
An. 1078. gent l’ouvrier fe concente-r-il de frapper deifus à
grands coups de marteau ? Donnez du pain à un enfant
à la mamelle , vous l’étoutferez. Une ame forte fe
plaît dans les affli&iops 5c les humiliations , Scprie
pour les ennemis : une ame foible a befoin d’être menée
par la douceur , l’invitant gaiement à la vertu , 5c
fupportant charitablement fes défauts. L’abbé aïant
oih ce difcours , fe jetta aux pieds d’Anfelme , reconnut
qu’il avoit manqué de difcrecion , :& promit de fe
corriger.
Anfelme pratiquoit fés maximes le premier , 5c fe
rendoit aimable à tout le monde. Sa réputation s’é-
tendoit, non feulement par toute la Normandie, mais
par toute la France , toute la Flandre & jufques en Angleterre.
De tous cotez d’habiles clercs 5c de braves
chevaliers venoient fe foûmettre à fa conduite , 5c fe
donner à Dieu avec leurs biens : le monaftere croif-
foit au dedans en vertu, 5c en richeife au dehors. Le
venerable Helloùin ne pouvant plus agir à caufe de
fon grand âge, toute la charge du gouvernement re-
tomboit iur Anfelme; & le faint abbé étant mort, il
fut élû tout d'une voix pour lui fucceder. il fit tout ce
qu’il put 5c par raïfons ôc par prières pour s’en excu-
fer : mais enfin il accepta , étant principalement déterminé
par ce que lui avoit dit Maurille archevêque
de Rouen , quand il vouloir renoncer à la charge de
cfrr. Becc.poft» prieur, il.l’a voit été quinze ans, 5c étoit âgé de qua-
L*"f' rante-cinq , quand il fut élu abbé en 1078. Il reçut la
benedidtion abbatiale de Giflebert évêque d’Lvreux,
le jour de la chaire de faint Pierre l’année fuivante
1079. 5c gouverna l’abbaïedu-Bec quinze ans.
Les biens que ce monaftere poifedoit en Angle-
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terre , obligeoient-Anfelmeày paffer quelquefois; 5c
il y étoit encore attiré par l’amitié de ion ancien maître
Lanfranc. Par toutou il alloit il étoit parfaitement
bien reçu dans les monafterés de moines, de chanoines,
de religieufes, 5c aux cours des feigneurs. Lui de
fon côté fe faifoit tout à tous, 5c s’accommo.doit à leurs
maniérés autant qu’il le pouvoit innocemment, afin
d’avoir occafipn de leur donner à tous des inftrudtions
convenables. Ce qu’il faifoit fans prendre , cornme les
autres, le ton de dodbeur, mais d’un ftile fimple 5c familier
, emploïant des raifons folides 5c des exemples
fenfibles : toujours prêt adonner confeil à qui le de-
mandoit. Auifi étoit-il admiré 5c chéri de tout le monde.
On s’eftimoit heureux de lui parler, les plus grands
etoient les plus empreffez à le fervir. il n’y avoit en
Angleterre ni comte , ni comteffe , ni perfonne puif-
fante, qui ne crut avoir perdu fon mérité devant Dieu,
s’il n’avoit rendu quelque bon office à l’abbé du Bec.
Le roi lui-même, Guillaume le conquérant, formidable
à tout le relie des hommes , étoit fi affable pour
Anfelme , qu’il fembloit devenir un autre homme en
fa prefence.
Le pape Grégoire ne put tenir le concile qu’il avoit
indiqué pour le Carême de l’année 1077. Il en fut empêché
par ion voïage de Lombardie : mais il en tint
un cette année 1078. 5c on le compte pour le quatrième
concile de fon pontificat, il y appella Guibert archevêque
de Ravenne 5c les évêques de la Romagne
5c de la Lombardie , par une lettre du vingt-huitième
de Janvier, leur promettant toute fureté pour le voïage
: mais ni Guibert, ni plufieurs autres ne vinrent.
Le pape tint ce concile à Rome, avec environ cent évê-
A n. 1078.
LI.
Quatrième
concile de Ro-
me*
jjjfc v. epiJI, 13.
to .x .p, 3$*,