Cela fait , on perce la tranchée par une ouverture
que les fappeurs font clans l’épaiffeur de Ion parapet,
à l’endroit qui leur eft montré ; après quoi, le
fappeur qui menela tête , commence de faire place
pour Ion premier gabion, qu’il pofe fur fon plan, 6c
l’arrange de la main du croc 6c de la fourche du
mieux qu’il p eut, pofant le deffus deffous, afin que
la pointe des piquets des gabions débordant le fom-
met, puiffe fervir à tenir les fafeines dont on les
charge. Cela fait, il les remplit de terre en la jettant
de biais en avant, &c fe tenant un peu en-arriere pour
ne pas fe découvrir : à mefure qu’il remplit le premier
gabion , il frappe de tems en tems de fon maillet
ou de fa pioche contre , pour faire entafl'er la
terre.
Ce premier gabion rempli, il en pofe un fécond
fur le même alignement, qu’il arrange 6£ remplit de
même ; après ce troifieme , un quatrième , fe tenant
toujours à couvert, & courbé derrière ceux qui font
remplis ; ce qu’il continue toujours de la forte : mais
parce que les joints des gabions font fort dangereux
avant que lafappe foit achevée, il les faudra fermer
de deux ou trois facs à terre pôles bout fur bout fur
chaque joint, que le deuxieme fappeur arrange,
après que le troifieme 6c quatrième les lui ont fait
paffer.
Au vingtième ou trentième gabion pofé & rempli,
on reprend les facs de la queue pour les rapporter
en avant, afin de les épargner; de forte qu’une centaine
de facs à. terre bien ménagés , peuvent fuffire
à conduire une fappe depuis le commencement du
fiege jufqu’à la fin.
A l’égard de l’exécution de la fappe , voici comme
elle fe doit conduire.
Le premier fappeur creufe 1 pié 6c demi de large
fur autant de profondeur , laiffant une berme de 6
pouces au pié du gabion , 6c taluant un peu du même
côté.
Le fécond élargit de 6 pouces, 6c approfondit
d’autant, ce qui fait 2 piés de large 6c autant de profondeur.
Le troifieme 6c le qftatrieme creufent encore chacun
d’un demi-pié , 6c élargiffent d’autant, font les
talus, 6c réduilent les fappes à 3 piés de profondeur
& autant de largeur par le haut, revenant à 2
piés 6c demi fur le fond, les talus parés ; ce qui elt la
mefure que nous demandons pour la rendre parfaite.
Il relie quatre hommes à employer de la même ef-
couade , qui fe tenant en repos derrière les autres ,
font rouler les gabions 6c fafeines aux quatre de la
tête., afin que les premiers fappeurs les trouvent
fous la main ; ils leur font aulfi gliffer des fafeines pour
garnir le defîiis des gabions quand ils font pleins ; lavoir
deux fur les bords 6c un dans le milieu, qu’on a
foin de faire entrer dans les piquets pointus des gabions
qui furmontent le fommet, afin de les tenir
fermes ; après quoi on les charge de terre.
L’excavation de ces 3 piés de profondeur fournit
les terres néceffaires à remplir les gabions , 6c une
malle de parapet formant un talus à terre courante
du côté de la place , remplit de haut en bas , qui ne
peut être percé que par le canon.
Quand les quatre premiers fappeurs font las, 6c
qu’ils ont travaillé une heure ou deux avec force, ils
appellent les quatre autres, lefquels prenant la place
des premiers, ils travailleront de même force jufqu’à
ce que la laflitude les oblige à rappeller les autres,
obfervant que celui quiamenélatete prend la queue
des quatre , à la première reprife du travail ; car
chacun d’eux doit mener la tête à fon tour, 6c pofer
une pareille quantité de gabions , afin d’égaler le péril
6c le travail. De cette façon on fait une grande diligence
, quand la fappc eft bien fournie.
Au furplus, on fait marcher la fappc non-feulement
en avant, mais aufli à cô té , fur les prolônge-
mens de la droite 6c de la gauche ; 6c pour l’ordi-
naire on voit des quatre , cinq 6c fix fappes dans une
feule tranchée , qui toutes cheminent à leur fin.
