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An. 1087. dans la derniere defquelies il l’exhoite à imiter les
vertus de Ton pere, ôc à bannir de Ton roïaume la coutume
barbare d’attribuer aux péchez des prêtres le dérèglement
desfaifons Sc les maladies ; 5c de csndam-
ner pour le même fujet des femmes innocentes.
Le roi Canut continua la guerre qu’il avoit commencée
dés le tems de fon pere contre les nations barbares
s,xo.M. xi. f. qUj Soient au levant de la mer Baltique , plûtôt pour
y établir la religion, qüepour faire des conquêtes ; ôc
éteignit entièrement les roïaumes de Curlande, de
Sembrie Sc d’Eftonie. Enfuite il fe maria avec Ethle ou
Adele fille de Robert le Frifon comte de Flandres , Sc
en eut un fils nommé Charles. Le roi fon pere s’appliqua
particulièrement à rétablir la juilice, fuivant les
anciennes loix, 5c la fplendeur de la religion. Pour attirer
aux évêques la vénération de fon peuple encore
grolîier , il leur donna le premier rang entre les fei-
gneurs, Sc les égala aux ducs. Il exempta tout le clergé
de la jurifdiétion des laïques ; 5c permit aux Juges
ecclefiaftiques de condamner à l’amende pour les fautes
contre la religion, dont il leur attribua toute la con-
noiflance. Il voulut auifi accoutumer fon peuple à parer
les dîmes à l’églife : mais il n’y réüifit pas, 5c ce fut la
caufe de fa perce.
Voulant occuper fon peuple à une guerre qu’il
croïoit être juf te, il entreprit de regagner l’Angleterre
, Sc fit pour oéc effet armer une flotte : mais fon
frere Ola f , qui feignoit d’approuver fon deflein le
t rahi t , 5c fit deferter fon armée. Le roi voulut profite
rde ce malheur pour arriver à fon but , 5c établir
les dîmes pour peine de cette defertion, au lieu de l’amende
qu’ils lui devoient. Mais les Danois aimerenc
mieux
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mieux payer une fois une grofle amende, que s en- A n. 1087.
gagera un cribut perpétuel. Le roi donna ordre de lever
l'amende avec rigueur, efperant encore les faire revenir
à la dîme : mais fes commi flaires excédant fes ordres,
traitèrent le peuple fi cruellement, quon en vint
à une révolte ouverte. Le roi fe retira a Slefvic , puis
dans l’ifle de Fionie, d'où il vouloit encore paifer en
Sialande : mais il fut retenu par un nommé Blaccon
qui le trahiffoit, feignant d’être le plus fidele de fes
ferviteurs.
Enfin le roi fut aifiegé parle peuple feditieux dans
l’églife de faint Alban, où il entendoit la melfe, comme
il avoir accoutumé de faire tous les jours. Deux de
fes freres, Eric 5c Benoiit , vinrent a ion fecours, avec
ceux de fes foldats qui purent prévenir l’ennemi. Be-
noiil demeura dans i eglife reiolu a mourir avec le roi.
Eric fe trouvant dehorsengagé aumilieudes ennemis,
fe fit un paffage l’épée à la main Sc fe fauva. Le traître
Blaccon fut le premier à enfoncer les portes de l’églife,
& fut tué en y entrant. Le prince Benoift fut auifi tue
a la porte. Le roi voiant que 1 on rompoit les murs de
tous cotez , car ils n’étoient que de bois, fit venir
le prêtre 5c fe confeifa avec de grands fentimens de
penitence : puis il.fe proiterna devant l’autel les bras
étendus, en cette pofture fut percé d'une lance pouf-
fée par une fenêtre ôc bleiTé à mort : enfuite on lança
fur lui plufieurs autres traits, fans qu’il fît aucun mouvement.
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Ainfi mourut le roi Canut le famedi dixième de Juillet
1087. Les miracles qui fe firent à fon tombeau
déclarèrent bien-tot fa fainteté ; ôc les auteurs de fa
mort ne pouvant les nier , ôc ne voulant point avouer
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