Galilée, pour honorer Ton prote&eur, appella ces
planètes, aftra Medicea , aftres de Médicis ; 6c en
Italie on eft encore fort jaloux de leur conlerver ce
nom ; mais on ne les appelle plus ainfi par-tout ailleurs.
Marius qui les avoit vus le premier , appella
la plus proche de Jupiter , Mercurius jovialis , Mercure
de Jupiter ; la fécondé , frémis jovialis, Venus
de Jupiter ; la troifieme, Jupiter jovialis, 6c la quatrième
, Saturnus jovialis, Saturne de Jupiter.
Antonius-Maria Schyrlæus de Reita , capucin de
Cologne , s’imagina qu’outre ces quatre jaiellites , il
en avoit vu cinq autres le 29 Décembre 164a., 6c les
nomma Jidera urbanoclavia , aftres urbanotïaviens ,
en l’honneur du pape Urbain VIII. qui regnoit alors.
Mais Naudé , ayant communiqué cette obfervatiori
à Gaflendi, qui avoit obfervé Jupiter le meme jou r,
Galfendi reconnut bientôt que ce moine s’étoit trompé
, & avoit pris pour des fatellites de Jupiter cinq
étoiles fixes dans l’eau du verfeau, qui font marquées
, 25 ,2 6 ,2 7 6c 28, dans le catalogue de Tycho.
VoytJ Epifl. Gaflendi ad Gabriel. Naudoeum , de no-
vcm Jlçllis cire a Jovern vifs.
Phénomènes & nature des fatellites de Jupiter. i° .
Lorfque Jupiter fe trouve entre le Soleil 6c un de fes
fatellites , ce facilite difparoît , même quand le ciel
eft fort ferein, c’eft-à-dire que ce fatellite eft éclipfé
par Jupiter.
' Par conléquent les fatellites de Jupiter font privés
de lumière lorfque les rayons du Soleil qui les vont
frapper en ligne droite font interceptés par Jupiter ;
d’où il s’enfuit que ces planètes font des corps opaques
comme la lune , qui n’ont de lumière que celle
qu’ils reçoivent du Soleil ; de-là on peut conclure
encore , que puifque Jupiter n’eclaire point fes fa*
tellites quand ils font derrière lu i, cette planete doit
àufli être privée de lumière dans la partie oppofee au
Soleil ; 6c quë par conféquent Jupiter n’eft point
lumineux par lui-même.
20. Quand les fatellites font interpofés entre Jupiter
& le Soleil, on obferve une petite tache fur le
difque de Jupiter , & cette tache paroît quelquefois
plus grofle que le fatellite même.
D on c , puifque les fatellites font des corps opaques
que le Soleil éclaire , 6c qui doivent jetter une ombre
du côté oppofé au Soleil ; il s’enfuit que la petite
tache ronde qu’on obferve fur Jupiter eft l’ombre du
fatellite : de plus , comme cette tache eft circulaire ,
il s’enfuit que l’ombre du fatellite forme un cône ; 6c
que par conféquent les fatellites font d’une figure
Iphérique, au moins fenfiblement.
30. Lorfque la Terre eft entre Jupiter 6c le Soleil
, 6c qu’un des fatellites fe trouve aufli entre Jupiter
6c le Soleil, fa lumière difparoît 6c fe perd dans
celle de Jupiter: ainfi M. Maraldi nous apprend que
le 26 Mars 1707 , il obferva avec un télelcope de 34
piés le quatrième fatellite de Jupiter, qui pafloit fur
/Cette planete, 6c qu’il lui parut comme une tache
noire ; mais que ce fatellite ne fut pas plutôt hors du
dilque , qu’il reprit fon premier éclat. Il obferva le
4 Avril une tache femblable formée par une immer-
fion du troifieme fatellite; mais le 11 d’A v r il, examinant
une immerfion du même fatellite, il trouva
qu’il paroiflbit dans tout fon éclat, fans laiffer aucune
tache : le même phénomène a été aufli obfervé en
d’autres occafions par M. Caflini.
MM. Caflini 6c Maraldi ont fouvent remarqué des
changemens fort furprenans dans la grandeur apparente
des fatellites , lorfqu’il ne paroiflbit rien dans
leur diftance foit à la Terre , foit au Soleil, foit à Jupiter
, qui pût être l’occafion de fes variations : par
exemple,1e quatrième fatellite, qui eft prefque toujours
le plus petit des quatre, paroît quelquefois le
plus gros , 6c le troifieme qui eft ordinairement le
plus gros , paroît quelqu efois éga l, quelquefois même
plus petit qu’aucun des autres.
