
qui fcfondaifcmentau feu, d’un rouge foncé, de couleur
de fang lorfqu’elle eft p ilée, tranfparente quand
elle eft étendue en lames minces , fans goût & fans
odeur, fi ce n’eft lorfqu’on l’a brûlée ; car alors elle
répand une odeur qui approche beaucoup de celle
du ftorax liquide. *
On trouve dans les boutiques de droguiftes deux
fortes de fang - dragon ; le dur eft formé en grumeaux
, ou en petites maffes de la longueur d’un
pouce & de la largeur d’un demi-pouce , enveloppé
dans des feuilles longues , étroites prefque comme
celles du jonc ou de palmier: c’eft ce que l’on appelle
chez les apothicaires larmes, ou gouttes de fang-
dragon. Il y en a aufli en maffes , ou en pains qui eft
moins pur, & mêlé d’ecorces , de bois, de terre ou
d’autres corps hétérogènes. L’autre fang - dragon ,
que l’on rencontre quelquefois dans les boutiques,
eft fluide, mou, tenace, réfmeux , inflammable ; il
approche de l’odeur de celui qui eft folide ; il eft
cependant moins agréable : il feche avec le tems, &
devient femblable à celui qui eft folide.
On trouve aufli très-fouvent chez les droguiftes un
faux fang-dragon , qu’il eft très - facile de diftinguer
du véritable. Ce font des maffes gommeufes , rondes
, applaties , d’une couleur rouge-brune & fale,
compofee de différentes efpeces de gommes , auxquelles
on donne la teinture avec du vrai fang-dragon
, ou avec le bois du Bréfil. Ces maffes ne s’enflamment
point, mais elles font des bulles > elles pétillent
, elles s’amolliffent & fe diffolvent dans l’eau
qu’elles rendent mucilagineufe comme les gommes.
On doit les rejetter entièrement. On eft ïme le fang-
dragon que l’on apporte en gouttes pures, brillantes,
d’un rouge-brun , inflammables, enveloppées dans
des feuilles, & qui étant pulvérifées, font paroître
une couleur d’écarlate brillante.
Les anciens Grecs cOnnoiffoient ce fuc réfineux,
fous le nom de cinnabre , dénomination qui depuis a
été tranfportée par abus à notre cinnabre minéral,
que les Grecs appelloient minium ; c ’eft par le même
abus que l’on a donné peu-à-peu le nom de minium à
la chaux rouge du plomb.
Dans le tems de Diofcoride, quelques-uns pen-
foient que le fuc, dont nous parlons, étoit le fang def-
féché de quelque dragon. Diofcoride , à la vérité,
rejette cette idée ; mais il ne dit pas ce que c’ eft que
le fuc : cependant il y a long tems que ceux qui ont
écrit fur la matière médicale , conviennent qüe ce
fuc découle d’un arbre.
Mortard affure que cet arbre s’appelle dragon, à
caufe de la figure d’un dragon que la nature a imprimé
fur fon fruit ; mais ne peut-on pas dire que c’eft à
caufe dit nom de l’arbre que l’on a cherché & imaginé
cette figure de dragon dans fon fruit ? Quoi qu’il en
fo i t , les Botaniftes font mention de quatre efpeces
dé plantes qui portent le nom de fang-dragon des
boutiques. Décrivons-les , M. Geoffroy nous dirigera.
La première efpece s’appelle draco arbor, Cluf. Hift.
I. C. B. P. 5 o3 . paima pruniftra , foliis yucca, è quâ
languis draconis. Commuel. hort. Amftal. C’eft un
grand arbre qui reffemble de loin au pin par l’égalité
& la verdure dé fes branches. Son tronc eft gros,
haut de huit ou neuf coudées, partagé en differens
rameaux, nuds vers le bas, & chargés à leur ^extrémité
d?un grand nombre de feuilles , longues d’une
coudée , larges d’abord d’un pouce, diminuant in-
fenfiblement de largeur , & fe terminant en pointe ;
elles font partagées dans leur milieu par une côte
faillante, comme les feuilles d’iris. Ses fruits font
fphériques, de quatre lignes de diamètre , jaunâtres
& un peu acides ; ils contiennent un noyau femblable
à celui du petit palmier. Son tronc , qui eft raboteux
, fe fend en plufieurs endroits, & répand dans
le tems de la canicule , une liqueur qui fe condenfe
en une larme rouge , molle d’abord, enfuite feche
& friable ; & c’eft-là le vrai fang-dragon des boutiques.
