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De plus ces barbares qui ruinèrent l’empire Romain , étoient OU païens
ou heretiques: eniorte que même après les premières fureurs, quand
ils furent aiïez apprivoifcz avec les Romains pour s’entendre l’un l’autre
8c fe parler de fang froid, les Romains leur étoient toujours odieux, par la
diveriïté de religion. Vous avez vu la cruelle perfecution des Vandales en
Afrique.
Ces barbares, il èft vrai, fe convertirent, les uns plutôt, les autres"
plus tard *, & dans leur converiîon, Dieu ne fit pas moins éclater ià
mifericorde, que dans la punition des Romains il avoit fignalé fa juf-
tice. Mais les barbares en devenant chrétiens né quittèrent pas entièrement
leurs anciennes moeurs : ils demeurèrent la plupart légers, chan-
geans, emportez, agifïànt plus par paflion que.par raifon. Vous avez
vû quels chrétiens c’étoit que Clovis 8c fes enfans. Ces peuples conti-
nuoiênt dans leur mépris pour les lettres & pour les arts, ne s’occupant
que de la chafle 8c de la guerre. De-là vint l’ignorance, même chez
les Romains leurs fujets. Car les moeurs de la nation dominante prévalent
toujours, 8c les études languiflent, fi l’honneur & l’intérêt ne les
foûtient.
Nous voïons la décadence des études dans les Gaules dès la fin du fixié-
me iieclè, c’eft-à-dire, environ cent ans après l’érabliiîèment des Francs.
Nous en avons un exemple fenfible dans Grégoire de. Tours. Il recon-
noit lui-meme qu’il avoit peu étudié la grammaire & les lettres humaines j
8c quand il ne l’avoiieroit pas, on le verroit allez. Mais le moindre défaut
de fes écrits eft le ftile ; on n’y trouve ni choix de matière, ni arrangement.
C ’eft confuiement l’hiilôire ecclefiaftique & la temporelle : ce font la plupart
de petits faits de nulle importance, 8c il en releve fouvent des circonf-
tances baflès 8c indignes d’une hiftoire ierieule. Il paroît credule jufqu’à
l’excès lur les miracles.
J’attribue ces défauts à la mauvaiie éducation, plutôt qu’au naturel autrement
il faudroit dire que pendant plufieurs fiecles il ne feroit prelque pas
né d’homme qui eût un fens droit & un jugement exaéfc. Mais les meilleurs
efprits fuivent ailement les préjugez de Î’enfance & les opinions vulgaires,
quand ils ne font pas exercez à railonner, & ne fe propofent pas de bons
modelles. Les études ne tombèrent donc pas entièrement avec l’empire Romain
, la religion les conférva : mais il n’y eut plus que les ecclefiaftiques
qui étudierent, 8c leurs études furent groflîeres 8c imparfaites. Je parle des
fciences humaines : car pour les dogmes de la religion, ils iuivoient l ’autorité
certaine de l’écriture 8c de la tradition des peres. Le pape Agathon
le témoigne dans la lettre dont il chargea fes légats pour le fixiéme concile.
Nous ne les en voïons pas, dit-il, par la confiance que nous avons en leur
içavoir : car comment pourroit-on trouver la icience parfaite des écritures,
chez des gens qui vivent au milieu des nations barbares , 8c gagnent à
grande peine leur iubfiftance chaque jour par leur travail corporel ? feulement
nous gardons avec fimpliciré de coeur la foi que nos peres nous
ont laiiîee.
Dans les fiecles fuivans, les hommes les plus éclairez, comme Bede -,
Alcuin, Hincmar, Gerbert ie ientoient du malheur des temps : voulant em-
brafièr toutes fes fciences, ils n’en approfondiflbient aucune > 8c ne fàvoient
rien exactement. Ce qui leur manquoit le plus-étoit la critique, pour distinguer
les. pièces fauiîes des véritables. Car il y avoit dès-lors quantité
d’écrits fabriquez fous des noms illuftres, non feulement par des hérétiques,
mais par des catholiques, & même à bonne intention. Jai marqué Hiß. I. xxx. ». 8.
que Vigile de Thafpe avoue lui-même avoir emprunté le nom de faint
Athanaie, pour.fe faire écouter des Vandales Ariens. Ainfi quand on n avoit
pas les aéfces d’un martyr pour lire au jour de fa fête, on en compoioit
les plus vrai-femblables ou les plus merveilleux que l’on pouvoit ; 8c par-la
l’on croïoit entretenir la pieté des peuples. Ces fauifes legendes furent principalement
fabriquées à l’occafion des tranilations de reliques, fi frequentes
dans le neuvième fiecle.
On faifoit aufli des titres, foit à la place des véritables que 1 on avoit per- Hiß. h ï,i- *• r4-
dus, foit abfolument fuppofez : comme la fameufe donation de Conftantin ,
dont on ne doutoit pas en France au neuvième fiecle. Mais de toutes ces
pièces fautes les plus pernicieufes furent les decretales attribuées aux papes
des quatre premiers fiecles, qui ont fait une plaïe irreparable a la difei- Hiß. Uv.xliv.
pline de.l’églife, par les maximes nouvelles qu’elles ont introduites tou- »• lâ chant
les jugemçns des évêques 8c l’autorite du pape. Hincmar tout grand
canonifte qu’il étoit, ne put jamais démêler cette fauiîète : il favoit bien
qûe ces decretales étoient inconnues aux fiecles précedens, 8c c eft lui
qui nous apprend quand elles commencèrent a paroitre : mais il ne favoit
pas affez de critique pour y voir les preuves de fuppofition , toutes fen-
fibles quelles font •, & lui-même allégué ces decretales quand elles lui font
favorables.
Un autre effet de l’ignorance eft de rendre les hommes crecimes &( uper-
ftitieux, faute d’avoir des principes certains de créance & une connoiiïànce
exaéte des devoirs de la religion. Dieu eft tout puiflant, & les Saints ont un
orand crédit auprès de lu i, ce font des veritez qu’aucun catholique ne con-
tefte : donc je dois croire tous les miracles, qui ont été attribuez a l.inter-
ceflion des Saints, la conféquence n’eft pas bonne. Il faut en examiner les
preuves : 8c d’autant plus exa&ement, que ces faits font plus incroiab.es
8c plus importants. Car affurer un faux miracle, ce n’eft rien moins, félon i. Cor. xv. 15.
faint Paul, que porter faux témoignage contre Dieu, comme remarque très- Petr. Damait a
judiceufement faint Pierre Damien. Ainfi loin que la pieté engage a les f
croire legerement, elle oblige à en examiner ks preuves à la rigueur. Il |
en eft de même des reVelations, des apparitions d’efprits , des opérations du
démon, foit par le miniftere des forciers ou autrement en un mot de tous
les faits furnaturels : quiconque a du bon fens 8c de la religion , doit etre
très-réfervé à les croire. ' i_ • c • j
C ’eft par cette raifon que j ’ai rapporté très-peu de ce nombre inhm de
miracles, que racontent les auteurs de ces fiecles moins éclairez. Il m’a paru
que chez eux le goût du merveilleuse l’emportoit fur celui du vrai *, & je ne
voudrois pas répondre qu’en quelques-uns il n’y eût des motifs d’interet,foit
d’attirer des offrandes par l’opinion des guerifons miraculeufes, foit de con-,
a ij