
ji>S. H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
n ’ofoient attendre d’elle une. f i grande perfection.’
Cependant Demetriade prit fecretcment cette fainte
réfolution. Au milieu de quantité d’eunuques & de
filles qui la fe rvoient , au milieu des délices d’une fi
grande roaifon, elle commença à pratiquer les jeûnes,
à porter des; habits pauvres & rudes, & à coucher fur
la terre , couverte feulement d’un cilice. Elle le fai-
foit en fecret ; & il n’y avoit que quelques vierges
domeftiques de la maifon qui le fçuifent. Elle prioit
le Sauveur à genoux & avec larmes , d’accomplir
fon def ir , & d’adoucir l’efprit de fa mere & de fon
ayeule.
Enfin le jour des noces étant proche , comme on
préparoit déjà la chambre nuptiale , une nuit elle fe
détermina, encouragée par l’exemple de fainte Agnès;
& l e lendemain lailfant tous fes ornemens & fes pierreries
, & couverte d’une pauvre tunique & d’un manteau
de même parure , elle alla fe jetter aux pieds de
fon ayeule Proba, ne s'expliquant que par fes larmes.
Proba & Juliene furent extrêmement furprifes, & ne
fçavoient qu’en penfer, retenues entre la crainte & la
joye. Enfin elles embralfcrent Demetriade à l ’en v i ,
& mêlant leurs larmes avec les fiennes, la relevèrent
la confolerent , ravies qu’elle eût pris une fi fainte
réfolution. Toute la maifori fut remplie d’une joye
^ incroyable : plufieurs de. fes cfclaves & de fes amies
fuivirent fon exemple , & fe confacrerent à Dieu,
Toutes les églifes d’Afrique fe réjoiiirent de cette
nouvelle : elle fe répandit dans toutes les ifles qui
font entre l’Afrique & l’Italie : Rome même en fut
confolée dans fon abattement : & la renommée en
r. 4. palfa jufques en Orient. Proba & Juliene ne dirni-
». i. nuerent rien de la dot de leur fille , & donnèrent aux
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pauvres tout ce qu’elles avoientdeftiné à fon époux.
Elle reçut le voile delà main de l’évêque avec les prie- «■' «•
res & les cérémonies ordinaires. Saine Auguftin en b^/î. 183. *ijuU
e u t une joye d’autant plus grande, que fes exhorta- *
rions n’y a voient pas. peu contribué. Car il avoit vû
Demetriade pendant le féjour qu’il fit à Carthage pour
la conférence avec les Donatiftes, Aulfi Proba & Juliene
ne manquèrent pas de lui écrire la nouvelle de fa.
profeifion , en lui envoyant un petit prefent félon
la coutume. Elles écrivirent aulfi à faint Jerôme , & e>. iJ0. */.
le prièrent inftamment de donner à leur fille une
inftruétion pour fa conduite. Il quitta pour y fa- »/>».<?• ».
tisfaire le commentaire fur Ez echiei , qu’il achevoit
alors : & écrivit à Demetriadei une grande lettre, ». s.
contenant tous' les devoirs d’une vierge chrétienne , -
où il l’exhorte , toute riche qu’elle étoit,.à: travailler
continuellement de fes mains. Il nè matiqueop&
aulfi de la précautionner contre lesOrigcniIles,.& de
l’avertir qu’elle tienne toujours la foi du pape faint
Innocent.
Pelage qui étoit alors en Paleftine, écrivit aulfi à p xnt. ^
fainte Demetriade une très-longue lettre , ou plûtôt faint» ï>om«iia-
un livre, que nous avons, &c qui fut un des premiers _e'
écrits où il fit éclater fon herefie. Il dit d’abord qu’on cp^'-Z
ne peut l’accufer de témérité, puifqu’il n’écrit que °f' *'
pour fatisfaire aux lettres & aux inftantes prières dé
fa mere : puis entrant en matière, il dit que toutes les
fois qu’il donne des inftruétions de morale, il commence
par montrer les forces de la nature humaine ,
afin d’encourager a la perfection par l’efperance d:y
réiilfir. Il ajoute que la dignité de notre nature con- |gjy
fifte principalement dans le libre arbitre, qüe Dieu a ». $ -
donné à l ’homme, afin quêtant capable du bien & du