Cet arbre croît dans les îles Canariesfur-
tout près de Madere.
La fécondé efpece de fang-dragon eftappellée pal-
ma amboinenjîs fanguinem draconis fundens altéra ,
foliis & chudice , undique fpinis longis , acutiffmis ,
nigris , armata , Shetad. Arundo fareta India orienta-
lis , fanguinem draconis manans, Hift. Uxon. P aima
pinus , Jive conféra, J. B. 1-398. Arundo rotang.
Bont. P aima conféra fpinofa, Kæmpfer. Aman. exot.
j j i . Cet arbre eft haut de trois toifes, , hériffé de
toutes parts d’épines, d’un brun foncé, droites , applaties
, longues prefque d’un pouce.
Son tronc s’élève jufqu’à la hauteur de trois aunes ;
il eft de la groffeur de la jambe, fimple, droit, jaunâtre
, garni d’épines horifontales ; il eft noueux de
lieu en lieu, & fes noeuds font entourés de branches
feuillées ; elles forment un tuyau par leur bafe , de
maniéré que la branche feuillee inférieure embraffe
toujours celle qui eft au-deffus , ce qui fait que fés
noeuds ne paroiffent pas, à-moirts qu’on n’ en ôte les
enveloppes.
Ces bafes de branches feuillées, ou ces efpeces de
tuyau , forment la plus grande partie de la furface
extérieure du tronc ; car lqrfqu’elles ont été enlevées
, on voit la partie médullaire du tronc dont la
furface eft luifante , de couleur brune, d’une fubf-
tance blanche , mollaffe, fibrée, charnue & bonne à
manger. Ses branches feuillées font clair-femées fur
le tronc , & rapprochées vers, le fommet.
Elles font garnies de feuilles rangées par paires de
chaque cô té, & nues à leur partie inférieure. La
côte de fes branches feuillées eft lifte , verte en-def-
fus, pâle & jaunâtre en-deflous, creufée en gouttière
de chaque côté d’où partent les feuilles ; elle eft hé-
riffée d’épines courtes , rares, recourbées, jointes
deùx-à-deux comme des cornes.
Les feuilles que les Botaniftes appellent ordinairement*/
« a//«, font comme celles du rofeau, vertes,
longues d’une coudée, larges de fix lignes, pointues,
menues , pendantes , ayant quelques épines en-def-
fous , & trois nervures qui s’étendent dans toute la
longueur.
Les fruits naiffent d’une façon finguliere , ramaffés
en grappes , fur une tige qui vient de l’aiffelle des
branches feuillées. Ces grappes font renfermées dans
une gaîne , compofée de deux feuillets oppofés ,
minces, cannelés, bruns, qui forment une longue
pointe aiguë.
La grappe a neuf pouces de longueur, & eft compofée
de quatre , cinq ou fix petites grappes qui accompagnent
la tige. Ces grappes fe divifent en pédicules
courts, gros, courbés & pofés près l’un de l’autre
; ils portent chacun un fruit dont la bafe eft formée
de fix petits feuillets minces, membraneufe, de
couleur brune , qui fervoient de calice à la fleur.
Le fruit eft arrondi, ovoïde, plus gros qu’une aveline
, couvert d’écailles luifantes, rangées de façon
qu’il repréfente un cône de fapin renverfé , car les
pointes des écailles fupérieures couvrent les intervalles
qui fe trouvent entre les inférieures , d’où il ré-
fulte un arrangement régulier en échiquier. Le fommet
de ce fruit eft chargé de trois fuies , grêles ,
fecs & recourbés en-dehors.
Les petites écailles font menues , un peu dures ,
collées fortement enfemble, de couleur pourpre, à
. bords bruns, terminées en angles droits par leurs
pointes : fous ces écaillés on trouve une membrane
blanchâtre qui enveloppe un globule charnu , d’un
verd pâle avant fa maturité , pulpeux, plein de fuc „
d’un goût légumineux & fort aftringent, qui fe répand
promptement de la langue à toute la bôùche C
mais qui diîparoît aufli-tôt.
Les Orientaux , les Malayes & les peuples de l’île
de Java, tirent le fuc réfineux du fruit de cét arbre
de la maniéré fuivante, félon le rapport de Kæmpfer.
