
A n. 1093.
Cang* glojS.Vul-
tus Cbajlelain,
martirol. 13.
Janu.pt 104.
j<>4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
point de lui pour l'archevêché de Cantcrberi : en forte
qu’il fe croïoic en feureté , Sc vouloit repaifer en Normandie
: mais le roi lui en refufa la permiffion.
Comme ce prince tenoit,fuivant la coutume fa cour,
pleniere à N o ë l, les plus vertueux d’entre les feigneurs
affligez de la vacance du fiege deCantorberi le prefle-
rent de faire faire des prières par tout le roïaume,
pour obtenir de Dieu qu’il fût rempli dignement, il
ne put le refufer, Sc les évêques obligèrent Anfelme
a regler la forme de ces prières. Un jour un des fei-
gneurs parlant familièrement au ro i, lui dit' : Nous
ne conoiifons point d’homme d’une fi grande fainteté
que l’abbé du Bec. Il n’aime que Dieu, il ne defire rien
en ce monde. N o n , dit le roi en raillant, pas même
1 archevêché de Cantorberi : ce feigneur reprit : C ’eft
ce qu’il defire le moins , j ’en fuis perfuadé Sc plu-
fieurs autres. Je vous réponds, continua le r o i , qu’il
le prendrait à deux mains, s’il croïoit y pouvoir parvenir
: mais par le faint Voult de Luques , ni lui
ni autre que moi n’aura cet archevêché de mon tems.
Le faint Voult de Luques, en latin Sanflus Vultus
de Lues., eft un crucifix habillé , dont l’original eft
en 1 eglife cathédrale de Luques en Tofcane , Sc dont
il y a plufieurs copies en France , entr’autres à Paris
en 1 eglife du faint Sepulchre, où le peuple le nomme
faint Vaudelu.
Comme le roi d’Angleterre parloit a in fi, il fut
faifi d’une violente maladie, qui augmentant tous
les jours, le reduifit à l’extrémité. Tous les évêques
Sc les feigneurs du roïaume s’affemblerent ; &c on
lui confeilla de penfer à fon fa lu t , d’ouvrir les priio
n s , remettre les dettes, rendre la liberté aux églifes
, Sc les pourvoir depafteurs, principalement celle An. 1093.
de Cantorberi. Le roi étoit malade à Gloceftre, Sc Anfelme,
fans en rien fa voir, étoit dans une terre voi-
fine. On le mande pour venir affifter le roi à la mort :
il y accourt 1 on lui demande fon avis. Il dit que le
roi doit commencer par une confeffion fincere de tous
fes péchez : Sc promettre , s’il revient en fanté , de
reparer de bonne foi les torts qu’il a faits. Enfuite ,
ajoû ta-t-il, il fera ce que vous lui avez confeillé.Le
roi en con v in t, pria les évêques d’être fes cautions
envers Dieu ; Sc envoïa faire cette promeife en fon
nom fur l’autel. On dreffa Sc on fcella un édit portant,
que tous les prifonniers feroient délivrez , toutes les
dettes remifes 8cles offenfes pardonnées ; Sc qu’à l’avenir
on donneroit au peuple de bonnes loix , &; on
lui rendrait bonne juftice. Tous loüoient Dieu , Si lui
demandoient la fanté du roi.
Cependant on lui propofa de remplir le fiége de
Cantorberi. Il dit qu’il y penfoit, Sc comme on cher-
choit un digne fu je t, il fut le premier à nommer A n felme.
Tous y applaudirent ; mais Anfelme pâlit d’effroi
, Sc réfifta de toute fa force à ceux qui vouloient le
prefenter au ro i, pour recevoir l’inveftiture. Les eve-
quës le tirèrent à part Sc lui direntrque prétendez-vous
faire ? pourquoi réfiftez-vous à Dieu? vous voïez que la
religion eft prefque perduë en Angleterre , par la ty rannie
de cet homme; Sc pouvant y remedier, vous ne
voulez pas. A quoi penfez-vous § l’églife de Cantorberi,
dont l’oppreffion nous enveloppe tous,vous appelle a
fon fecours ; Sc fans vous foucier de fa délivrance ni de
la nôtre, vous ne cherchez que votre repos. Anfelme
répondit : Attendez, je vous prie , écoutez-moi.
A a a a ij