
ne s’y amaffera qu’une petite quantité de rofée.
Lorfqu’on eft à la campagne -, 6c qu’après un jour
chaud, on vient à avoir .une l'oirée froide , on voit
fortir des canaux 6c des foffés la vapeur de l’eau ,
qui s’élève en maniéré de fumée ; cette vapeur ne
ie trouve pas plutôt à la hauteur d’un pié ou de
deux, au-deffus de l’endroit d’où elle part, qu’elle
fe répand également de tous côtés ; alors la campagne
paroît bientôt couverte d’une rofée qui s’élève infen-
fliblement ; elle humefte tous les corps fur lefquels
elle tombe, 6c mouille les habits de ceux qui s’y
promènent.
La rofée qui s’élève ne fauroif être la même dans
les différentes contrées de la terre. En effet la rofée
fe trouvera prefque toute compofée d’eau dans les
pays aqueux , proche des lacs 6c des rivières, ou
dans le voifinage de la mer ; mais fi la terre eft graffe,
fulphureufe, pleine de bois, d’animaux , de poif-
fons, de champs enfemencés, la rofée fera alors com-
pofée de diverfes fortes d’huiles, de fels volatils, 6c
d’efprits fubtils des plantes ; fi le terrein contient
beaucoup de minéraux , la rofée fera auffi compofée
de femblables parties, comme l’obferve M. Boër-
haave dans {a.-chimie. Il s’élève aulîi beaucoup de ro-
fée dans les pays humides & aqueux, & moins dans
les lieux fecs 6c arides, qui font éloignés de la mer,
des rivières ou des lacs ; ajoutons que la rofée ne monte
pas toujours à la même hauteur; la plus grande
partie s’arrête fort bas, une autre partie s’élève dans
î’atmofphere, jufqu’à une hauteur moyenne, 6c la
moindre partie à une grande hauteur.
La rojie s’étant élevée jufqu’à une certaine hauteur,
flotte lentement dans l’air; tantôt elle monte , tantôt
elle delcend, entourant tous les corps qu’elle trouve
à fa rencontre , 6c quelquefois elle retombe de l’air
pour humeéler la terre. Les philofophes ne s’accordent
pas là-deflùs , mais M. Mufchembroeck a fait
diverfes expériences à cet égard, qui ne permettent
pas de douter de la chute de la rofée ; on peut les lire
dans fon eß'aidephyfiqiu, §. i6ß 5. II a fait prefque
toutes ces expériences fur i’obfervatoire de Leyde ,
au haut duquel on trouve une large plateforme, où
il a dilpofé en tout fens des morceaux d’étoffe , des
tonnes, vafes, cloches, &c. qui ont tous reçu de la
rofée de l’air.
La rofée ne tombe pas indifféremment fur toutes
fortes de corps ; cette affertion paroît finguliere, &
l’habile phyficien que nous venons de citer, a remarqué
que les différentes couleurs attirent la rofée
avec une force inégale ; l’inégalité de leur force at-
traôive dépend de la ftru&ure 6c de la grandeur des
corps colorés.
Il ne tombe point de rofée lorfqu’il fait un gros
vent, parce que tout ce qui monte de la terre , eft
d’abord emporté par le vent, 6c que tout ce qui s’eft
élevé dans l’air pendant le jour , eft auffi arrêté &
emporté par le vent. Voici quelques obfervaîions de
M. Mufchembroeck fur ce fujet. « Quels font les
» vents avec lefquels la rofée tombe, ou quels font
» les vents qui précèdent pendant le jour , la chute
» de la rofée du foir ? J’ai fou vent été furpris de voir
» tomber de la rofée avec un vent de nord, parce
» que ce vent étant froid dans ce p ays, condenfe la
terre , & en ferme les ouvertures ; elle ne tombe
» cependant pas fi fotivem, lorfque ce vent fouffle ,
» que lorfqu’il regne d’autres vents chatids, de forte
» qu’on ne ramafte jamais tant de rofée, que lorfque
» le vent eft fud, fud-oueft, 6c fud-eft ; c’eft ce
» qu’on remarquoit auffi autrefois en Grece ; car
r> nous apprenons d’Ariftote, qu’il y tomboit de la
» rofée avec un vent.de fud-eft; il n’eft pas difficile
*> de rendre raifion de ce phénomène; le vent eft
» chaud, il ouvre la terre , il échauffe les vapeurs
» qui s’élèvent alors, en grande quantité, 6c peuvent
» par cônféquent retomber avec abondance, &c. »
Loc. cil, §. / î j 8.
