
381 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fere dans les villes affiegées, ou emmenez en captivité.
II.y eut toutefois un bien plus grand nombre d’é-
vêques qui demeurèrent, aïant encore quelque refte
de leur troupeau , quoiqu’expofez arec eux a des périls
continuels..
On rapporte à ce temps-là un concile de Brague ou
Braccara en Lufitanie, auquel prefidoit 1‘évêque Pao-
cratien, qui parla ainfi : Vous voïez , mes freres,
comme les barbares ravagent toute l’Efpagnc, ils ruinent
les églifes, ils tuënt les ferviteurs de Dieu , ils
profanent les mémoires des fa in t s , leurs o s , leurs fé-
pulchres, les cimetieres. Excepté la Celtiberie & la
Carpetanie , tout le refte eft fous leur puiflance vers
les Py renées. Et parce que ce mal eft prêt à fondre fur
nos têtes: j’ai voulu vous affembler, afin que chacun
pourvoye à fes affaires, Si que tous enfemble nous
puiflions remedier à la défolation de l’églife. Prenons
g a rd e , mes freres, au falut des âmes : de peur que la
grandeur de ces miferes ne les entraîne dans la voie
des pecheurs j & ne les fafle renoncer à la foi ; &
pour cet effets mettons devant les yeux de nos oüailles
-les' exemples de notre confiance , en fouffrant pour
J .C . quelque partie de tant detourmens qu’il a fouf-
fert pour nous. Et parce que quelques-uns des Alains,
des Sueves & des Vandales font idolâtres, d’autres
Ariens : je fuis d’avis, fi vous l’approuvez , que nous
déclarions notre foi contre ces erreurs, pour plus
grande sûreté.
Tous les évêques aïant approuvé cette propofition,
Pancratien commença à déclarer en abrégé la créance
de leglife catholique ; Si à chaque article les évêques
répondoient : Nous croïons ainfi. Pancratien ajouta:
Ordonnnez maintenant ce qu’il faut faire desreliques
L i v r e v i k g t - t r o i s i e ’m e . 383
des faints. Elypand de C onimb r e , dit : Nous ne pourrons
tous les fauver de même maniéré : que chacun,
faffe félon l’occafion. Les barbares font chez nous,
& preffent Liibonne : ils tiennent Merida Si Aftorga
au premier jour ils viendront fur nous. Que chacun
s’en aille chez fo i , qu’il confole les fidèles, qu’il cache
décemment les corps des faints, Si nous envoyé
la relation des lieux & des cavernes où on les aura mis,
de peur qu’on ne les oublie avec le temps. Tous les
évêques aïant approuvé cet a v is , Pancratien ajouta :
Allez tous en paix , que notre frere Potamius demeure
feulement , à caufe de la deftruction de fon églife
d’Eminie , que les barbares ravagent. Potamius dit î
Que j’aille auffi confoler mes oüailles, & fouffrir avec
elles pour J .C . Je n’ai pas reçu la charge d’évêque
pour être dans la profperité ; mais pour travailler.
Pancratien dit : C ’eft très-bien dit : votre deffein eft
juile, j’approuve votre départ, Dieu vous conferve.
Tous les évêques dirent : Dieu vous conferve dans
cette bonne réfolution : nous l ’approuvons tous : retirons
nous avec la paix de J. C .
C ’eft ce que nous avons de ce concile avec les
fouferiptions de dix évêques ; fçavoir Pancratien de
Brague , Gelafe de Merida, Elypand de Conimbre ,
Pamerius d’Egitave ou Idagna, Arifbert de Porto
, Deufdedit de L ug o, Ponramius ou plûtôt Potamius
d’Eminie ou Agueda , Tiburce de Lamego ,
Agathius d’Ina , Pierre de Numance ou Camota.
Arifbert écrivit vers le même temps à Samerius archidiacre
de Brague en ces termes : Je vous plains,
mon frere, je plains notre évêque & notre chef Pancratien,
je plains votre exil : que Dieu, regarde notre
mifere des yeux de fa mifericorde. Conimbre eft