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Saint Anielme
reçoit le pallium.
Edmer.i.Novor•
604 . H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e . .
ques-là toutes choies en même état. Mais il ne tint
point fa parole , 6c pendant cette trêve il chaifa d’Angleterre
le moine Baudoiiin, en qui l’archevêque avoit
fa principale confiance. Il fit prendre fon chambellan
dans fa chambre ôc à fes yeux, 6c lui fit plufieurs autres
infultes.
Le terme de la trêve approchoit , quand Gautier
évêque d’Albane légat du pape Urbain arriva en A n gleterre.
il paifa fecrettement à Cantorberi, évita
l ’archevêque, 8c fe prelfa d’aller trouver le roi, fans
rien dire du pallium qu’il apportoit, ni parler familièrement
à perfonne, en l’abfence des deux chapelains
du roi qui le conduifoient. Le roi l’avoit ainh ordonné
, pour ne pas publier fon deifein. Le légat parla à
ce prince , fuivant ce qu’il avoit appris qui lui feroit
agréable , fans rien dire en faveur d’Anfelme. Ceux
qui avoient conçu de grandes efperances de la venue
du léga t, en furent furpris, 8c difoient : Si Rome
préféré l ’argent àlajuftice, quel fecours en peuvent
attendre ceux qui n’ont rien à donner ? Le roi donc
voïant la complaifance du lé g a t , qui lui promettoit
de la part du pape tout ce qu’il defiroit, pourvu qu’il
voulut le reconnoître, accepta la condition , 5c ordonna
par tout fon roïaume de recevoir Urbain pour pape
légitimé. Enfuite il voulut perfuader au légat de
dépofer Anfelme de l’épifcopat, par l’autorité du pape,
firomettant, s’il le fa ifo it, d’envoïer à Rome tous
es ans une grande fomme d’argent. Mais le légat lui
aïant fait voir qu’il étoit impoffible , il en fut extrêmement
contrilïé, comptant qu’il n’avoit rien gagné
à reconnoître le pape Urbain. Voïant donc qu’il ne
pouvoit changer ce qui étoit fait -, il voulut au moins
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fauver fa d ign ité , rendant en apparence fes bonnes A n .1095.
grâces à l’archevêque, p u ifqu iln e pouvoit lui faire le
mal qu’il défiroit.
Le roi célébra à Oüindfor la Pentecôte, qui cette
année 1095- fut le treizième de Mai. D e là j.1 envoïa
des évêques, qui preflerent encore Anfelme de lui
faire un prefent, du moins à l ’occafion du pallium,
qu’il feroit allé quérir à Rome à grands frais. Mais
il demeura toujours ferme , difân t, que c etoit faire
injure au roi, de montrer que fon amitié etoit vénale.
Enfin le r o i, par le confeil des feigneurs , fut réduit
à lui rendre gratuitement fes bonnes grâces, ôe
il fut dit , que de part 6c d’autre on oublieroit le paf-
fé. Il fut enfuite queftion du pallium. Quelques-uns,
pour faire leur co u r , vouloient perfuader a Anfelme
de le recevoir de la main du roi : mais il repre-
fenta que ce n’étoit pas un prefent du prince, mais
une grâce finguliere du faint fiege; 5c on con v in t,
que le légat qui l’avoit apporté le porteroit à Cantorberi
6c le mettroit fur l’autel, où Anfelme le pren-
droit.
La ceremonie fe fit le dimanche dixième de Juin.
Le légat vint à Cantorberi, 6c entra dans leglife métropolitaine
, portant le pallium dans une caifette
d’argent, avec beaucoup de decence. *Les moines qui
fervoient la même églife allèrent au devant avec
ceux de l’abbaïe de faint P au l, un grand clergé ôc un
peuple innombrable. L’archevêque accompagne de
plufieurs évêques qui le foutenoient a droit 6c a gauch
e , s'avança nuds piés, mais revêtu de fes orne-
mens. Quand le pallium eut ete mis fur 1 autel, il
l’alla prendre 6c le fit baifer à tous les aflîftans. Puis
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