Il tombe beaucoup de rofée dans le mois de Mai,
parce que le foleil met alors en mouvement une
grande quantité de fucs de la terre , 6c fait monter
beaucoup de vapeurs. La rofée de Mai eft plus ac-
queufe que celle de l’été, parce que la grande chaleur
volatilife non-feulement l’eau , mais auffi les
huiles & les fels-
Ariftote , Pline, & d’autres, ont cru que la rofée
tomboit la nuit, parce que les étoiles 6c la lune la
preffoient en bas ; 6c c’eft pour cela que les- philofophes
qui font venus enfuite, ont ajouté que la rofée
tomboit en très-grande abondance, lorfque la lune
étoit pleine , 6c qu’elle luifoit toute la nuit. Ils ont
appelle la lune, lamerede la rofée, ( Virg.géorg. L ///.)
& la rofée, la fille de l'air & de la lune. {Plut. Jy mp. g. )
Cependant on ramaffe tout autant de rofée, & avec
la même facilité, dans les nuits où la lune ne luit pas,
qu’à la clarté de cet aftre ; 6c quelle vertu pour-
roient avoir les rayons de lumière qui en partent,
puifque fi on les reçoit fur le plus grand miroir ardent
, & qu’en les raffemblant dans le fo y e r , on les
y condenlè cinq’ cens fois davantage , ils ne pro-
duifent pas le moindre effet fur le thermomètre le
plus mobile. Voyeç C h a leu r , Lune, &c.
On peut diftinguer la rofée d’avec la pluie ; i° . parce
que la pluie eft une eau blanche 6c claire, au lieu-
que la rofée eft jaune 6c trouble ; i° . en ce que l’eau
de pluie pure diftillée, n’a ni odeur ni goût, au lieu
que la rofée diftillée a l’un 6c l’autre.
La troifieme efpece de rofée dont nous avons à
parler, porte ce nom abufivement ; il s’agit de ces
gouttes acqueufes que l’on voit à la pointe du jour fur
les feuilles des plantes 6c des arbres, après une nuit
feche. On a cru que cette liqueur tomboit de l’air,
fur les plantes 6c liir l’herbe, où elle fe trouve en fi
grande quantité, qu’on ne fauroit traverferle matin
une prairie, fans avoir les piés tout mouillés. On
fe trompe fort à cet égard, car la rofée des plantes
eft proprement leur fueur , 6c par cônféquent une
humeur qui leur appartient, 6c qui fort de leurs
vaiffeaux excrétoires.
Tantôt on voit ces gouttes raffemblées proche la
tige où commence la feuille, comme dans les choux
6c les pavots ; d’autres fois elles fe tiennent fur le
contour des feuilles 6c fur toutes les éminences ,
comme cela fe remarque , fur-tout dans le creffon
d’Inde ; quelquefois on les voit au milieu de la feuille
proche de la côte ; elles fe trouvent auffi affez.fou-
ventfurle fommet de la feuille , comme dans l’herbe
des prés, &c. L’origine de cette rofée peut s’expliquer
ainfi, félon M. Mufchenbroeck. Lorfque le foleil
échauffe la terre pendant le jour , 6c qu’il met
en mouvement l’humidité qui s’y trouve , elle s’é-*
leve 6c s’infinue dans les racines des plantes contre
lefquelles elle eft portée ; après que cette humidité
s’eft une fois introduite dans la racine, elle continue
de monter plus haut, paffant par la tige dans lés feuilles
, d’où elle eft conduite par les vaiffeaux excrétoires,
fur la furfaee où elle fe raffemble en grande
quantité, tandis que le refte demeure dans la plante ;
mais cette humidité fe deffeche d’abord pendant le
jour par la chaleur de l’air , de forte qu’on n’en voit
point du tout pendant le jour fur les feuilles, 6c comme
il ne retourne alors que peu de liqueur dans la
tige 6c vers la racine , toutes les plantes paroiffent
fe faner en quelque forte vers le milieu du jour ; les
liqueurs qui ont été échauffées continuent de fe mouvoir
dans la terre pendant la nuit, elles viennent fe
rendre de même que pendant le jour contre les rach
nés des plantes, elles y entrent tout comme auparavant
, 6c s’élèvent enluite en haut ; mais les plantes
fe trouvent alors toutes entourées d’un air plus froid,
lequel
lequel deffeche moins les- humeurs, ainfi l'es fucs qui
s’écoulent des vaiffeaux excrétoires, 6c qui ne fe
deffechent pas après en être fortis, fe raffemblent in-
fenfiblement, 6c prennent la forme de gouttes, qui
font le matin dans toute leur groffeur,à moins qu’elles
ne foient diffipées par le vent, ou deffechées par
la chaleur, du foleil levant.