Puifque les fatellites de Jupiter font éclairés par le
Soleil, même lorfqu’ils font plongés dans la lumière
de Jupiter, 6c que cependant ils ne laiflent pas de pa-
roître quelquefois fans lumière , 6c quelquefois de
difparoître tout-à-fait, il faut néceflairement qu’il
arrive dans leuratmofphere différons changemens qui
empêchent que l’aéfion des rayons du Soleil fur eux
ne l'oit toujours le même; c’eft pour cette même rai-
fon que leur ombre eft quelquefois plus grofle qu’eux.
Tems périodique des latelhtes de Jupiter. Les périodes
ou révolutions des fatellites de Jupiter fe déterminent
par leurs conjon&ions avec Jupiter, comme
celles des planètes premières fe déduifent de leurs
oppofitions avec le Soleil. Voye^ Période , &c.
M. Caflini a trouvé par cette méthode les périodes
des différens fatellites , telles qu’ il fuit :
Ie J'atelL I jour. 18 h. 28. 36".
i e 3 n 18 52
3* 7 3 59 40
4 16 18 05 06
I Difance des fatellites de Jupiter à Jupiter. Les quar*
rés des tems périodiques des fatellites font proportionnels
aux cubes de leurs diftances à Jupiter, comme
il en eft des planètes premières par rapport au
Soleil.
Pour déterminer ces diftances parobfervation, on
les mefure avec un micromètre en demi - diamètres
de Jupiter. Ces diftances, fuivant M. Caflini, font
telles qu’il fuit :
Le premier fatellite eft diftant du centre de Jupiter
de 5 j demi-diametres de Jupiter,
Le 2® de 9 demi-diam.
Le 3® de 14
Le 4e de 2 5 6c un tiers.
D o n c , puifque le demi - diamètre de Jupiter eft
égal a 27 ~ demi-diametres de la T erre, il s’enfuit
que la diftance du premier fatellite à Jupiter eft de
166 demi-diametres terreftres ; celle du deuxieme,
de 249 6c demi ; celle du troifieme, de 388 ; 6c celle
du quatrième de 884.
Satellites de Saturne, font cinq petites planètes qui
tournent au-tour de Saturne, royeç Sa t u r n e .
Une de ces planètes , favoir la quatrième, en
comptant depuis Saturne , a été découverte par M.
Huygens, le 25 Mars 165 5 , au moyen d’un télelcope
de 12 piés de longueur ; les quatre autres ont été
découvertes à différentes fois par M. Caflini ; favoir,
les deux qui font le plus proche de Saturne, en Mars
1684, par le fecours de deux verres de Campani, l’un
de 100 piés de foyer, l’autre de 136 ; la troifieme en
Décembre 1672 , par le moyen d’un télefeope de
Campani de 3 6 piés de long ; 6c la cinquième en
Oélobre 1671 , avec un télefeope de 17 piés. La
plûpart des phénomènes des fatellites de Jupiter, 6C
peut-être tous, s’obfervent aufli dans ceux de Saturne
; ainfi ils paroiffent tantôt plus gros, tantôt plus,
petits : le cinquième paroît aufli quelquefois éclipfé ,
&c. par conféquent il n’eft point douteux que ces fatellites
ne foient de la même nature que ceux de Jupiter
; mais à caufe de leur grand éloignement, ils pa-
roiffent beaucoup plus petits que les fatellites de Jupiter
, 6c peut-être le font-ils en effet. Ils ont beau
pafler devant Saturne 6c l’éclipfer , on ne peut, à
caufe de la foibleffe de leur lumière, diftinguer ni
leurs immerfions, ni leurs émerfions. Le premier 6c
le fécond deviennent même invifibles dès qu’ils s’approchent
un peu de Saturne. Le troifieme eft un peu
plus gros , 6c refte fouvent. vifible tout le tems de fa
révolution. Le quatrième 6c le cinquième fe voient
aufli aflez bien ; le quatrième paroit toujours le plus
gros. Le cinquième varie de lumière 6c de grandeur,
lans doute par quelque tache que la révolution rend
tantôt plus , tantôt moins dominante fur la lumière
du difque expofé à nos yeux. Les inclinaifons de leurs
orbes font plus grandes que celles des fatellites de Jupi
ter. Le premier achevé fa révolution en 1 jour 21
