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très, après ies avoir dépouillez de leurs biens 5c de
leurs dignitez. De ce nombre fut l’archidiacre. A r noul,
qui après avoir été long tems en e x il, s’avifa
d’aller à Rome , 5c de porter fes plaintes au pape Grégoire.
Le pape en fut touché , 5c réfolut d’écrire au
comce Robert, pour l’exhorter à pardonner à ceux qui
avoient encouru fa difgrace , ou du moins leur donner
la liberté de fe juftifier : mais il ne fe trouvoit perfonne
qui voulût fe charger de ces lettres. Enfin le pape jetta
les yeux fur Arnoul évêque de Soiffons, dont la réputation
étoit venue jufques à lui ; & il lui manda de pre-
fenter au comte les lettres 5c les perfonnes dont il ecoit
queftion.
Arnoul aïant été empêché d’entrer à SoiiTons par la
violence que j ’ai marquée , fuifoit fa réfidence a Ou-
c h i , 5c ne laiifoit pas de s’acquiter de tous les devoirs
d’un bon év êque. Car les curez 5c les anciens du clergé
venoient le trouver , & le peuple y accouroit. Il prê-
ch o it, il donnoit la confirmation , la pénitence 5c les
autres faeremens y & on rapporte pluiieurs miracles
qu’il fit en ces commencemens de fon épifcopat. Aïant
donc reçu les lettres du pape, il alla à Lille, 5c les pré-
fenta au comte Robert. Tandis qu’on les lifoie, quelques
uns des difgraciez qui avoient fuivi Tévêque,s’étant
coulez feerettement , prirent le comte par lés
pieds. Il en fut d’abord furieufement irrité , comme il
parut à fes yeux 5c à tout l’air de fon vifage : mais Dieu
le toucha , 5c tant à la considération du faint é v êq u e ,
que pour lerefpeèt du faint fiege, il leur pardonna ,■&
leur accorda la vie 5c les biens.
. Toute la Flandre étoit pleine de meurtres , & lès
habitans fi accoûtumez au fang> qu’ils eftimoient
L i v r e S o i x a n t e - T r o i s i . e ’me. 443
honteux de palier un jour fans en repandre : les plus
proches parens s’égorgeojent pour les moindres fujets,
à peine les peres 5c les enfans s epargnoient 1 un 1 autre.
Plufieurs de la nobleffe du païs prièrent le laint é v ê que
d’aller dans les lieux où le mal étoit le plus grand,
5c de travailler à y établir la paix : il crut que Dieu le
demandait de lu i , 5c l’évenement fit voir qu’il ne s’é-
toit pas trompé. Il alla d’abord à Bruges & dans la
Flandre intérieure vers Outtémbourg 5c Furnes,.8c fit
fi bien par la douceur de fes prédications 5c par les
exemples de fa vertu , qu’il appaifa ces eiprits farouches,
5c les amena à la concorde. Ce fut avec bien de
-la peine, 5c il s’abbaiffa.fouvent jufques à fe jetrer aux
pieds des plus: intraitables. Ses exhortations furent iou-
tenuës de pLufieurs miracles ; 5c pour en connortre
l’effet, Erembold gouverneur de Bruges fit calculer par
ordre du comte la fomme à laquelle pouvoient monter
les compbfitions des meurtres commis dans cefeui
canton, dont le faint évêque avoit empêché les fuites,
& on trouva qu’on n’y auroit pas fatisfait pour, dix
mille marcs d'argent. Auih toute la Flandre le che-
riffoit tendrement, on chercha un lieu pour fa refi-
dence 5c on lui donna l’églife de faint Pierre à Outtem-
b ourg , où il fonda un monaftere de moines Bene-
diébins en 1084. 5c y mit pour premier abbé Arnoul
fon neveu. La même année il revint prendre foin de fon
diocéfe de Soiffons.
Le pape Grégoire étoit toûjours affiegé dans Le
château faint-Ange, autour duquel l’empereur Henri
avoit fait élever une muraille : mais il y avoit
quelques fortereffes qui tenoient encore pour le pape,
Æc Ruftique Ion neveu fe défendoit au milieu de Ro-
K k k i)
A n. 1084.
r. 19.
Maiil. obf.p•
5? 4-
XX,
Robert GuiC-
chard délivre le
pape.
ASta^p.Bolip.
r 58.