Dans le même tems , celui qui dirige les fappeurs
doit avoir foin de faire fervir des gabions 6c des fafeines
à la tête des fappes ; ce qui fe fait par l’intervention
de celui qui commande la tranchée , qui lui
fait fournir le monde dont il a befoin.
Le moyen d’être bien fervi feroit de donner fix
deniers de chaque fafeine, portée de la queue des
tranchées à la tête Aes fappes, payés fur le champ à la
fin des voyages, ou d’une certaine quantité. Chaque
foldat en peut porter aifément trois , 6c faire
trois ou quatre voyages ; il faudroit pour la même
raifon, donner un fou des gabions : en obfervant
cette petite libéralité, les fappes feroient toujours
bien 6c aifément fervies.
Il eft encore à remarquer que quand on a affaire à
des ennemis un peu éveillés, ilscanonnent la tête des
fappes avant que votre canon tire , de maniéré que
fouvent on eft obligé de les abandonner ; mais fi ony
eft forcé de jou r , on s’en dédommage pendant la
nuit.
A mefure que lafappc avance , on fait garnir celle
qui eft faite par les travailleurs qui l’élargiffent jufqu’à
ce qu’elle ait 10 ou 12 piés de large , fur 3 de profondeur
; pour lors elle change de nom, 6c s’appelle
tranchée , fi elle fert de chemin pour aller à la place;
mais on la nomme place d'armes, fi elle lui fait face,
6c qu!elle foit difpofée pour y placer des troupes. ,
Ces fortes d’ouvrages qui fuppofent de l’adreffe &
de l’intelligence, 6c quife font avec danger, doivent
être bien payés , fi l’on veut être bien fervi.
Le prix le plus raifonnable de la fappc doit être 40
fous la toife courante au commencement ; favoir tout
le long du travers de la fécondé place d’armes , 6c ce
qui fe trouve entre elle 6c la troifieme.
2 livres 16 fous pour la troifieme place d’armes &
le travail jufqu’au pié du glacis.
3 livres pour celle qui fe fait fur le glacis.
3 livres 10 fous pour celle qui fe fait fur le haut du
chemin couvert.
5 livres pour celle qui entre dans ledit chemin
couvert.
10 livres pour celle qu’on fait aux paffagesdesfof-
fés fecs.
20 livres s’ils font pleins d’eaù ; 6c quand elle fera
double , comme cela arrive quelquefois, il la faudra
payer ait double , félon les endroits oii on la fera.
A l’égard de celle qui fe fera dans les breches des
baftions 6c demi-lunes , elle n’a point de prix réglé ,
parce qu’elle eft expofée à tout ce que la place a de
plus dangereux ; c’eft pourquoi, félon le péril auquel
ils feront expofés, il faudra donner ce qu’on
jugera à propos.
Le toifé fe doit faire par un feul ingénieur prépofé
poîir cela à chacune des attaques ; le même fait le
compte des brigades en préfence des officiers 6c fer-
gens , qui ont loin après de faire diftribuer aux ef-
couades ce qui leur revient'; c’eft pourquoi ils doivent
contrôler tous les jours ce que chacun aura fait
d’ouvrage , de concert avec l’ingénieur qui fera le
toifé , uir le prix defquels on pourroit retenir un
dixième pour les officiers 6c fergens, afin de les rendre
plus exaêls à relever 6c faire fervir les fappes.
En obfervant cet ordre , comme tous font inte-
refles à ce travail, il ne faut pas douter qu’il ne fe
pouffe.avec toute la diligence poffible , 6c l’on peut
eftimer qu’ils feront 80 toifes en 24 heures.
Au furplus l’ingénieur qui les toifera, le doit faire
toutes les 24 heures, 6c toujours laiffer des marques
fenfiblesà la fin de chaque toifé , 6c tenir regiftre de
tout, afin que quand on voudra le vérifier, on le
puiffe faire fans confufion.
Or 80 toifes, ,à 2 livres la toife, font 1,60 livres ,
dont ôtant le dixième qui eft 16 liv. il refte pour les
fappeurs 144 liv. qui diftribués à 24hommes, font 6
liv. pour chacun , ce qui eft un gain raifonnable. Ils
ne gagneront pas davantage dans le courant du fiege,
quoique le prix de la fappe augmente à mefure qu’ ils
approchent de la place , parce que le péril augmentant
auffi, il eft sur que plus ils en approcheront, 6c
moins ils feront d’ouvrage.