heures 18 minutes 27 fécondés ; le fécond en 2 jours
i j heures 44 minutes 22 fécondés ; le troifieme en 4
jours 12 heures 2 5 minutes 12 fécondés ; le quatrième
en 15 jours 22 heures 34 minutes 38 fécondés ; & le
cinquième en 79 jours 7heur.es 6c 47 minutes. S.up-
pofantle demi-diametre de l’anneau 1, celui de l’orbe
du premier eft de près de deux, celui du fécond de
x i , du troifieme de £ , du quatrième de 8 , du cinquième
23. Le diamètre de Saturne eft d’environ 20
fécondés, qelui de l’anneau 45 ; ainfi le diamètre de
l’orbe du premierfatellite eft d’une minute 27 fécondés
; le fécond d’une minute 5 2 fécondés ; le troifieme
de 2 minutes 36 fécondés ; le quatrième de .6 minutes
; le cinquième 17 minutes 25 fécondés. Les
quatre premiers décrivent des ellipfes apparentes ,
femblables à celles de l’anneau , & font dans un même
plan. Leur inclinaifon à l’écliptique eft de 30 à
31 degrés. Le cinquième décrit un orbe incliné de
17 à 18 degrés à l’orbe de Saturne , fon plan étant
entre l’écliptique, 6c ceux des autres fatellites, 6cc. .
Les tems des révolutions des fatellites de Saturne,
fuivant M. Caflini, font tels qù’il fuit :
. I j . 21 h. 18' 31"
2 *7 ■ 4 1 27
4 *3 47 16
I 5 22 4 l 11
5e 74 7 53 57
Les diftances de ces fatellites au centre de Saturne,
félon le même aftronome, font :
l'fatell. 4 f { 1 1 Ç
** 5 • Sdmi - O m \ J _ ! î ')? " ■ * r!T
V de Saturne. .
54
. ( “ 1 1 y S ■
La grande diftance qu’il y a entre le quatrième 6c
le cinquième fatellite, fait croire à M. Huyghens
qu’il pourroit bien y en avoir quelqu’autrë ” entre
deux , ou qu’au moins, le. cinquième _/f?4e/ôre.pourroit
avoir lui-même un fatellite quitournât au-itour.de lui
comme centre.
M. Halley a donné dans les Tranfactions philofophi-
ques, une correction de la théorie du mouvement du
quatrième fatellite , qui eft celui de M. Huyghens.
La vraie période de ce fatellite eft , fuivant M. Halle
y , de 15 jours 22 heures 41 minutes 6 fécondés ;
fon mouvement d iurne, de 22a 34' 3 H" S '" ; fa diftance
au centre.de Saturne , de 4 diamètres de l’anneau
; 6c fon orbite., qui n’eft que peu ou point distante
du plan de l’anneau, coupe l’orbite de Saturne
fous un angle jde 23 (degrés & demi. Les fatellitestour-
nent aufli, félon toutes les apparences , au-tour de
leur axe. Voici les preuves qu’on peut en donner.
i°. Dans les conjonctions des fatellites avec Jupiter
, on y voit quelquefois des taches , 6c quelque-,
foison.n’y en voit point, la révolution les.faifant fans
doute. reparoître 6c difparoître tour-à-tour. 20. Le
même fatellite dans les mêmes circonftances, paroît
quelquefois plus grand & quelquefois plus petit. Le
quatrième fatellite paroît fouvent plus petit que les
trois autres, & quelquefois plus grand que les deux
premiers , quoique Ion ombre paroifle toujours plus
grande fur Jupiter , que celle de ces deux. Le troi-
fieme fatellite paroît le pltis; fouvent .plus grand que
tous les autres, 6c quelquefois il paroît égal aux deux
. premiers; fans doute que les tâches tantôt, paroiflant,
6c, tantôt difparoiflant, entraînées par la révolution,
en .diminuent, ou en augmentent alternativement les
.apparences. 3®. Le même fatellite n’emploie pas tou-
: jours;le même tems à entrer dans Jupiter , ou à en
fortir , y . mettant quelquefois 6 6c tantôt jufqu’à 10
. minutes ; ce qu’on jugé venir des taches qui altèrent
la partie claire en divers endroits. Il eft vrai que ces
Tome XIV.
taches pourroient fe former 6c fe diffiper ; mais dans
l’Aftronomie on doit toujours préférer les hypothe-
fes du mouvement local à celles des générations 6ç
des deftruCfiôns.
