344 R OM
lui donnât les noms qu’on vient de dire. Ce fut elle
qui fut en ufage durant les deux premières races.
Elle étoit nommée rujtique on provinciale par les Romains
& par ceux qui leur fuccéderent : ce qui fem-
ble prouver qu’elle n’étoit parlée que par le peuple
6c les habitans de la campagne. Les auteurs du roman
d’Alexandre difent cependant qu’ils l’ont traduit du
-latin en roman.
Il y avoit dans la Gaule , lorfque les Francs y entrèrent
, trois langues vivantes, la latine, la celtique
& la romane ; 6c c’eft de. celle-ci fans doute que Sul-
pice Severe qui écrivoit au commencement du cinquième
fiecle , entend parler , lorfqu’il fait dire à
rofihumien : tu verà, vel cclticè, vel Jî mavis, gallick
loquere. La langue qu’il appelloit gallicane, devoit
être la même qui dans la fuite fut nommée plus communément
la romane ; autrement il faudroit dire qu’il
regnoit dans les Gaules une quatrième langue, lans
qu’il fut poflible de la déterminer , à moins que ce
ne fut un diale&e du celtique non corrompu par le
latin, & tel qu’il pouvoit.fe parler dans quelque canton
de la Gaule avant l’arrivée des Romains. Mais
quelque tems après l’établiflement des Francs,il n’eft
plus parlé d’autre langue d’ufage que de la romane &c
de la tudefque.
Le plus ancien monument que nous ayons de la
langue romane., eft celui de Louis le germanique, auquel
répondent les feigneurs François du parti de
Charles le chauve.
Les deux rois Louis de Germanie & Charles le
chauve ayant à fe défendre contre les entreprifes de
Lothaire leur frere ainé , font entr’eux à Strasbourg
en 8 4 1 , un traité de paix, dans lequel ils conviennent
de fe fecourir mutuellement, 6c de défendre
leurs états refpeftifs avec. le fe cours des feigneurs 6c
des valïaux qui avoient embraffé leur parti. Du côté
de Charles le chauve , étoient les feigneurs françois
habitans de la Gaule, & du côté de Louis , étoient
les françois orientaux ou germains. Les premiers par-
loient la langue romane, 6c les germains parloient la
langue tudefque.
Les françois occidentaux, ou les fujets de Charles
le chauve, ayant donc une langue differente de celle
que parloient les françois orientaux, oii fujets de
Louis de Germanie, il étoit néceflaire que ce dernier
prince parlât, en faifant fon ferment, dans la
langue des fujets de Charles , afin d’en être entendu
dans les promeffes qu’il faifoit, comme Charles fe
fervit de la langue tudefque pour faire connoitre les
fentimens aux Germains ; 6c l’un 6c l’autre de ces
peuples fit aufli fon ferment dans la langue qui lui
étoit particulière.
Nous ne parlerons point des fermens en langue
tudefque ; il ne s’agit ici que des fermens en langue
romane. On mettra d’abord le texte des fermens, au-
deflous l’interprétation latine, & enfin, dans une
troifieme ligne, les mots françois ufités dans les xij.
& xiij. fiecles, qui répondent à chacun des mots des
deux fermens ; par-là on verra d’un coup d’oeil la
reffemblance des deux langues françoifes, 6c leur
.rapport commun avec le latin.
Serment de Louis , roi de Germanie. La première liane
contient les paroles du ferment ; la fécondé l'interpré-
' tation latine ,6* la troifieme le françois du xij. fiecle.