Comme cefentiment eft nouveau-, le même phyficien
, q.ue nous avons cité dans tout cet article, s’eft
attaché à le prouver par diverfes expériences très-
exa&es, qu’il rapporte §. /.S33 . de fon effaidephyfique.
La rofée eft faine ou nuifible aux animaux- & aux
plantes , félon qu’elle eft compofée de parties rondes
ou tranchantes , douces ou âcres, falin.es ou acides
,. fpiritueufes ou oléagineufes, eorrofives. ou ter-
reftres;, c’eft pour cela que les médecins attribuent
à la rofée diverfes maladies. Voffius , d’après Thomas
Cantipratenfis, dans fon livre furies abeilles,
avertit les bergers de ne pas mener paître leurs troupeaux
de grand matin dans les champs qui fe trouvent
couverts de rofée , parce que la rofée , qui eft
extrêmement fubtile , s’infinue dans les vifeères,
qu’elle met le ventre en mouvement par fa chaleur,
6c qu’elle le purge avec tant de violence, que mort
s’enfuit quelquefois. L’avis de Pline , liv. X F lI l .
c. xxix. ne paroît pas bien fondé ; il veut que pour
empêcher la rofée d’être nuifible aux terres enlèmen-
cées , on mette le feu au bois , à la paille & aux herbes
de la campagne ou des vignes , parce que cette
fumée préviendra tout le mal qui pourroit arriver ;
mais cette fumée ne fauroit produire aucun bon e f fet
, fi ce n’eft dans les endroits où il y a des vapeurs
& des exhalaifons acides , quife trouvent alors tempérées
par ce qù’il y a d’alkali dans la fumée. On dit
que la rofée oléagineufe eft fort mal-faine ,, fur-tout
pour les beftiaux, 6c l’on a obfervé que l’année eft
tort ftérile , lorfqu’il tombe beaucoup de cette rofée.
On prétend que dans une certaine année, les noyers
en moururent en Dauphiné, 6c que les feuilles des
autres plantes en étoient comme brûlées , de même
que le blé 6c la vigne ; mais on doit moins attribuer
cette malignité à la rofée, qu’à la trop grande chaleur
du foleil. Cet article eft de M. Formey, qui l’a. tiré
des E fais de phyfique de M. Mufchenbrock ,.déja cité
plufieurs fois dans cet article.
R osée , ( Chimie & Médecine.) Les Chimiftes ont
long-tems fuppofé 6c cherché dans la rofée des principes
merveilleux, des émanations précieufes de tous
les régnés, de la nature, & de la panfpermie de l’at-
môfphére ( voyei Panspermie) , qu’ils ont crues
éminemment propres à ouvrir certains corps, à les
altérer diverfement, à les imprégner, à les enrichir
de qualités nouvelles, &c. C’eft dans ces vues que
les Chimiftes l’ont recueillie avec foin, 6c quelquefois
même avec des circonftances myfterieùfes;
qu’ils l’ont digérée, diftillée, fermentée, &c. 6c
qu’ils l’ont enfuite employée à diverfes extradions ,
teintures , &c. qu’ils ont expofé divers corps à fon
influence, &c. C ’eft de - là qu’eft venue à la chimie
pharmaceutique la méthode de préparer le fafran de
Mars à la rofée, 6c même à la rofée de Mai, fotife exigée
encore avec cette derniere circonftance chez
beaucoup de pharmaeologiftes modernes.