On a accoutumé de leur payer quelque chofe de
plus que le prix de la toife courante , pour chaque
coupure qu’ils font dans la tranchée , par la railon
qu’il y a plus d’ouvrage qu’ailleurs ; cela fe peut réduire
à doubler le prix de la toife 6c rien de plus.
Au refte, il y a une chofe' à quoi les officiers doivent
bien prendre garde ; c’eft que fouvent les fappeurs
s’enivrent à la tête de leur fappe, après quoi
ils fe font tuer comme des bêtes, fans prendre garde
à ce qu’ils font ; c’eft de quoi il faut les empêcher ,
en ne leur permettant pas d’y porter du vin qui ne
foit mêlé de beaucoup d’eau.
Comme rien n’eft plus convenable à la sûreté, diligence
& bonne façon des tranchées , que cette ma*-
niere d’ en conduire les têtes , 6c de les ébaucher ,
rien n’eft auffi plus néceffaire que d’en régler la conduite
;scar outre que la diligence s’y trouvera , il eft
certain qu’on préviendra beaucoup de friponneries
qui s’y font par la précipitation confufe avec laquelle
elles fe conduilent, qui font qu’il y a toujours de l’embrouillement
, 6c quelqu’un qui en profite. Attaque
des places par M. le maréchal de Vauban. Voye1 Pi.
X V I . de Fortification, fig. 2. na. 1. le plan d’une fappe
, fa vue du côté intérieur, n°. 2. 6c du côté extérieur
, n°. 3 . le profil d’une fappe achevée, n°. 4.
6c le profil reprélèntant l’excavation des quatre fappeurs
n° .5. de la même Pl.
SAPPER une muraille, ( Fortificat. ) c’eft creufer la
terre qui eft au-pié d’un mur, afin de le renverfer
tout-d’un-coiip faute de foutien. Sapper,. félon Da-
viler , c’eft ruiner un ouvrage avec des marteaux,
des pioches, des bêches,, &c. en étayant la partie fu-
périeure , 6c en creufant par-deffous, 6c alors on
met le feu aux étais , ôù fi c’eft un rocher, en creufant
une mine fous lui.
Pour démolir des murailles fortes 6c épaiffesides
vieilles citadelles, &c. on a coutume de fe fervir de
la fappe. Charniers.
SÂPPEUR , {Fortification.) foldat du régiment de
royal artillerie aeftiné à travailler dans les fappes.
On inftruit dans les -écoles d’artillerie les fappeurs
à pofer les gabions avec adrefl'e ,6 c en s'exposant le
moins qu’il eft poffible. On dreffe les gabions avec la
fourche 6c le crochet de fappe , 6c l’on fait à genouil
un boyau de deux piés de profondeur. Le fappeur
doit laiffer un grand pié de relais entre les..excavations
6c les gabions , afin qu’ils ne culbutent pas
dans la tranchée , ce qui arrive affez fouvent.. iVoye^
Sappe. ( Q )
SAPPHIQUE, adj. {Littéral. ) nom d’un vers fort
ufité dans la poéfie greque 6c latine, ainfi appellé de
Sappho à qui l’on en attribue l ’invention.^ . ;
. Le versfapphique confifte en onze fylianes ou cinq
pies, dont le premier,: le quatrième 6c le cinquième
font des trochées, le fécondun fpondée, 6cle-troisième*
un daétyle ; comme,
Vivitur parvo bene, cui paternum 7
Sp'lendet in menfâ tenuifalinum
Nec lèvesfomnos timor, aut cupido
- Sordidus' aufert. Horat.
Ce dernier, vers fe nomme a.3.6nique, & on le joint
ordinairement à trois vers fapphiqucspour en former
ffrophë.,
Cependant on trouve dans les anciens pocles tra*-
giqu.es des choeurs compofés d’un grand nombre de
vers fapphiques qui fe fuivent immédiatement. En général
un vers fapphique eft dur quand il n’y a pas une
céftire après le fécond pié.
