
? o DiJcoars fu r l’Hifioire Ecctèftajlique.
nous préparer au carême ; la ceremome des cendres nous repréfonte l’impo-
fition dè la penitencé; l’office: entier du carême nous mftruit du foin avec
lequel ôn difpofoit les catéchumènes au batême, & les penitens à l’abfo-
lution. Les vêpres que l’on avance, nous font fouyenir que l’on, a avancé le
repas, & que l’on devrait jeûner jufques au foir : enfin l’office du famedi
f a i n t r porte encore les marques d’un offipe deftiné à occuper iàintement
la nuitdela'refurreéHon. Si on avoit aboli ces formules, nous ignorerions
la ferveur des anciens chrétiens, capables de nous caufer une falutaire conr
fofion- Et qui fait,lî dans un temps plus heureux l’églife n’établira point
ces fainteS pratiques.
- Les premiers auteurs qui ont écrit fur les. cérémonies de la religion, ont
vécu dans les fîécles que je parcours : mais ils en parlent tous comme les
reconnoïffant pour très-anciennes, & fi de leur temps il s’en étoit introduit
quelque nouvelle, ils ne manquent pas de l’obferyer. Ils donnent aux cérémonies
des lignifications myiHques, dont chacun peut juger comme il lui
plaît : mais du moins ik nous aflùrent les faits ; & nous ne pouvons douter
-què l’on pratiquât de leur temps ce dont ils prétendent nous rendre raifon.
G’eft âmon avis le plus grand ufage de ces auteurs. Aureftë vous avez vû
dans les- fix premiers. fiecFes des preuves de nos cérémonies, au moins des
plus effentièlles. .
Enfin" ces fieclés moïens ont eu leurs apôtres, qui ont fondé de nou-
Propagation de yelies églifes chez les infidèles aux dépens de leur fang ; & ces apôtres
la foi. ont ¿té des moines. Je compte pour les premiers foint Auguftin d’Angleterre
& lès compagnons envolez par faint- Grégoire : qui bien qu’ils
niaient pas fouffert le martyre en ont eu le mérité, par le courage avec
l e q u e l ils s ’ y font expofoz au milieu d’une nation encore barbare. Rien n’eft
plus'édifiant que l’iifloire de. cette églife naiffante, que Bede nous a con-
feryée, & où l’on voit des vertus & des miracles dignes des premiers fieclés.
Aulli peut-on dire que chaque temps a eu: fa primitive églife. Celle
d’Angleterre fut la fource fécondé de celle du Nord.-, les Anglois Saxons
devenus chrétiens, eurent compafiîon de leurs freres les anciens Saxons
demeurez en Germanie & encore idolâtres ; & ils entreprirent avec un
orand zele, de porter en ce vafte pais la lumière de l’évangile. Delà vint
la million de faint Villebrod en Frife, & celle de faint Boniface en Allemagne.
Il eft étonnant que pendant fept cens ans tant de faints évêques,
de Cologne, de Trêves , de Maïence & des autres villes des Gaules
Yoifinës de la Germanie, n’aient point entrëpris,de. convertir les peuples
d’au-delà-du Rhin. Ils y voïoient fans doute des difficulrez infurmon-,
tabléÿ, foit par la différence de la langue, foit pat: la- férocité de .ces
peuplés trop éloignez de la douceur du chriftianiime, comme j’ai tâché
de montrer ailleurs. Mais fans vouloir penetrer les déffeins de
Diéü, il eft certain qu’il ne lui a plû de fe faire connoître à ces nations
Germaniques que vers le milieu du huitième fiecle y & qu en cela
même il -leur a fait bien plus de grâces qu’aux Indiens & aux autres ,
qu’il a laiffées jufques iei dans les tenebres de l’idolâtrie. Or je trou- -
XXIV.
Ht fi. liv . x x x v i
n . i . t i . 4 0
Moeurs chrét. I 57-
Depuis l ’an 600. jufqua l’an 1100. 31
ve des circonftanéês .remarquables, dans, la fondation de ces églifes. Premièrement,
ceux qui entreprenpient d'y travailler prenoient toujours-la
million du pape : -au lieu que dans les. premiers -temps, chaque évêque
fe croïoit en droit de prêcher aux infidèles de fon voifinage. Mais il
faut croire que la million du pape étoit alors nëceffaire, pour lever divers
obftacles : comme en effet je vois que faint Boniface eut à combattre
dés prêtres acéphales & déréglez, répandus dans l’Allemagne , qui ne hïft. liv . m . »,
reconnoifïbient l’autorité d’aucun évêque. Je trouve aulïi que ce, faint 4«. 47. 48.
martyr né négligea pas-la proteétion temporelle de Charles Martel &
de Pépin, pour empêcher que cette églife. maillante ne fût étouffée dès le
berceau Je vois dans la fuite que les.millions femblables continuèrent
d’être appuiéés.pau les princes : comme ' celle de Saxe per Charlema- Aiy». fa,. xivn. ».
gne, celle de faint Anfcarre en Danemarc & en Suede par Louis le 7- 31.
Débonnaire & par les rois -,du païs; & rainfi des autres à proportion. Ce
fccours étoit fans doute necelïàire chez de telles nations : mais les con-
verfionÿ des premiers fieçles faites, par pure perfüafion étoient plus for
lides. Comme 011 né concevoir pas qu’une églife put ftibfifter fans évêque,
le papé eh donnoit toujours la dignité a celui qu’il faifoit chef
d’une telle million : foit qu’il le làcrât lui-même , foit qu’il lui permît
de fe faire iàcrer par d’autres. Mais il le faifoit évêqué d’une telle nation
en général, comme des Saxons ou des Sclaves claillànt à fon choix'
de fixer fon fiege au lieu qu'il jugerait le plus Cornmode : car on n’avoit
pas encore inventé la formalité des. titres ¿a panibm. JLe pape donnoit à
ce premier évêque le pallium avec le titre & les pouvoirs de métropolitain
; afin què quand" le nombre des fideles ferait augmenté, il pût fa- Uy. rxx'.-i. 57.
crer des évêques pour être fes fuffragans , qui lui donnaflènt des fuccef- ^ ÏLI' f
fours, fans recourir à Rome : vous en avez vû plufieurs exemples dans cette
hiftoire,
Pour affermir ces nouvelles églifes , 011 y fonda dès le commencement
des hionâfteres, comme Fulde près de Maïence, Corbie en Saxe
, Magdebourg qui devint métropole. C ’étoit les fominaires où on
élevoit des enfans du païs , pour les inftruire de la religion & des
lettres, les forcer à la vertu & les rendras capables des fonctions ecclc-
fiaftiques. Ainfi en peu de temps ces églifes furent en état de fe foûtenir
elles-mêmes., fans avoir befoin de focours étrangers. Les moines furent
utiles à l ’Allemagne, même pour le temporel : par le travail; de leurs
mains, ils commencèrent à défricher les vaftes forêts, qui couvraient
tout le païs -, & par leur induftrie & leur fàge oeconomie, les terres ont
été cultivées, les ferfs qui les habitoient fe font multipliez -, les monaf-
teres ont produit de grolfos villes, & leurs dépendances font devenues des
provinces.
Il eft vrai que ce foin du temporel n’a pas été avantageux âufpiri- lawb. Sebaf. an.
tuel dans ces églifos naiffantes : on s’eft trop preifé; de les enrichir, W p . i ;
particulièrement par l’exaâion des dîmes. Vous ayez vû la révolte de
Turinge pour cet fujet contre l’archevêque de Maïence , celle de Pologne
, celle' de Danemarc qui fut caufé du martyre du roi faim Canut.