Pro Deu amur & pro cjiriftian poblo
Pro Dei amore & pro chrißiano poplo
Por Deu amor & por chriftian pople
& noftro commun falvament dift di
6* noßro communi • falvamento de ißa die
noitre commun falyement de ftç di
R O M
en avant in quant Deus favir ôe
in abantc in quantum. Deus fapere en avant en quant Deu faveir &
podir me dunat, fi falvarai jo
potire mi donat , n falvaro ega
poïr me donne., • fi falvarai je
cift mepn fradre K a r lo , <St in adiudha
eccifhtm meum fratrem Karlum, & in adjutum
cift mon frere Ka rle, 6c en adiiude
er (<x) in cadhuna . cofa fi cum om per
ero in'qudquturta caufa jic quomodo homo per
ferai en cas-cun^’ cole fi cum om per
dreitv fon fradre falvar dill in o quid
directum fuum fratrem falvare debet in hoc quid
dreicl for frere falver dift en o qui
il me altrefi fazet 6c ab Ludher nul
Ule mi alterum-fic faceret & ab Lothario nullum
il me altrefi fafeet 6c a Lothaire nul
plaid numquam prindrai q ui, meon v o l , cifl:
placitum nunquam prendero quod, meo voile 9 eccifli
plaid nonques prendrai qui, par mon v o il, a cifl
meon fradre Karle in damno fit.
meo fratri Karlo .in. damno fo y
mon frere Karle en dam feit.
C’eff-à-dire : « Pour l’amour de D ie u , 6c pour le
» peuple chrétien en notre commun faluf de ce jour
» en avant autant que Dieu m’en donne le favoir &
» le p o u v o ir je déclare que je fauverai mon frere.
v Charles , ci-préfent, 6c lui ferai en aide dans cha-
» que chofe (ainii qu’un homme félon la juftice doit
» fauver fon frere) en tout ce qu’il feroit de la même
» maniéré pour m oi, 6c que je ne ferai avec Lothaire
» aucun accord qui par ma Volonté porteroit préju-
» dice à mon frere Charles ci-préfent.
Serment desfeigneursfrançois fujets de Charles le Chauvel ^
La première ligne contient les paroles du ferment ; la
fécondé L'interprétation latine , 6* la troifieme le françois
du xij. fiecle.
Si Lodhuigs fagrament que fon fradre Karlo
Si Ludovicus facramentum quod fuus frater Karlus
Si Louis lefagrement que fon frere Karle
jurat, confervat, & Karlus meos fendra
jurat y confervat, & Karlus meus fenior
ju re , . conferve, & Karles mon fenhor
de fuo part non los tanit, li jo returnar
de fua parte , non illud teneret, jß ego retornare
de fue part ne lo tanift, fi je retourner
non lint pois, ne jo , ne neuls cui jo
non illum inde poffum, nee: ego nee nullus quem ego
ne i’ent pois, ne je , ne nuis cui je
returnar int pois’, in nulla aindha contra
retornare inde poffum, in nullo adjuto contra
retourner ent po is , en nul ainde contre
Lodirwig non li (b) juer.
Ludovicum non illi fuero, '
Louis nun li ferai.
C’eft-à-dire : « Si Louis obferve le ferment que
v fon frere Charles lui jure , 6c que Charles, mon-
» feigneur de fa part ne le tint point, fi je ne puisdé-
» tourner Charles de ce violement, ni moi, ni auja)
Je lis er pour ero , au lieu de &.
(J>) M. Ducange lit fier pour fuero, au lieu de juer ou iver.
» cuns
R O M
» cuns de ceux que je puis détourner, ne ferons en
» aide à Charles contre Louis.
On voit par cet exemple que la langue romane avoit
déjà autant de rapport avec le françois auquel il a
donné naifTance, qu'avec le latin dont il fortoit. Quoique
les expreflions en foient latines , la fyntaxe ne
l’eft pas ; & l’on fait qu’une langue efl aufli diflin-
guée d’une autre par fa fyntaxe que par fon vocabulaire.
Mérn. de Üacad. des Infc. tom. X V II. & X X V I.
in-40. (D. J.)
ROMANESQUE, adj. (Grant.') qui tient du roman.
Il fe dit des chofes & des perfonnes. Une paf-
fion romanefque ; des idées romanefques ; une tête romanefque
; un tour romanefque ; un ouvrage romanefque.
Romanesque, f. f. forte de danfe. Voye{Gaillarde.