Nous fommes redevables à M. Pound d’un grand
nombre d’excellentes obfervations fur les fatellites,
tant de Jupiter que de Saturne. On peut voir dans
les inftitutions aftronomiques dcKM. le Monnier,
p. 2 9 . & J'uiv. le détail de ces obfervations.
Les éclipfes des fatellites, fur-tout celles des fa~
tellites de Jupiter, font de la plus grande utilité dans
l’Aftronomie. En premier lieu , on peut fe fervir de
ces éclipfes pour déterminer aflez exactement la
diftance de Jupiter à la Terre : cette méthode eft
expliquée dans le livre dont nous venons de parler,
p. xÿ 4 :Un fécond avantage encore plus confidérable
qu’on a tiré de ces éclipfes , c’eft la preuve du mouvement
fucceflif de la lumière. Il eft démontré par
les éclipfes des fatellites de Jupiter que la lumière ne
vient.pas à nous dans un moment ( comme les fefta-
teurs de Defcartes l’ont fi long-tems prétendu), quoi-
qu’à la .vérité fon mouvement foit fort rapide. En
voici la preuve. Si la lumière ne venoit pas à nous
fucceflivement, mais qu’elle fût inftantanée , il eft
évident que la Terre étant dans la plus grande diftance
de Jupiter , on appercevroit l’éclipfe du fatel-
lite au même inftant que fi la Terre étqjf dans la plus
petite diftance cle Jupiter ; au contraire fi la propagation
de la .lumière fe fait fucceflivement 6c d’une
maniéré qui puifîe etre fenfible à de fort grandes
diftances ; il eft évident qu’un obfervateur étant placé
pltis près de Jupiter, de tout le diamètre de l’or-
ibite terreftre, il appercevra plutôt l’éclipfe du fa-
tellite ; enforte que, par le moyen de la différence
entre le tems où on apperçoit l’éclipfe 6c celui où
on doit l’appercevojr fuivant les tables, on connoî-
tra la vîtefle de la lumière qui convient au diamètre
de la Terre. Or c’eft précilément ce que les obfervations
ont fait découvrir , puifque toutes les fois
que la Terre s’approche de Jupiter, les éclipfes des
fatellites arrivent tous les jours .un peu plutôt que
quand elle.s’en éloigne : car on s’apperçoit peu-à peu
d’une différence entre le calcul 6c les obfervations
qui devient aflez confidérable. C ’eft M. Roëmer qui
ade premier fifit cette découverte, confirmée depuis
par la théorie ingénieufe de l’obfervation. Voye^Ojs-
SERVATION.
Le troifieme & le plus grand avantage qu’on retire
des obfervations des éclipfes des fatellites, c’eft
la connoiflance des longitudes fur Terre. En effet, je
fuppofe que deux obfervateurs , dont l’un eft , par
exemple, à Paris , l’autre à Conftantinoplè, obfer-
vent une éclipfé du premirfatellite de Jupiter, il eft
certain que cette éclipfé arrivera dans le même mo-
, ment pour chacun des obfervateurs ; mais comme ils
font plaeés fous différens méridiens, ils ne compteront
pas la même heure : l’un, par exemple, comptera
neuf heures du foir , pendant que l’autre n’en
comptera que huit : or deftàon déduit leloignemeiit
des deux méridiens, 6c par conféquent la longitude.
V o y e [ Longitude.
Les cercles, que, les fatellites décrivent autour de
. leurs, planètes principales ne font pas fort excentriques
; M- le Monnier nous a donné dans les inflitu-
dons ajlro/iomiqucs des tables de. leurs mouvemens
aufli exacts qu’on peut, le defirer, dans une matière
-dont la théorie eft jufqu’à prefent fi peu connue 6c fi
imparfaite. En effet, il eft certain par les ôbferva-
tions,que les fatellites agiffent les uns fur les autres ,
6c qu’ils altèrent réciproquement leurs mouvemens;
enforte que la loi de ces mouvemens eft extrêmement
difficile à découvrir ; on en peut juger par la
difficulté de la théorie de la Lune qui eft pourtant
le ïeul fatellite de laTerre, & dont le mouvement
R R r r.ij