qui par la maturité du fruit -, forme
le f i l effentiel, pour devenir enfuite fucceffive-
ment par la fermentation acide du vinaigre; ou s’il
eft avant, comme après la maturité 6c la fermentation
, la même efpece d’acide, la découverte de fa
nature feroit de la plus grande importance pour conduire
à une théorie lumineufe de la fermentation inconnue
jufqu’à prefent, 6c pour démontrer la transmutation
des acides ; ce ne feroit point un travail
iong, fatiguant, ni compliqué. Former avec le verjus
6c les alkalis des fils neutres, les faire cryftalli-
fer , les réduire à leur ordre , feroit la plus grande
partie de l’ouvrage : enfin le régné animal fournit
dans les fourmis, fuivant Juncker, dans tous les in-
fe&es à aiguillon, 6c fuivant Pott, dans prefque toutes
les parties des animaux, un acide peu connu.
Les acides ont des propriétés médicinales qui leur
font communes ; étant concentrés , ils gangrènent
6c cautérifcnt les chairs 6c les os fur lefquels on les
applique, ils procurent l’exfoliation de ces derniers,
ce qui les rend des poifons pris intérieurement ; mais
fondus dans une grande quantité d’eau, ils font ra-
fraîchiffans , répercuffifs , ils ont la vertu de ralentir
le mouvement du fang , d’éteindre la fo if , humecter
les fluides, relâcher même tous les folides ; ils
conviennent donc dans les cas où il faut modérer la
fièvre , 6c les efforts trop grands de la nature : aufli les
médecins les emploient dans l’altération, lorfque la
langue eft feche, le pouls fort, lorfque quelque partie
du corps , fans être affoiblie, eft enflammée , ou
bien entrainée dans des mouvemens convulfifs ; on
les mêle dans les fievres malignes avec les cordiaux ;
ils augmentent la tranfpiration, donnés dans les cas
précédens , quand elle eft fupprimée par le défaut
de fecrétion que caufent la contraction des folides ,
6c lé mouvement trop rapide du fang ; ils l’étein-
droient au-contraire , 6c même avec la vie , s’ils
étoient donnés dans les cas de foibleffe ; ils font des
diurétiques relâchans, indiqués dans les cas d’inflammation
des reins , ou de la veflie, telle que la procurent
fouvent les mouches cantharides prifes intérieurement,
ou même appliquées extérieurement en trop
grande quantité ; ils doivent être mis en ufage comme
légers aftringens, & comme tempérans, dans les
différentes hémorragies , fi on excepte l’hæmophthi-
iie , parce que éxcitant la toux, arrêtant la tranfpiration
des bronches , la fecrétion des crachats , ils
pourroient augmenter l’engorgemeut ; c’eft par ces
faifons qu’ils font contre-indiqués dans les inflàm-
mations de poitrine, 6c fi on s’en fe r t, ce ne doit
être que par les raifons les plus fortes, pour courir
au mal le plus preffant : leur vertu d’arrêter la tranfpiration
, 6c de ralentir le mouvement du fang , fe
manifefte à tout fe monde, par l’ufage qu’on en fait
dans les grandes chaleurs ; ils arrêtent outre cela la
digeftion, 6c pris en trop grande quantité ou fans
befoin , ils caufent des rhumes, ou les aggravent ;
dans les fievres bjlieufes, cara&érifées par la couleur
des urines , des fellés, de la langue, 6c par l’altération
, ils font du plus grand fecqurs, eux feuls peuvent
guérir, mêles avec quelques évacuans, 6c nous
les préférons de beaucoup dans ces cas à la faignée,:
parce qu’ils n’affoibliffent pas comme elle, que leur
üfage eft plus long 6c moins accablant pour le moment
; tous les bilieux s’en fervent utilement ; ils font
encore d’un ufage fréquent contre les vers, on les
mêle dans ce deflèin avec les remedes doux, pour en
rendre la boiffon plus agréable , 6c la vertu anthel-
mintique plus fûre.
Leur ufage économique, & celui qu’ils ont dans
les arts , reviennent à tout moment ; mais fi nous
voulions entrer dans ces détails , ce feroit un ouvrage
trop immenfe que nous entreprendrions. ; ,
Nous divifons les acides en deux ordres,, le prernier
comprend les quatre acides fiinpïes, le fécond
rie renferme jufqu’à prefent, que l’eau régale, acide
compofé.
