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AN.1077. vous chargent de quantité de crimes, pour lefquels
ils prétendent que vous devez être interdit pendant
toute votre v ie , non-feulement de toute fon&ion publique
8c de la communion ecclefiaftique , mais de
tout commerce de la vie civile, ils demandent inftammenc
que vous foïez jugé , ôc vous favez l’incertitude
des jugemens humains. Faites donc ce que je
vous confeille ; ôc fi vous vous ientez innocent , délivrez
i’églife de ce fcandale 6c vous même de cet embarras
: prenez cette autre partie de l’hoftie, afin que
cette preuve de votre innocence ferme la bouche a
tous vos ennemis, ôc m’engage à être votre défen-
ieur le plus ardent, pour vous réconcilier avec les feigneurs
, 6c finir à jamais la guerre civile.
Le roi qui ne s’attendoit à rien m o in s , furpris ôc
embarraffé, commença à reculer; 6c s’étant retiré à
* part avec fes confidens, il délibéra en tremblant fur
ce qu’il devoit faire pour éviter une épreuve fi terrible.
Enfin aïant un peu repris fes efprits, il dit au
p ap e , que les feigneurs qui lui étoient demeurez fidèles
étoient abfens pour la plupart, auifi - bien que
fes accufateurs ; ôc qu’ils n’ajoûteroient pas. grande
foi à ce qu’il aurpit fait fans eux pour fa juftification.
C ’eft pourquoi il prioit le pape de referver l’aftaire
en fon entier à un concile general. Le pape fe rendit
fans peine à la priere du roi : il ne laifla pas de lui
donner le corps de Nôtre-Seigneur ; 8c aïant achevé
k mefle ,iH ’inv ita àd în e r ,où il le traita avec beaucoup
d’honneur; 6c après l’avoir inftruit foigneufement de
tout ce qu il devoit obferver, il le renvoiaauxfiens qui
étoient demeurez affez loin hors du château.
Incontinent après l’abfolution du r o i , le pape en
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donna avis aux feigneurs Allemans, par une lettre où A n. 1077.
il dit : Suivant la réfolution prife avec vos députez
nous fommes venus en Lombardie, environ v in g t jours
avant le terme auquel quelqu’un des ducs devoit v e nir
au devant de nous aux paffages des montagnes. Mais
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après ce terme expire, on nous manda qu on ne pouvoit
nous envoïer d’efeorte : ce qui nous mit en grande
peine , parce que nous n’avions pas d’ailleurs de
moïen de paifer chez vous. Cependant nous apprîmes
certainement que le roi venoit ; ôc avant que d’entrer
en Italie , il nous offrit par des envoïez de fatisfaire
en tout a Dieu 6c a faint Pierre , 6c nous promit toute
obéïffance pour la cprreifcion de fes moeurs , pourvu
qu’il obtînt fonabioTution. Nous coniultâmes 6c différâmes
long-tems,le reprenant fortement de fes excès
par les envoïez départ 6c d’autre; ôc enfin il vint fans
marques d’hoftiliré 6c peu accompagné à la ville de
Canoffe ou nous demeurions.
Il fut troisjours à la porte fans aucune marque de
dignité roíale, nuds pieds 6c vêtu de laine, demandant
mifericorde avec beaucoup de larmes : enforte
que tous les afliftans ne pouvoient retenir les leurs , 6c
nous prioient inftamment pour lui , admirant nôtre
dureté; 6c quelques-uns c rio ien t, que ce n’étoit pas
une feverité ajaoftolique , mais une cruauté tyrannique.
Enfin nous laiffant vaincre, nous lui donnâmes
l ’abfolution 6c le reçûmes dans le fein de l’églife : après
avoir pris de lui les furetez trànfcrites ci-deffus, qui
furent auffi confirmées par l’abbé de C lu gn i, par les
comteffes Mathilde ôc Adélaïde, ôc plufieurs autres
feigneurs évêques & laïques: ce qui s’étantainfi paffé,
nou, délirons paffer chez vous, fi-tôc que nous en au-
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