
1 hostilité des castes nobles et couper court à leurs intrigues
avec les rebelles, le général Gallieni décida la déposition
de Ranavalopa III.
Le 27 février 1897 dans la soirée, toutes les dispositions
pour assurer le départ de la reine et pour que ce
départ demeurât secret ayant été discrètement prises, le
résident général fît demander à Ranavalona de renoncer
immédiatement au trône. Comprenant l’inutilité de toute
résistance, elle ,se soumit, non sans dignité, et se déclara
prete a partir pour la résidence d’exil qui lui serait,
assignée. A 2 heures du matin elle avait quitté Tananarive,
sous bonne escorte, par la route de Tamatave.
Lorsque le jour se leva, une proclamation affichée sur
les murs annonçait sa déposition et son départ au peuple
malgache. Pour assurer son existence à la Réunion, où
elle fut d’abord envoyée, une pension de 25 oôo fr.
fut allouée à Tex-reine au compte du budget local de
Madagascar. Cette pension a été portée à 35 000 fr.,
en 1899, après le transférement de Ranavalona à Alger,
où elle est installée à demeure.
L’arrêté du 28 février 1897, abolissant la royauté en
Imerina, supprima également les fonctions de premier
ministre, qui étaient restées sans titulaire depuis la
démission de Rainitsimbazafy, et stipula que désormais
la province serait administrée, au point de vue exclusivement
indigène, par un gouverneur général hova, sous
le haut contrôle de l’autorité française. Cette fonction
fut confiée à Rasanjy.
L effet produit par la disparition du pouvoir royal à
Tananarive fut tel que l’avait escompté le général Gallieni;
aucune protestation n’osa s’élever; la masse populaire
resta indifférente ; on nous sut gré, au contraire,
d’avoir définitivement brisé la prépondérance des nobles,
A la demande des notables indigènes, le résident général
décida, le 5 mars, que la fête du 14 juillet remplacerait
comme fête nationale en Imerina celle du Jan-
droana(f)\bain de la reine]. Pour effacer tout vestige de
la royauté, le général Gallieni affeçta le palais de la reine
à un musée commercial et historique et fit transporter
d’Ambohimanga, où ils étalent déposés, à Tananarive,
les restes des anciens souverains de l’ Imerina. Le village
d’Ambohimanga perdait ainsi son .caractère sacré et la
réputation d?inviolabilité pour les étrangers que lui attribuait
la légende.
Progrès de la pacification. •— A partir de ce moment,
les Français deviennent les maîtres incontestés de
la grande île ; l’extension de notre influence et de notre
domination se poursuit avec méthode. Les peuplades
indigènes sont, au fur et à mesure de leur soumission,
placées sous l’administration de gouverneurs ou chefs
de leur race, inspirés et surveillés par les résidents,et
officiers mis à la tête des provinces et cercles militaires;
les milices de Nosy-Be et de Majunga opèrent leur jonction
avec la colonne envoyée de la côte est par le résident
de Maroantsetra ; la retraite est, par suite, complètement
coupée aux insurgés dans cette direction,
Dans le sud-ouest, Tulear est définitivement occupé,
ainsi que, dans l’ouest, les baies de Baly et de Mahajamba.
Dans les cercles du sud, de l’ouest et du nord-ouest,
i. La fête du Janeiro aria ou bain du souverain, qui a été souvent décrite par
les auteurs qui ont visité Tananarive, fut pendant prés de trois, cents ans, le~
grand événement festival périodique à’ Madagascar. Elle a été instituée au début
du dix-septième siècle par le roi Ralambo pour célébrer le renouvellement de
l’année. La fête durait presque tout le mois de novembre. C’était l’époque des
échanges dé visites et de cadeaux, du versement dos impôts, des largesses au
peuple, etc. Le 21 novembre, dernier jour de l’an, la cérémonie du bain avait
lieu dans la salle du trône, où étaient réunis les grands dignitaires. Au sortir
de la baignoire, placée derrière un rideau, la reine, couverté de vêlements
d’apparat, traversait la salle tenant dans la main gauche, une corne blanche
remplie de l’eau de son bain, qu’elle versait dans sa main droite pour la lancer
d’un vaste geste de semeur sur l’assistance. Arrivée sur le perron du palais,
elle en aspergeait la foule enthousiaste.