Ordre I . Lesaddesfimples. Les acides, que nous
appelions fimples, ne font le produit d’aucun mélange
apparent ; il en eft quatre genres, le vitriolique,
le nitreux, le marin , 6c le végétal, dans le détail
defquelsnous allons entrer.
Genre I. L’acide vitriolique. Voye^fous Varticle
VlTRlOL, acide vitriolique.
GenreII. L’acide nitreux. Foye^ A cide NITREUX,
fous le mot N i T RE.
Genre III. L’acide marin. Voyei Acide MARIN ,
fous le mot Sel m a r in .
Genre IV . L’acide végétal. Foye^ V é g é t a l , acide*
Ordre II. Les acides compofès. Nous nommons ainfi
les acides qui ne font point compofès de parties tout-
à-fait femblables, mais qui font le réfultat du mélange
de plufieurs acides. Il eft poffible d’en former
plufieurs efpeces, quoique nous doutions que toiïs
les acides puffent affez bien fe mêler, pour devenir
des menftrues nouveaux, nous n’en trouvons qu’un
connu, c’eft l’eau régale. L’acide fulphureux ne nous
a point paru différer affez de l’acide vitriolique, pour
qu’il en fût fait mention féparément. Foyer RÉGALE
( eau ).
Claffe I I . Les alkalis. Les alkalis ont des proprié»
tés bien différentes des fubftances que nous venons
de quitter, quoique leur nature approche fort l’une
del’autre; aufentiment des chimiltes modernes, qui
penfent que les acides entrent pour beaucoup dans
la compofition des alkalis.
. On divife ceux-ci en fixes 6c en volatils ; les fixes
font ceux qui expofés au feu le plus violent, fe fondent
fans fe diffoudre dans l’air, tandis que les volatils
s’évaporent, quelque foible qu’en foit la température.
Il ne paroît cependant pas qu’ils different
beaucoup entre eux ; un peu de phlogiftique nous
-paroît en faire toute la différence. T rouver le moyen
de le donner à l’alkali fixe, c’eft trouver celui de le
rendre volatil. Il eft hors de doute que par la fer*-
mentation putride , la nature opéré ce changement
évident dans la.putréfadion de l’urine. L’art en com-
pofarit le foie de foufre, volatilife également les alkalis
fixes ; puifque ces deux fubftances chacune féparément
fans odeur, étant unies, en donnent une
fort defagréable 6c tout-à-fait volatile , qu’il feroit
poflible ^avantageux de raffembler dans un chapiteau.
Les principales propriétés des alkalis font de faire
une vive effervefcence en fe mêlant avec les acides
de compofer avec eux des fels neutres , de dé-
compofer les autres fe ls , de verdir le firop violât
6c toutes les couleurs bleues des végétaux ; ils ont
une faveur âcre 6c piquante ; les anciens chimiftes
prenoient pour un combat & une antipathie l’effer-
vefcence qui.réfulte du mélange des acides 6c des
alkalis. Actuellement l’opinion contraire a prévalu ,
6c cette effervefcence eft reconnue pour un effet de
la reffemblance, de l’accord qui femble être entre
deux fubftances qui s’uniffent avec vivacité : c’eft ce
qu’on nomme affinité ou rapport. Voye\ R a p p o r t ,
Chimie.
Nous rappellerons que les alkalis ont plus d’affinité
avec l’acide vitriolique qu’avec- le nitreux, le
marin, 6c le végétal ; avec ceux-ci qu’avec le foufre
6c les huiles : mêlés à cette derniere efpece de fub-
ftance, ils forment les favons les plus aifés à faire, les
, plus connus, 6c les feuls en ufage.
Les alkalis font, comirie nous, l’avons dit-,- fixes ,
! ou volatils ; on ne connoît pas plufieurs genres de
volatils, mais il y en a trois de fixes, dont-les propriétés
font comme nous le verrons différentes.. Le
premier eft l’alkali terreux, le natrum ; le fécond eft
l’alkali marin, la foude ; le troifiçrae eft l’alkali du