On a tenté, mais fans fuccès, de faire des versfap*
phiques en françois. ;
SA P RA P A LU S, ( Géog.anc. ) lac dans l’ifthme
de la Cherfonnèfe tauriaue , félon Strabon , VU.
p -3 08. Ce mot a-d-npct, féminin de <ra7rpoç, veut dire
pqurri, corrompit. Le lac que.Cafaubon croit être le
même que Byce eft au nord'de la Cherfonnèfe à l’orient
de l’ifthme qui la joint à la terre-ferme, 6c qui:
comme dit Strabon, le fépare de la mer, c’eft-àdire
du Pont-Euxin , ou , ,ce qui revient au même , du
golfe Carcinite. Il étoit plus enfermé qu’il n’eft présentement
par une langue de terre qui s’avance, vers
le nord ait couchant de ce lac, &qui ne l’empêohoit
pas de communiquer aveçlePalus Méotide. Cette langue
de terre,qui peut bien avoir été.anciennement.ua
ifthme entier, eft encore préfentement affez confidé^
rable pour marquer l’ancienne étendue du lac Sàpra.
20. Sapra Palus, lac de l’Afie mineure, vers la
Troade , auprès d’Aft-yra, il fe décharge dans la mer
en un endroit où le rivage eft.bordéde rocher.(Z>./.)
SAQUEBUTE, f. f. {Lutherie.) infiniment de mu-
fique 6c à vent ; c’eft une efpece de trompette différente
de l’ordinaire , tant par la figure que par la
grandeur. La faquebuteeû très-propre pour les baffes,
6c elle eft conllruite de maniéré qu’pn peut. la raccourcir,
ou l’alonger, fuivant que l’on veut des-tons
aigus ou. des tons graves. Voye^ la f ig P la n c h e< de '
Lutherie. Les Italiens la nomment trombone, les La-,
tins l’appelloient tuba ductilis,
_ Cet infiniment eft compofé de quatre différentes
pièces ou branches , 6c a ordinairement une efpece
d’anneau tors dans le milieu , qui n’ eft que la continuation
du tuyau plié deux fo is en cercle ; par. cette
c o n ftru ê tio n il peut aller d’un qiiart plus bas. q u e fon
ton nàturel. Il a encore d e u x pièces cachées dans
l’intérieur , 6c qu’on tire avec une barre de fer lorf-
qu’on veut donner à la faquebute la longueur nécef-.
faire pour un certain ton,
Lz faquebute a ordinairement 8 piés de long, fans
être tirée 6c fans développer fes cercles. Lorfqu’on
l’étend, fa longueur peut aller à 16 piés. L’anneau
tors a 2 pies 9 pouces de tour ; on l’emploie comme
baffe dans tous fes coficerts d’inftrument à vent.
Il y a des faquebutes de différentes grandeurs:; félon
les différentes parties qu’on veut,exécuter;. Ilÿ-
en a particulièrement une petite appellée pàr les
Italiens trombone picciolo, & par les Allemands kLine
alt-pofaune, propre pour les hautes-contres. La partie
qui lui convient eft appellée trombone primo ou\
/°. Il y en a une autre plus grande , appèllée trombone
maggiqre, qu’on emploie comme taille ; lajpartie;
qu’elle exécute eft nommée trombone fecondq oiv l l 0.,
Une troifieme encore plus grande, appellée frpm^g,
grofio, & dont la partie eft le trombone ter{o,.o\\ Lfl°.„
Enfin une autre qui eft de toutes, celles-là ,& dont le
fon eft très-violent , principalement dans les bafesi,.
fa partie eft appellée trombone quarto ou IV 0. ou fjrnr.
plement trombone. Elle a ordinairement pour .clé: celle
d’/’ ut Fa fur la 4e ligne ; 6c,même fouyent fiir là\5 «'ligne
d’en-h aut, à caufe de l’étendue que. cet inflriimètit
a dans le bas.. Voye^ T rompette , & la figM$.dws
nos P l. de Lutherie.
SARABAITES, f. m. plur. fHifl. eccléfiafi.) nom
que l’on donnoit autrefois à certains moines errans
6c vagabonds, qui ne fuivpient aucune réglé approuvée
, 6c alloient.de ville en v ille , vivans à Jeurdif* t
arètion...Ce :mot vient de l’hébreofarab , fe::iîé-‘
I yolter..
Cette étymologie, paroît conforme à l’idée^ que