On place les fruits fur Une claie pôfée fur un grand
vaiffeau de terre, lequel eft rempli d’eau jufqu’à moitié
: on met fur le feu ce vaiffeàu légèrement couvert,
afin que la vapeur de l’eau bouillante amolliffe le
fruit & le rende flafque ; par ce moyen la matière
fanguine qui ne paroiffoit pas dans ce fruit coupé, en
fort par cette vapeur chaude , & fe répand fur la fu-
perheie des fruits. On l’enleve avec de petits bâtons,
& on la renferme dans des follicules faites de feuilles
de rofeau pliées, qu’on lie enfuite avec un f i l , &
que l’on expofe à l’air , jufqu’à ce qu’elle foit def-
léçhée.
D’autres obtiennent ce fuc réfineux par la fimple
décoélion du fruit ; ils le cuifent jufqu’à Ce que l’eau
en ait tiré tout le fuc rouge ; ils jettent enfuite le fruit,
Se ils font évaporer cette eau jufqu’à ce qu’il ne refte
plus qu’un fuc épais qu’ils renferment dans des follicules.
La troifieme efpece de fang-dragon eft nommée ,
dans Hermandiez, 59. e^qua-hailt, feufanguinis ar-
bor; c’eft un arbre qui a les feuilles de bouillon blanc,
grandes & anguleufes; il en découle par incifion une
liqueur rouge, dite fang-dragon.
La quatrième efpece s’appelle draco arbor, indica,
filiquofatfopuli foliofangJ'ana Javantnfbus, comme le
Hort. Amfi. rarior,2ij .C’eft un grand arbre qui croît
dans Java, & même dans la ville de Batavia;fon bois
eft dur, 8c fon écorce rougeâtre. Ses feuilles font
placées fans ordre, portées par des queues longues &
grêles ; elles font femblables aux feuilles du peuplier,
mais plus petites , longues de deux pouces, larges à
peine d’un pouce & demi, pointues, molles, liftes,
luifantes , d’un verd-gai qui tire fur le jaune ; d’un
goût infipide. Ses fleurs font petites, jaunâtres, odorantes
, un peu ameres ; fes fruits portés par de longs
pédicules, font d’une couleur cendrée, durs, ronds,
applatis , cependant convexes des deux côtés dans
leur milieu ; membraneux à leur bord, garnis de petites
côtes {aillantes. Chaque fruit contient deux ou
trois graines oblongués, recourbées , rougeâtres ,
liftes, luifantes, reflemblantes un peu de figure à des
petits haricots. Quand on fait une incifion au tronc,
ou aux branches de cet arbre , il en découle une liqueur
quife condenfe aufli-tôt en deslarmes rouges ,
que l’on nous apporte en globules enveloppées dans
du jonc.
Il feroit bien difficile de dire en quoi confifte la
différence des fuçs que l’on tire de ces différentes
plantes, fi toutefois il y a quelque différence ; car on
ne diftingue point la variété de ces fucs dans les réfines
feches qu’on nous envoie ; ce qu’il y a de sûr,
c’eft que le vrai fang-dragon ne fe diflout point dans
l’eau, mais dans l’efprit-de-vin & dans les fubftançes
huileufes. La fumée qu’il répand , lorfqu’on le brûle,
eft un peu acide , comme celle du benjoin ; c’eft une
réfine compofée de beaucoup d’huile grofliere , &
d’un fel acide mêlés enfemble ; elle contient peu de
partiesvolatiles huileufes, comme'on peut le conclure
de ce qu’elle n’a ni goût, ni odeur. On donne au
fang-dragon une vertu incraffante & deflicatiye, &
on l’emploie intérieurement, à la dofe d’une drachme,
pour la diflênterie, les hémorrhagies , les flux
de ventre & les ulceres internes. On s’en fert extérieurement
pour deffécher les ulcérés, agglutiner les
levres des plaies , & fortifier les gencives. Les Peintres
le font entrer dans le vernis rouge , dont ils colorent
les boîtes & coffres de la Chine. (D . J .)