ROMANIE, ( Géog. mod. ) ou Romélie , ou Rumélie
, province delà Turquie européenne, bornée
au nord par la Bulgarie , au midi par l ’Archipel & la
mer de Marmora,, au levant par la mer Noire , 6c aii
couchant par la Macédoine.
Autrefois par la Roumanie on entendoit généralement,
comme l’a remarqué Seiden, tout le pays que
poflédoient les empereurs grecs, foit dans l’Europe,
foit dans l’Afie ou dans l’Afrique. Préfentement le
mot de Romanic défigne en général tout ce que les
Turcs pofledent en Europe , 6c particulièrement la
Thrace, la Bulgarie , la Macédoine , laTheflalie, la
Grece & quelques autres contrées. Le mot Rumélie
efl compofë de rum, & du mot grec e&.av, comme qui
diroit la Romanic greqxte ; mais la Romanic eft ordinairement
reftrainte au gouvernement du Begler-
beg de ec pays , gouvernement qui ne s’étend ni fur
la Hongrie , ni fur les îles de l’Archipel, ni même
fur la Moré.e', qui fait une partie du revenu de la va-
lideh , c’eft-à-dire de la fultane mere de l’empereur.
Ce pays feroit fertile en blé 6c en pâturages, fi les
1 urcs fe donnoient la peine de le cultiver ; les Grecs
y font en grand nombre.
Le baeha de Rumélie ou Romanic , eft le dix-hui-
tïeme entre les gouvernemens beelerbegs, & le plus
confidérable gouvernement des Turcs en Europe. Il
fournit au baeha un million cent mille afpres de revenu.
Ce baeha fait fa réfidence_ à Sofie , 6c a fous
liii vingt-quatre fangiacs. (D. J . j *
ROMANO, ( Géog. //W. ) ville d’Italie , dans la
partie prientale du Bergamafque , fur une.petite riviere
qui coule entre le Serio & l’Ögliö. Cette ville1
fait un bon commerce en blé. (D. J.)
ROMANOW , (Géog. m od.) ville de l’empire ruf-
fien , dans le duché de Jéroflavr fur la gauche du
Volga ,' au-dèfliis de Jerorfaw. (D . /.)
ROMANS , (Géogr. modf. petite ville de France,
dans une belle plaine du Dauphiné , fur l’Ifere , à! 3
lieues du Rhône, à 10 au fud-oueft de Grenoble , &
à' 11 z de Paris. Elle doit fon origine à un monafto e
fonde dans le ix fiecle , qui a été fécularifé, tk dont
la manfe afcbàtiâlé a été unie à l’archevêché de Vienne.
Il y a dans cette ville une abbaye de filles, ordre
de Cxteaux, fondée en 15 3 2 , & plufieurs couvens de
religieux. Romans eft un gouvernement particulier
du gouvernement militaire.de Dauphiné. Long. 22.
43. lot. 4 5 ./ .; (D\ /.)
ROMARIN , f m. ( Hiß. nat. Botan. rofmari-
nus ; genre de plante à fleur monopétale labiée ; la
lèvre luperiéure eft fendue en deux parties , & recourbée
en arriéré ; elle a des étamines crochues: la
lèvre inférieure eft divilée en trois parties dont celle
du milieu eft concave comme une cuillère. Le calice
dé cette fleur à deux ou trois.pointes. Le pitlii iort-
;Ü/vÄce 1 I B attaché comme un ciou à la partie-
p'ofterieure de là fleur, & entouré de quatre em-
bryons qui deviennent dans la fuite autant de femen-
Tome XIV.
R OM 345
ces arrondies, & renfermées dans une capfule qui a
fervi de calice à la fleur. Tournefort, 1. R. H. Vover
Plante,
R om ar in , (Jardinage.) rofmarinus , arbrifleau
toujours verd & odoriférent, qui vient en Efpagne
en Italie , dans les provinces méridionales de ce
royaume, & dansquelqu’autres pays chauds de l’Europe.
