
Lambert se chargea de venir soumettre le projet à
Napoléon III. L’empereur accueillit la proposition avec
faveur, mais, eut la malencontreuse idée de faire participer
l’Angleterre à sa réalisation; il envoya M. Lambert
proposer à Lord Clarendon « le protectorat à demi entre
la France et l’Angleterre sur Madagascar ».
Le ministre anglais refusa, fort heureusement pour
iious, mais tira parti de la communication confidentielle
qu’il avait reçue ; le Révérend Ellis, alors à Londres, fut
renvoyé à Madagascar avec mission de faire échouer les
projets exposés par Lambert.
Ellis, rendu à Tananarive au commencement de 1857,
les révéla à la reine et fit répandre le bruit que Rakoto
et les Français voulaient la renverser et la faire disparaître.
Laborde et Lambert, qui avait été reçu à son retour
de France avec des égards inaccoutumés, furent arrêtés
et conduits a la cote ; tous les autres Français furent
expulsés ; la religion chrétienne fut rigoureusement
interdite, et tous les Hova suspectés de sympathies
pour le christianisme ou pour les Européens furent mis
à mort, ou réduits en esclavage sur de simples dénonciations
(r).
Radama I I et le projet de protectorat français. La
Compagnie de Madagascar. — A la mort de Ranava-
lona Ire, en 1861, son fils Rakoto lui succéda sous le titre
de Radama II. Ce prince s’empressât d’ouvrir le pays aux
Européens, accueillit avec une faveur toute particulière
le commandant Dupré, chef de la division navale française
de l’océan Indien, venu représenter Napoléon III
à son sacre, et chargea M. Lambert, qu’il nomma duc
1. La cruauté furieuse de Ranavalona 1« pendant cette période lui a valu le
surnom justement mérité de Caligula femelle.
d’Émyrne, d’une mission auprès de notre gouvernement,
en même temps qu’il agréait officiellement Laborde
comme consul de France à Tananarive. Les clauses du
projet de 1855 furent reprises : le gouvernement impérial
devait reconnaître Radama II comme roi de Madagascar,
sous réserve des droits de la France (traité d’alliance
et de commerce du 12 septembre 1862, signé par le conj-
mandant Dupré). ,
Rentrés en France, le commandant Dupré et M. Lambert
se hâtèrent de mettre à profit leur séjour pour obtenir
de l’empereur la création d’une société au capital
de 5o millions, en vue de l’exploitation de Madagascar,
et recruter le personnel nécessaire à cette entreprise.
Pendant ce temps, Radama II procédait aux réformes
qu’il rêvait depuis longtemps d’accomplir : suppression
du tanghin comme poison d’épreuve judiciaire, abolition
des corvées et des droits de péages, rétablissement de
la liberté des cultes, réduction de l’esclavage, etc. Il
agit avec une inexpérience du pouvoir et une hâte qui
irritèrent le parti vieux hova, qui avait soutenu Ranavalona
Ire et qui effrayèrent ou surprirent les Malgaches
plus libéraux.
Le Révérend Ellis sut profiter de cette situation.
Semant l’or, il commença une campagne analogue à
celle qu’il avait faite en 1857, et par ses discours, jeta
l’inquiétude parmi les Hova, à qui les Français furent
représentés comme voulant accaparer leur pays et leurs
biens, les réduire à l’esclavage; les déporter au loin, au
mépris de leurs droits et de leurs croyances, etc. Une
conspiration du parti vieux hova décida le meurtre du
roi et, lorsque Lambert et le commandant Dupré, de
retour de France, arrivèrent à Tamatave, ils apprirent
que Radama II avait été étranglé le i 3 mai i 863 :
sa veuve, la reine Rasoherina, à qui était échu le
pouvoir sous la tutelle du premier ministre, Raini