
A n . 1077.
X L V.
Plaintes des Allemands
contre
le pape.
Sax. bell. hiß•
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348 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
dolfe à nous donner fureté pour paifer en Allemagne:
car nous délirons terminer leur différend avec le confeil
des clercs 8c des laïques du royaume , 8c montrer
auquel des deux la couronne appartient le plus jufte-
ment. Si donc l’un des deux rois refufe de nous obéir
en ce point, réiiftez-lui en toute maniéré 8c jufques à
la mo r t , s’il eft befoin ; empêchez qu’il ne gouverne
le royaume, 8c les excommuniez avec tous fes adhérans.
Soutenez au contraire celui qui nous obéira , 8c le confirmez
dans la dignité royale, il parle de même dans
l’autre lettre qui eft adreffée aux Allemands. Il dit que
l ’un 8c l’autre roi demande le fecours du faint fiége :
il ordonne de rejetter comme membre de l’antechrifi:
celui qui ne lui obéira pas, 8c de rendre toute forte d’o-
béiifance à celui qui fe foûmettra aux ordres des légats.
En ces deux lettres il relève l’autorité de faint Grégoire,
comme s’étant attribué le pouvoir de dépofer les fou-
verains : mais il n’en allègue que la claule lufpedfe du
privilège accordé à l’hôpital d’Autun.
Qu and les Allemands du parti de Rodolfe eurent ï
connoiffance de ces lettres , ils perdirent l’efperance
qu’ils avoient dans la fermeté du pape, 8c lui écrivirent
une lettre où ils difoient : vous favez , 8c vos lettres
que nous avons en rendent témoignage , que ce
n’eft ni par notre confeil, ni pour notre intérêt , mais
pour les injures faites au faint f iége, que vous avez
dépofé notre r o i , 8c nous avez deffendu fous de terribles
menaces de le reconnoître pour tel. Nous vous
avons obéi avec un grand péril ; 8c ce prince a exercé
une telle cruauté , que plufieurs après leurs biens y
ont encore perdu la vie , 8c laiffé leurs enfansréduits à
la pauvreté. Le fruit que nous en avons reçu eft, que
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celui qui a été contraint de fe jetter à vos pieds , a été An. 1077.
abious fans notre confeil, 8c a reçu la liberté de nous
nuire. Dans la lettre d’abfolution, nous n’avons rien
vu qui révoquât la fentence de privation du royaume,
8c nous ne voïons pas encore à préfent qu’elle puiffe
être révoquée. Après donc avoir été plus d’un an fans
roi, nous en avons élu un autre, 8c comme il commen-
çoit à relever nos efperances, nous avons été furpris de
voir dans vos lettres, que vous nommez deux rois, 8c
adreffez vos légats à tous les deux.
Cette efpéce de divifion que vous avez faite du
royaume, a divifé aufti les efprits , parce qu’on a vu
dans vos lettres, que le nom du prévaricateur eft toujours
le premier , 8c que vous lui demandez fauf-con-
d u i t , comme s’il lui reftoit de la puiffance. Ce qui
nous trouble encore, c’eft que comme vous nous exhortez
à demeurer fermes dans notre entreprife, vous
donnez aufti de l’efperance au parti contraire : car les
confidens du roi Henr i, bien qu’excommuniez avec
lui, font reçus favorablement quand ils vont à Ro me
; 8c nous paffons pour ridicules,quand nous voulons
éviter ceux aVec qui vous communiquez. Au contraire
on nous impute leurs fautes, 8c on attribue à
notre négligence de n’envoyer pas plus fouvent à Ro me
; quoique ce foit eux qui nous en empêchent
contre leur ferment. Nous croïons que votre intention
eft bonne , 8c que vous agiffez par des vues fub-
tiles : mais comme nous fommes trop groffiers pour
les penetrer , nous nous contentons de vous expoier
les effets fenfibles de ce ménagement des deux partis :
favoir les guerres civiles , les homicides innombrables
, les pillages, les incendies, la diflipation des
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