
3 4 6 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
A N . 10 7 7 . v o u s c o n n o i f f e z m i e u x q u e nou s l’ in te re f t de l 'c ta t .
Les feigneurs donc incertains de l'arrivée du pape , 8c
affinez du péril qu’il y avoit à différer, s’affemblerent
chez l’archevêque de Maïence, 8c confidererent que
le pape avoit laiffé le délai à leur choix : qu’il leur avoit
défendu dereconnoître Henri pour roi ; 8c que depuis
il ne lui avoit rendu que la communion , 8c non pas la
couronne. Ainfi fe trouvant entièrement libres, ils
élurent pour roi Rodolfe duc de Suaube , quoiqu’il y
réfiftât 8c demandât au moins une heure pour délibérer,
8c ils lui firent ferment de fidélité. Il ne voulut
point affurer la lucceffion à fon fils ; mais il déclara
qu’après fa mo r t , les feigneurs éliroient celui qu’ils
jugeraient le plus digne, il fut élu à Forcheim le quinzième
de Mars 1077. 8c douze jours après, favoir le
dimanche vingt-feptiéme du même mois, qui étoit la
mi carême , i l fu t fa c r é à Mayence parles archevêques
de Maïence 8c de Magdebourg avec leurs fuffragans en
préfence des légats.
m-teii.s»x. j_e jour même du facre, le roi Rodolfe , pour montrer
fa foûmiifion aux ordres du pape , voyant un fou-
diacre qu’il favoit être fimoniaque, fe prefenta revêtu
des ornemens pour chanter Fépître à la meffe , re-
fufa de l’entendre : enforte que l'archevêque Sigefroi
fut obligé de le faire retirer ôc d’en mettre un autre
à fa place. Cette adion rendit le roi Rodolfe
fort odieux aux clercs fimoniaques 8c incontinens ;
8c dès le jour même le clergé de Maïenee excita une
fedition contre l’archevêque, le roi 8c les feigneurs :
enforte que quand le roi defcendit du palais après le
dîner pour aller à vêpres , le peuple en furie voulut fe
faifir de l’églifc 8c du palais; nuis il fut iepouflé par
L i v r e S o i x a n t e - D e o x i e ’mî . 347
les chevaliers, qui accompagnoient le roi , quoiqu’ils
fuffent fans armes : car c’étoit la coutume de n’en
point porter en carême. Il elt vrai qu’après vêpres les
féditieüx étant revenus à la charge , il y en eut plus de
cent tant tuez que noïez , 8c les légats impoférent pour
pénitence à ceux qui les avoient tuez de jeûner quarante
jours, ou de nourrir quarante pauvres. Le roi
Rodolfe envoïa auffi-tôt une ambaffade au pape , pour
lui donner part de fon é l e d i o n 8 c lui promettre
obéiffance.
Ce récit eft tiré des auteurs les plus attachez au pape
Grégoire. Toutefois dans une lettre 3dreffée à tous les
fidèles,. il parle ainfi de cette é le d io n , prenant Dieu à
témoin de ce qu’il dit: Nous voulons bien vous déclarer
que Rodolfe qui a été ordonné roi par les Ultra-
montains, n’a pas reçu alors le royaume par notre ordre
, ou par notre confeil ; ôc que nous avons même
ftatué dans un concile, que fi les archevêques ôc les
évêques qui l’avoient ordonné, ne rendoient bonne rai-
fon de cette a d io n , ils feraient dépofez de leur dignité
, 8c Rodolfe du royaume.
il paraît encore que le pape ne tenoitpas le droit de
Rodolfe pour inconteftable, par deux lettres écrites
peu de tems après qu’il put avoir connoiffance de
cette éledion ; c’eft-a-dire , le dernier jour de Mai
1077. La première eft adreffée au cardinal Bernard ôc
à l’abbé Bernard fes légats, à qui il dit : vous favez
que nous fommes fortis de Rome pour aller en Allemagne
procurer la paix : mais faute de l’efcorte qui
nous avoit été promife, nous fommes demeurez en
Lombardie en grand péril. C ’eft pourquoi nous vous
enjoignons d’exhorter l’un ôc l’autre roi Henri 8c Ro-
AM.107 7.
X L IV .
Incertitude du
pape.
lib. ix.epift.zZ,
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lib. iv. ep. i j .