L adion de la rofée bien évaluée dans ces diverfes
operations 6c dans fes ufages pour quelques arts,
comme pour le blanchiffage de la -toile & celui de la
cire, a prouvé évidemment aux chimiftes modernes
que la rofee n’operoit dans tous ces casque comme
e v!r’ ^ ^Ue toutes ^es différences qu’on pouvoit
obferver entre les effets de l’eau commune & ceux
de la rofée, s’expliquoient très-bien par la diverfe
forme d^application , favoir en ce que l’eau commune
s’employoit ordinairement fous la forme de
malle ou de volume confidérable, long-tems fubfif-
Tomt X I
tant fur les corps auxquels onl’appliquoit, 6c que la
rofee ne s’appliquoit à ces corps que fous la forme
de gouttes, de molécules difgrégées, ou tout au plus
de.couche très-légere, 6c qui fe diffipoit facilement,
61 donnoit lieu par-là à de fréquentes altérations de
madefadion & de déification;
La rofée 6c le ferein qui en eft une efpece qu’on a
caraderifee par des différences imaginaires (voyez
Serein ) , confidérés comme chofe non - naturelle ,
c eft-à.-dire comme objet externe , exerçant une influence
fur le corps animal, n’agiffent encore que
comme eau ou comme humidité, tout au plus comme
humidité froide.
La rofee doit être comptée parmi les objets extérieurs,
dont les effets font le plus nuifibles aux corps
foibies & non accoutumés à fon adion. Ceux qui
font lùjets aux rhumes, à la toux, aux maladies de
poitrine, aux ophtalmies, aux douleurs des membres
, 6c aux coliques , doivent fur-tout éviter très-
foigneufement de s’y expofer. (bf
R osée , ( Critique facrce. ) ros; ce mot outre le
lens propre, fe prend dans l’Ecriture pour la manne ;
le matin il tomba unç rofée, ros, tout-autour du
camp , Exod. xvj. rg . c ’étoit la manne même qu’on
recueillit aux environs du camp. Voye^ Manne.
Comme la Paleftine.étoit un pays fort chaud, &
que la rofée y etoit abondante, ce mot défigne auffi
quelquefois 1'abondance, la quantité de quelque
chofe ; de-là cette comparaifon ; telle que la nue de
efi fo jour d’une abondante moiffon,
Ifaie xviij. 4. Et ailleurs, nous l’accablerons par notre
nombre, comme quand la rofée tombe fur la terre.
II. Rois, xvij. i-2 . (JD. /.)
Rosee, les maréchaux ferrans appellent ainfi le
fang qui commence à paroître à la folle lorfqu’on la
pare pour, deffoler le cheval. P'oyer Parer & D es-
S.OLER.
R osée du so l e il , ( Botan. ) Tournefort a établi
dans ce genre de plante dix-fept efpeces, dont il
nomme la principale, ros Jolis folio oblongo , en an-
glois, the common roiïnd-leav'dfundew.
Sa racine eft fibree 6c déliée comme des cheveux.’
Elle poufte plufieurs queues longues, menues, 6c
velues en-deffus, auxquelles font attachées de petites
feuilles prefque rondes, concaves en maniéré
de cure-oreille, d’un verdpâle, garnies d’une frange
de poils-rougeâtres fiftuleux, d’où tranfudent quelques
gouttelettes de liqueur dans-les cavités des
veuilles ; de-forte que ces feuilles 6c leurs poils font
toujours mouillés d’une efpece de rofée.
Il s’élève d’entre ces feuilles deux ou trois tiges
prefqu’à la hauteur d’un demi-pié, grêles, rondes ,
rougeâtres, tendres, dénuées de feuilles ; elles portent
à leur fommet de petites fleurs à plufieurs pétales
, difpofees en ro fe, blanchâtres, pançhées du
même côté, foutenues par des calices formés en cornet,
denteles, 6c attachés à des pédicules forts courts.
Lorfque ces fleurs font pafféès, il leur fuccede des
petits fruits qui ont à -peu-près la groffeur & la figure
d’un grain de blé, 6c qui contiennent plufieurs
lemences oblongues ou rondelettes.
Cette plante fleurit en Juin 6c Juillet, & vient en
des lieux déferts 6c fablonneux, rudes, humides, 6c
le.plus fouvent entre les moufles ; elle eft vifqueufe
au ta£t, de-forte qu’en la touchant fa liqueur gluante
fe tire comme en petits filamens foyeux 6c blanchâtres
, qui prennent dans le moment une certaine con-
fiftance.
Cette plante eft eftimée pefrorale, adouciffante,
6c bonne dans la toux feche invétérée. (D . J. )
ROSELAIN ou ROSCLYN, ( Géog. mod.y lieu de
la Phénicie, aux environs de T y r , à 24 milles de
Sidon ; il eft remarquable par des citernes, que l’on
nomme les citernes de Salomon, mais qui n’ont été
A a a