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300 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q j j e.
taire peur, lui effleura la peau , 6c lui mit la gorge eu
fang. Ellepréfenta hardiment fa tête à couper ,. 8c le
barbare touché de fa ve r tu , la mena lui-même à l ’é-
glifede S. Pierre, la recommanda aux g ardes , 8c leur
donna fix pièces d’or pour fa nourriture , afin qu’on
la rendît à fon mari.
on/, vu*.},, j Un autre Goth des principaux 6c chrét ien, trouva
dans une maifon d’une églile une vierge confacréeà
Dieu, 6c avancée en âge, il lui demanda honnêtement
fon or 6c ion argent; 8c elle lui dit avec fermeté qu’elle
en avoit quantité , 6c qu’elle alloit lui montrer. En
effet elle expofa à fes yeux de fi grandes richeffes, que
le barbare fut étonné du nombre , du poids 6c de la
beauté de tant de vafes, dont il ne fçavoit pas même
les noms. Ce font, lui dit-elle les vafes de l’apôtre faint
Pierre, prenez les fi vous ofez , vous en repondrez;
comme je ne puis les défendre,, je n’ofeles retenir.Le
barbare touché de refpeèl, l’envoya dire à Alaric, qui
commanda qu’auffi-tôt on raportât tous les vafes,
comme ils étoient , à la bafilique de S. Pierre , 6c que
l ’on y menât aufli avec efcorte lavierge facréc, 6c tous
les chrétiens qui s’y joindroient. Cet te maifon étoit
loin de l’égliie de S. Pierre, enforte qu’il falloir traver-
fer toute la ville; ainfi ce tranfport des vafes facrez
fut un fpeôtacle 6c une pompe magnifique, ils étoient
porté un à un fur la tête à découvert, 6c des deux cotez
marchoient des foldats l’épée à la main ; les Romains
6c les barbares chantoient enfemble des hymnes à la
louange de Dieu. Les chrétiens accouroient de tous
côtez ; plufieurs payens firent femblant d’être chrétiens
en cette occafion, 6c plus il s’amafToit de Romains
pour fe fa u v e r , plus les barbares s’empreffoicnt à les
entourer pour les défendre.
L i v r e v i n g t -d e u x i e’ m e. 301
Les barbares étant entrez chez fainte M arcelle, lui ~ ’
I iif-mandoient fon or ôc fes richeffes cachées. Elle leur ' ^IO*
I . 1 Hier. ep. 16. ad
I die qu e l l e n en a v o ïc p o in t *m o n t r a n t pour p r e u v e la Princip* 6* I pauvreté de fes habits ; mais ils ne la crurent pas, ils
■ la tourmentèrent â coups de foiiet ôc de bâton : elle fe I jettoità leurs pieds, 6c leurdemandoitaveclarmesde
■ ne point féparer d elle fa fille Principia , pour laquelle
■ elle craignoitl’infulte dont elle-même étoit à couvert I par fon âge avancé. Les barbares en furent touchez ,
■ 6c lesconduifirent toutes deux â l ’églife de faint Paul. I Car Alaric avoit ordonné qu’elle fervît d’afyle auiïi-
I bien que celle de S. Pierre. Sainte Marcelle remercioit I Dieu d’avoir fauvé l’honneur de fa f i l le , 6c de l’avoir I elle-même prefervéëdu pillage par la pauvreté volon-
■ taire. Elle mourut peu de joursj après entre les bras
de fa fille; ôc l’illuftre Pammaque mourut auffi ve rs I le même tems. Un diacre nommé Denis , qui fçavoit
■ lamédecine, 6c l’exerçoit gratuitement, fut emme-
■ né par les Goths ; mais il fe rendit fi aimable 6c fi ve-
■ nerable parmi eux , qu’ils le regardoient comme leur Epitapi.ad bm.
■ maître.
Un grand nombre de chrétiens fortit de Rome a Hier »prof» iib. io-
■ cette occafion , ôc on regarda comme un effet de la
I providence , que le pape faint Innocent en fut forti
I quelque tems auparavant , pour aller en députation
I vers l’empereur Honorius; car il étoit encore alors a Id.c. 411«' I Rrvenne. Les barbares laifTerent fortirceux qui-vou-
■ lurent, leur donnèrent efcorte,. ôc leur aidèrent à em-
| porter leur bien, moyennant une petite réeompenfe.
■ Le pillage de Rome ne dura que trois jours, ôc Ala- +J8
■ rie en fortit le fixiéme jour après qu’il y fut entré J
■ fans y laiffer de garnifon. Il paffa dans la Camp anie ,
■ où fes troupes pillèrent Noie ; ôc en cette occafiou
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