
XXIV.
Lettre de S* Au-
guftin fur le ferment
dePiuien,
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31 i H i s t o i r e E c ' C I E S I A S T IQ U E ;
eut cette complaifancc pour elle; il laiifafa foufcri,' I
ption imparfaite, ôc perionne ne le prefla de 1 ache- I
ver. Pimenfort i td Hippone le lendemain,ôc retourna I
iT a g a f t e , ce qui caufa de l’émotion parmi le peuple; I
mais il s’appaifa quand il fçut qu il confervoit tou- I
jours l’intention de revenir.
Cependant Albine fabellemere,qui apparemment I
n’étoit pas à Hippone lors de ce. tumulte, fe plaignit I
de la violence qu’on lui avoit faite ; foutenant que I
l’on n’en vouloir qu’a ion bien, ôc que le ferment qu il I
avoit fait par force Sc par la crainte de la mort ne le I
pouvoir obliger. Saint Augui l inen écrivit a Alypius, I
pour le pier de guérir de cefoupçon Albine Sc fes en- I
fans,c’eft-à-dire,Pinien fon gendre 8c fa fille Melanie; I
car, dit-il, quoyqu’ils ne fe plaignent que du peuple, I
on voit bien que ces foupçons tombent fur le cierge 8c I
principalement furies év êques ,qui paifent pouretre I
les maîtres du bien d e l ’eglife. Et nous ne devons pas I
nous contenter du témoignage de notre confcience; I
mais fi nous avons quelque etincclle de charité, nous I
devons avoir foin de bien faire,non feulement devant I
D ie u , mais devant les hommes. Comme Pimendou- I
toit s’il étoit obligé à garder ce ferment , qu’il n’avoit
fait que pour éviter la violence du peuple d Hippone:
S. Auguftin donne ces maximes fur la^ matière des
fermens. Un ferviteurde Dieu doit plutôt s expofera I
une mort certaine, que de promettre avec ferment
une aétion défendue ; parce qu il ne pourroit accomplir
le ferment, que par un crime; mais celui qui a
promis une chofe permife , par la crainte d un mal
incertain,comme Pinien, doit accomplir fa promeue, I
plûtot que de commettre un parjure certain. On I
doit oblerycr le ferment , non félon la rigueur des I
paroles I
L i v r e v i n g t - d e u x i e ’ m é . 513
paroles dans lefquelles il eft conçu, mais félon l’atten-
j te de celui à qui on le fa i t , connue parcelui quijure.
■Ainfi l’abfence de Pinien n’étoit point contraire à ion
■ferment, tant qu’il avoit l’efprit de retour,
i Saint Auguftin écrivit auifi à A lb in e , non pour ty. ¡m.
Ife plaindre du foüpçon qu’elle avoit de lu i , mais pour
Ifejuftifier 8c la confoler. Il lui rend un compte exaét
Ide tout ce quifx’étoit paiTé à Hippone au fujet de
■Pinien. Puis il montre que l’on ne doit pas foupçonner
Ile peuple d’Hippone, de l’avoir voulu retenir par in-
Iterêc. Ce n’eft pas, d i t - i l , votre argent qui les a
■touchez, mais le mépris que vous avez pour l’argent.
■Ce qui leur a plûen moi , c’eft qu’ils fçavoient que "v?*
Jj’avois quitté pour fervir Dieu, quelques petits héritages
de mon patrimoine, Sc ils ne les ont pas en-
Jviez à l’églife de T a g a f te o ù je fuis né; mais comp
ile elle ne m’avoit point engagé dans la clericature,
|ils m’y ont fait entrer quand ils ont pû. A combien
ipliis forte raifon ont-ilsété touchez, de voir en noire
cher Pinien le mépris de tant de richefles Sc d ef-
jperânees? Plufieurs trouvent que loin de quitter les
ïicheifes, j’y fuis parvenu , mon patrimoine feroit à
ÿeine la vingt ième partie des biens de cette églife.
IMais Pinien, quand il feroit évêque en quelque égli-
f e q u e cefoit ,principalement d’Afr ique, nefçauroit
ptre que pauvre, en comparaifon des biens qu’il pofle-
Boit. Le foupçon d’intérêt ne peut donc tomber que ^ 8> .
pur les c lercs, Sc principalement fur l’évêque ; car
fc eft nous que l’on regarde comme les maîtres du
Bien de l’églife. Or Dieu m’eft témoin que loin d’ai- «•
l^ e r , comme l’on c r o i t , cette adminiftration , elle
Pn eft à charge; Sc que je ne m’y foûmets que par la
■crainte de Dieu; 8c la charité que je dois à mes fre-
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