SANGAMl ou SOOSIN , ( Géog. mod.\ une des
provinces de la grande contrée du fud-eft de l’empire
c(u Japon. Elle a trois journées de long 'c’eft un
pays plat & ftérile , qui ne fournit prelque d’autre
fubfiftance que des tortues , du poifîon & des écre-
viffes de mer ; mais on tire une grande quantité de
bois de fes forêts, ce pays eft divifé en huit diftrictsv
S A N G A R , f. m. ( Myihql.) fleuve de Phrygîe ÿ
pere de la belle Sangaride , qui fit oublier au jeune
Àttis les eogagemens qu’il avoit avec Cybele, & fut
caufe de la mort de fon amant. Paufanias fait Sangaride
mere d’Attis, au lieu de fon amante; & rapporte
un conte que l’on débitoit à Peflïnunte fur Sanga^
ride. Cette nymphe ayant vû le premier amandier
que la terre eût produit, y cueillit des amandes, &
les mit dans fon feim Aufli-tôt les amandes difparu-r
rent, & Sangaride fe fentit groffe ; elle accoucha d’un
fils que l’on expofe dans les bois, & qui fut nourri
par une chevre, il eut nom Attis. (.D ■. 7..)
Sangar , ( Géog. anç. & modd) Sangari, Sâcari oiï
Zacari, ou Zagari, riviere de la Turquie, en Afie,
dans la partie feptentrionale de la Natolie. Elle vient
de la province de Germian, & pafiant dans celle dô
Begfengil, elle s’y rend dans la mer noire. Le nom
latin eft Sangariüs, félon Ptolomée, liv. V. ch. 1. &E
Arrien, /. I. de A lex. Hefychius dit Sagarius, & l’attribue
à fe Lydie & à la Phrygie. Elle eft nommée
Sagdris, Sccyapiç, dans une médaillé de Julia-Pia - Au-
gufta. Stuckius remarque, que le feholiafte d’Apollonius
l’appel!e Sanga, ‘zâyyet, & Solin Sangari s.
Plutarque le géographe dit, Sagaris, fleuve de Phrygie
; il ajoute qu’il étoit auparavant nommé Xeraba-*
tes, par la raifon que dans lès grandes chaleurs de
l’é té, il eft la plûpa'rt du tems à lec ; on l’appella Saga
ris , dit cet auteur, parce que Sagaris, fils de Myn-
don & d’Alexirhoé, ayant méprifé les myfteres dè
Cyb e le, injuria les pretres de cette déefle : Cybele
pour le punir lui envoya une manie , dans les accès
de laquelle il fe jetta dans le fleuve de Xerabate, qui
changea alors de nom, pour prendre celui de cet homme.
M. de Tournefort, lettre X V I I . tom. I I . pag. 841
pomme cette riviere Av a ou Ayaltf. Il eft furprenant,
dit-il, que les Turcs ayent reçu l’ancien nom de la
riviere d’A va, car ils l’appellent Sagari ou Sacari, &
ce nom vient fans doute de Sangaris, fleuve aflez célébré
dans les anciens auteurs , lequel fervoit de limites
à la Bithynie. Strabon affure qu’on l’avoit rendu
navigable, & que fes fourçes fprtoient d?un villa*
ge appellé Sangias , auprès de Peflïnunte , ville de
Phrygie, cqnnue par le temple de la mère des dieux;
Lucullus étoit campé fur les bords, lorfqu’il apprit
. la perte de la bataille de Chalçédoine. {JD. J.)
S A N G EN O N , f. m. {Hifl. nat. Mineralogd) nom
que les Indiens donnent à une efpece d’opale qui pa-
roît d’une couleur olivâtre, quand on l’a conliderée
à l’ordinaire, mais quiparoît rouge comme lin rubis,
& tranfparente lorfqu’on regarde le jour au-travers.
SANG-GRIS, f. m. terme de relation; c’eft ainfi que
les François nomment en Amérique, une boiflôn que
les Anglois ont inventée, & qui eft fort à la mode
aux îles Antilles françoifes. Cette boiflon fe fait avec
du vin de Madere, du fucf e , du jus de .citron , un
. peu de cannelle , de mufeade, & une croûte de pain
rôtie ; on pafle cette liqueur par un linge fin, ÔC elle
eft une des plus agréables à boire. (Z>. J.') ■
SANGHIRA , f. m. (Hift. nat. Botati.) plante de
l’île de Madagafcar, qui eft,dit-on, une efpece d’india
go. Les habitans la regardent comme un fpécifique
& un préfervatif contre les maladies contagieufes.
SANGLANT, adj. (Gram.) qui rend du fang, qui
en eft taché. Un.facrifice fanglant, une robe fanglanr
te , une aftion fanglante, les mains fanglantes ; il fe
prend dans unfens très-différent, lorfqu’on dit un
affront fanglwt, une raillerie fanglanu, un tour fan*