Il fait de lui-même un buifiôn fort branchu qui
s’étend en largeur & s’élève peu ; cependant quand
on le dirige par des foins de culture, on peut lui faire
prendre 8 à 10 pies de hauteur. Ses. feuilles font fermes
, longues , étroites , d’un verd foncé en-defliis,
& blanchâtre en-deflbus. Ses fleurs qui font petites &C
d’un bleu pâle , paroiflentau mois d’Avril. Elles durent
long-tems , 6c fe renouvellent encore en automne.
Cet arbrifleau porte très - rarement des graines;
elles font à-peu-près delà forme ,& de la groflèur de
celle du mûrier : le mois d’Août eft le tems de leur
maturité, dans les pays chauds.
Le romarin fe multiplie très-aifément de branches
equehées & de boutures. Les premières fe font au
printems ; mais le commencement de Juillet eft le
tems le plus favorable pour faire les boutures d’arbres
toujours Verds. Quoiqu’on puifl’e faire prendre
differentes formes à cet arbrifleau , il convient fur-
tout à faire des haies qu’on peut tenir à fix pés de hauteur
, & en les taillant régulièrement dans le commencement
des mois de Juillet & de Septembre.- Elles fe
garniflent bien 6c font un bon abri pouf des parties
de jardin que l’on veut tenir chaudement; Cet arbrif-
feau eft un peu délicat pour plufieurs provinces de
l’intérieur de ce royaume , oti les hivers rigoureux
le font foiivept périr.. Mais on attribue. quelquefois
au froid un dépériflement, qui n’eft venu que de.caducité.
Le romarin veut être renôuvellé au bout dé
16 ou 12, ans, qui font à-peu-près le terme de fa durée.
On la prolongera confidérablement eq mettant
l’arbrifleau' d-ans un terrein lec & léger , fabloneux
&c très-pauvre ; il s’y plaira , il y fera moins fujet à
être mutilé par le froid, & il.y fera des progrès plus
rapides que s’il étoit dans une meilleure terre. D ’ailleurs
, plus il eft jeune, moins il réfifte aux gelées. Il
eft.un moyen de l’en garantir sûrement, c’eft de lui
faire prendre racine dans un vieux mur où il réfiftera
à toutes les intempéries- du plein air. Il n’exige aucuns
foins de culture, que d’être arrofé largement fi l’on
veut accélérer fon accroiflement.
Cet arbrifiéau peut fervir à un objet utile. On af-
fure que les abeilles recherchent fes fleurs dé préférence
, parce qu’elles font printanières, abondantes,
de longue durée, 6c très-odorantes.
On fait entrer aufli; ces fleurs dans- les- fachets de
fenteur, dans les pots-pourris , & elles font la bafé
de l’eau de-la-reine d'Hongrie.. La Médecine.en fait
ufage à quantité d-’égards. On prétend que; l’eau où
l’on a fait infufer pendant douze heures des feuilles ÔC
des fleurs de cet arbrifleau,. prife intérieurement ,
fortifie la mémoire 6c la vue. La fumée de cette plante
defiéchée eft des-plus propres- à purifier l’air , & à
çhafîèr les mauvaifes odeurs. .
On ne regarde à préfent le romarin ordinaire que
comme'un'arbrifleau trivial & ignoble. Son odeur
quoique aromatique n’eft-fupportable qu’aux gens du
commun. Cependant il y a des variétés de cet arbrif-
feau afïez belles pour être admifes dans les collections
les plus riches;. Voici les differentes efpeces été romarin
que l'on'connoît à- préient.
1. Le romarin ordinaire a feuilles é tr o ite s c’eft à
cette efpece qu’on peut appliquer plus particulierer
ment- ce qui a été dit ci-deflûs.
2. Le rometrin ordinaire à feuilles étroites panachées
' de jaune ; "cette variété 3 une apparen ce agr éaole ; fes
f’euilfes/'lpntv parlemées- accidentellement de taches
d’un jaune y i f , qu.i.font le même aipeif que fi «l’on
X x