
6io H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
faifoient. Ils ordonnoient ce qu’on devoit faire : ils
corrigeoient * ii on ne le fa ifo it pas : ils prioient afin
qu’on le fît.
Le Pelagien dit : Eft ce ma faute de n’avoir pas ce
que je n’ai pas reçu ? O rd on ne z -mo i ce que je dois
faire : iî je le fa i s , rendez-en grâces à Dieu : fi je ne
le fiais p a s , ne me reprenez p a s , mais priez le de me
• donner dequoi le faire. S. Augu ftin répond : C ’eft vo tre
faute d’être m é ch an t, & encore plus de ne vo u loir
pas en être repris. Comme s’il falloir louer les vices
ou les tenir pour indifferens : comme fi la corre-
«ftion n e to it pas utile , en imprimant la crainte , la
honte , la douleur : en excitant à prier & à fe convertir.
Ils devraient plutôt dire : Ne m’ordonnez rien „
& ne priez point pour moi : puifque Dieu peut convertir
fans précepte & fans prier , comme il convertit
S. Paul. Ces grâces extraordinaires que Dieu fait à
qui il lui plaît j ne doivent pas nous empêcher de co rriger
, non plus que d’inftruire & de prier.
Les Pelagiens difoient : Nous n’avons pas reçu l’o-
beiifance : pourquoi nous reprend-on, comme s’il dé-
pendoit de nous de nous la donner ? S. Auguftin répond
: S’ils ne font pas encore baptifez,leurdéfobéif-
fance vient du péché du premier homme t qui pour
être commun à tous les hommes, ne les rend pas moins
coupables & reprehenfibles chacun en particulier. Si
celui qui parle ainfî eft baptifé , il ne peut pas dire
qu’il n’a point reçu ; puifqu’il a perdu par fon libre
arbitre la grâce qu’il avoit reçue. Oui,d it le Pelagien,
je puis dire que je n’ai point reçu,puifque je n’ai point
reçu la perfeverance. Il eft vrai,dit S. Auguftin,la perfeverance
eft un don de Dieu ; & i l le prouve , en ce
que Ton prie pour la demander. Mais nous ne biffons
L i v r e v i n g t - q u a t r i e ’ me. e u
pas de reprendre juftement ceux qui n’ont pas pcrfe-
veré dans la bonne vie. Car c’eft par leur volonté qu’ils
font changez ; & s’ils ne profitent de la corre£tion,ils
méritent la damnation éternelle. Ceux mêmes à qui
l ’évangile n’aura pas été prêché,ne fe délivreront pas
de cette condamnation,quoiqu’il femble que c’eft une
excufe plus jufte de dire : Nous n’avons pas reçu la
grâce d’oiiir l’évangile , que de dire : Nous n’avons
pas reçu la perfeverance. Car on peut dire: Mon ami,
tu aurois perfeveré , fi tu avois v o u lu , en ce que tu
avois oüi ôc retenu. Mais on ne peut dire en aucune
maniéré : T u aurois c ru , fi tu avois vo u lu , ce que tu
n’avois pas oüi.
D on c ceux qui n’ont pas oüi l’évangile : ceux qui
Triant oüi & s’étant con v e r tis , n’ont pas perfeveré:
ceux qui n’ont pas voulu croire , & les enfans morts
fans baptême : ces quatre fortes de perfonnes ne font
point féparez de la mille de perdition ; ceux qui en
font féparez ne le font point par leurs mérites, mais
par la grâce du médiateur : Dieu leur donne tous les
moïens du falut ; & aucun d’eux ne périt, parce qu’ils
font prédeftinëz, c’eft à-dire non feulement appeliez,
mais élus. Q ue fi on me demande pourquoi Dieu n’a <■
pas donné la perfeverance à tous ceux à qui il a donné
la charité ; je réponds que je l’ignore , & j’admire
avec l’Apôtre la profondeur des jugemens de Dieu.
Mais vous, ennemis de la grâce, qui faites cette quef-
tion , je crois que vous l’ignorez comme moi. Ou fi
vous avez recours au libre arbitre,qu’oppoférez-vous
à cette parole : J’ai prié pour t o i , Pierre , afin que ta
fo i ne manque point? Oferez-vous dire que nonob-
ftant la priere de Jefus-Chrift la fo i de Pierre eût manqué
fi Pierre eut voulu ? L a volonté humaine n’ob^
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